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11 expulsions par jour à Bruxelles !

Par Pernelle Godart, assistante-doctorante en géographie humaine et géomatique ; Mathieu Van Criekingen, enseignant-chercheur en géographie et études urbaines, Université libre de Bruxelles.

Pernelle Godart et Mathieu Van Criekingen. – D.R.

Quitter de force son logement ne se résume pas à perdre un toit. C’est également devoir quitter son quartier, un lieu où l’on a ses habitudes, ses proches et l’école des enfants. C’est aussi devoir faire face à l’angoisse de ne pas savoir où l’on vivra, au stress engendré par les démarches judiciaires et administratives et au sentiment de honte ressenti face aux juges, aux travailleurs sociaux ou vis-à-vis de ses proches. Quitter de force son logement, c’est également une course contre la montre pour trouver un nouveau lieu de vie. A Bruxelles, le manque criant de logements sociaux contraint les ménages pauvres à se débrouiller sur le marché privé, où la forte concurrence les expose aux exigences des bailleurs. C’est d’autant plus compliqué pour ceux qui subissent le poids des discriminations, sur base de leurs origines, de leur revenu ou de la taille de leur famille. Ainsi, les familles délogées doivent souvent se résigner au premier logement qui voudra bien les accueillir, même s’il est insalubre ou excessivement coûteux, présageant déjà un risque d’expulsion future. Alors que certaines familles trouvent une alternative plus ou moins pérenne, d’autres basculent dans une longue période d’instabilité résidentielle, voire dans la rue.

En moyenne, 11 expulsions par jour à Bruxelles

On peut être tenté de croire que les expulsions sont exceptionnelles et qu’elles n’ont lieu qu’en dernier recours. Pourtant, elles sont une réalité quotidienne dans nos villes. A Bruxelles, sur une année complète, près de 4.000 ménages locataires reçoivent un ordre d’expulsion émanant d’un Juge de paix, soit une moyenne de 11 expulsions par jour. A défaut d’un comptage institutionnalisé, ce chiffre a été obtenu par un dénombrement exhaustif des dossiers des 19 Justices de Paix bruxelloises pour une année entière par une équipe de recherche associant l’ULB et la VUB. Ce chiffre n’inclut pas les expulsions dites informelles, qui ne passent pas par un Juge de paix, impossibles à dénombrer de manière rigoureuse mais vraisemblablement nombreuses elles aussi.

La question du loyer au centre du problème

Le dénombrement de ces jugements révèle que la grande majorité des expulsions concerne des logements loués sur le marché privé (81 %) et sont prononcées pour motif d’arriérés de loyer (86 %). Ces données traduisent que les expulsions sont avant tout causées par des logiques de marché : les ménages qui ne parviennent pas à payer leur loyer sont évincés pour faire place à des ménages plus solvables. A un niveau plus général, en offrant un moyen légal aux bailleurs pour se séparer des locataires en défaut de paiement, l’expulsion assure la rentabilité du capital immobilier, et contribue à l’augmentation des prix sur le marché du logement. A noter que les cas où l’expulsion est ordonnée pour permettre au propriétaire d’occuper lui-même les lieux sont rares.

Il apparaît ainsi que la cause profonde des expulsions locatives tient moins à des loyers impayés qu’à des loyers impayables pour une grande part de la population. En plus de mettre financièrement à mal de nombreux ménages, les loyers excessifs par rapport aux revenus disponibles compliquent également la transition vers un nouveau logement lorsque le bail actuel est interrompu ou non reconduit à son terme. Certains ménages se retrouvent ainsi expulsés faute d’avoir trouvé où déménager dans les temps.

Une procédure judiciaire à l’avantage des bailleurs

Ces expulsions ne sont pas des affaires privées entre locataires et bailleurs. L’État intervient à la fois en encadrant la procédure, en établissant les conditions légales nécessaires à l’obtention d’un ordre d’expulsion et en assurant l’exécution des décisions judiciaires à travers ses officiers publics et policiers. Ainsi, les procédures d’expulsion font partie intégrante des routines de nos systèmes judiciaire, administratif et policier.

Notre enquête révèle que dans 60 % des cas, les locataires sont absents lors de l’audience en justice qui décide de leur maintien ou non dans le logement. Autrement dit, 6 fois sur 10, l’ordre d’expulsion est émis en se fondant exclusivement sur la version des faits fournie par le bailleur. Or une expulsion pour défaut de paiement de loyer peut masquer des réalités très diverses, comme le fait que le locataire ait retenu une partie du loyer pour inciter le bailleur à effectuer des travaux de rénovation. Cette stratégie fournit alors au bailleur un motif légal pour autoriser une expulsion. De surcroît, si l’expulsion est décidée en raison d’un manquement du locataire, le juge n’est pas tenu de vérifier si le bailleur a rempli ses propres obligations, notamment en ce qui concerne les normes de salubrité. Pourtant, sur le terrain, les expulsions de logements insalubres, à loyer abusif ou subdivisés illégalement, sont malheureusement fréquente.

Ces observations, encore accentuées par le fait que les locataires ne sont représentés par un avocat que dans un cas sur dix, contre sept fois sur dix pour les bailleurs, soulignent une inégalité procédurale manifeste. Au lieu de l’atténuer, la procédure judiciaire aggrave le déséquilibre de pouvoir inhérent à la relation entre locataire et bailleur, en particulier dans une ville où le marché du logement est tendu comme à Bruxelles. En définitive, la menace d’expulsion agit comme un outil disciplinaire sur l’ensemble des locataires, les dissuadant de faire valoir leurs droits.

Comment prévenir les expulsions

Ces constats mettent en évidence la dimension structurelle des expulsions de logement. Bien plus qu’une question individuelle, où l’on pourrait pointer du doigt des « mauvais locataires » ou des « propriétaires peu scrupuleux », les expulsions représentent une question profondément systémique, donc politique. A Bruxelles, elles reflètent le caractère peu régulé des rendements locatifs sur le marché locatif privé, laissant une grande marge de manœuvre aux bailleurs pour la fixation des montants des loyers, tandis que de nombreux locataires consacrent une part disproportionnée de leurs revenus au paiement du loyer. Les expulsions de logement se trouvent ainsi au cœur des mécanismes de maintien et d’aggravation des inégalités sociales.

Prévenir les expulsions demande d’agir à la racine du problème, c’est-à-dire de repenser l’équilibre entre droit de propriété (lucratif) et droit au logement, tous deux inscrits dans la Constitution belge. Avec la régulation du marché du logement, la législation en matière de bail et d’expulsion, la création de logements publics abordables et la mise à disposition d’assistance sociale, l’État dispose de leviers puissants pour réduire le nombre d’expulsions et, plus généralement, agir contre le mal-logement et la pauvreté.*L’ensemble des méthodologies et des résultats de la recherche sur laquelle se base cette contribution peuvent être retrouvés sur le site Bru-Home. Cette recherche a été financée par Innoviris.

Avec l’aide de Carta Academica

l’Ordonnance anti-expulsions est publiée

22 JUIN 2023 (MB 21/08/2023) — Ordonnance insérant dans le Code bruxellois du Logement les règles de procédure applicables aux expulsions judiciaires et modifiant les moyens affectés par et au profit du Fonds budgétaire de solidarité

Lettre ouverte aux administrateurs de Comensia

Lettre ouverte à Comensia, société de logement social

Signée par 18 organisations de défense du droit au logement, des droits sociaux et du droit à la ville, cette lettre exige l’abandon de l’expulsion d’une des locataires de Comensia, au nom de la mission de service public du logement social et des objectifs publics en matière de lutte contre le mal-logement et le sans-abrisme.

Aux administrateurs et administratrices de Comensia, société de logement social

Mme M* vit avec son fils dans un logement social de votre SISP depuis 25 ans. Sa situation socio-économique compliquée la mène à avoir ponctuellement des arriérés de loyer. A chaque fois que cela arrive, après une assignation en justice, Mme M se débrouille pour trouver une solution et payer les arriérés. Mais en septembre 2022, suite à une nouvelle procédure en justice initiée par Comensia, un nouveau jugement d’expulsion est tombé. Malgré la prise en charge des arriérés par le CPAS et la mise en place d’un règlement collectif de dettes pour éviter de nouveaux impayés, et malgré les procédures en justice encore en cours, vous maintenez la décision d’expulsion le 31 mai quoi qu’il arrive. Comensia est l’une des 16 Sociétés Immobilières de Service Public (SISP) de la région bruxelloise. Comme toutes les autres SISP, elle est sous la tutelle et le contrôle de la Société du Logement de la Région Bruxelles-Capitale, elle-même sous contrôle du gouvernement bruxellois. Comensia est donc au service et sous le contrôle de la collectivité. Si le jugement à l’encontre de Mme M est mis à exécution, Comensia aura obtenu qu’une personne en situation déjà très précaire se retrouve à la rue – parce que vous le savez très bien, Mme M n’aura pas accès à un logement, ni sur le marché privé, ni dans le logement social. De votre côté pourtant, vous avez bel et bien reçu tous vos loyers. Cette décision et la posture inflexible de Comensia est incompréhensible et indéfendable. 

Mme M se dit que de deux choses l’une: soit Comensia la considère comme une menteuse et une profiteuse, refusant de reconnaitre la situation précaire dans laquelle elle se trouve, soit votre SISP préfère se débarraser des locataires les plus vulnérables.

Faut-il le rappeler, le logement social est un service public destiné à réaliser le droit à un logement décent pour les personnes à revenus modestes qui ont difficilement accès au logement (décent et de qualité) sur un marché privé cher et qui discrimine. En tant que SISP, Comensia se définit comme un « acteur engagé dans l’amélioration du cadre de vie en Région Bruxelloise » qui « contribue au bien-être de ses locataires ». Comensia se targue de mettre au centre de ses valeurs la coopération, la confiance, le respect, l’épanouissement, l’écoute.  Expulser des personnes vulnérables qui n’ont pas d’autre endroit où aller va totalement à l’encontre de l’objet même du logement social et des valeurs que vous prônez.  Pourtant, ce n’est pas la première fois que Comensia procède à une expulsion sans prendre en compte la disproportion entre les dommages subis par la SISP, et les dommages causés sur les personnes expulsées.  

Le logement social est un service public destiné à réaliser le droit à un logement décent pour les personnes à revenus modestes qui ont difficilement accès au logement (décent et de qualité) sur un marché privé cher et qui discrimine.

Les expulsions de logement sont des expériences inhumaines et traumatisantes. Elles procurent un niveau de stress énorme, dégradent les conditions de vie des familles qui sont obligées d’accepter des solutions de relogement de moindre qualité, un hébergement temporaire à gauche ou à droite, ou carrément un aller simple vers la rue. Elles impactent la santé physique et mentale, génèrent tensions familiales, perte de biens matériels, perte d’emploi, perte d’adresse et de droits, honte et isolement. L’histoire de madame M n’est pas la seule. On ne peut pas laisser des SISP envoyer leurs locataires vers des situations de précarité absolue: tous les services sociaux et autres collectifs de soutien aux mal logé.e.s le savent, on les retrouve ensuite plus abimé.e.s, plus vulnérables, dans des structures d’hébergement saturées ou dans la rue. Le coût sociétal de ces expulsions est colossal, et cela ajoute de l’exclusion et de la violence à notre société. 

Lorsqu’un bailleur privé expulse, la justice l’exempte de toute responsabilité quant aux conséquences sur la personne expulsée. Un bailleur social se doit, lui, d’envisager toutes les autres mesures moins dommageables, et au pire, s’assurer qu’une solution de relogement existe bel et bien et ce avant la date de l’expulsion!  

Une expulsion d’un logement social est contraire à la mission de service public du logement social, et elle est contraire aux objectifs que se fixent les pouvoirs publics en matière de logement et de lutte contre le sans-abrisme, que ce soit à l’échelle locale, nationale ou internationale.  Expulser les personnes vulnérables pour faire de la place n’est pas une solution. Il faut plus de logements sociaux, un meilleur accompagnement des locataires en difficultés et un arrêt total des expulsions. Nous exigeons donc que vous abandonniez immédiatement la procédure d’expulsion à l’encontre de Mme M.  

*Nom d’emprunt 

Liste de signataires :  

  • Front Anti-expulsions
  • Syndicat des locataires 
  • Action Logement Bruxelles
  • Front Commun SDF
  • Fondation Léon Lesoil
  • Union des locataires marollienne
  • Union de Locataires d’Anderlecht Cureghem
  • Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat 
  • Equipes Populaires Bruxelles
  • De Buurtwinkel 
  • L’Ilôt asbl
  • Comité de la Samaritaine as 
  • L’Atelier des Droits Sociaux
  • L’Aide & Assistance aux Victimes de Violence Asbl
  • MOC Bruxelles
  • Observatoire des inégalités 
  • Inter-Environnement Bruxelles 
  • Fédération des services sociaux 

Expulsions locatives

L’expulsion d’un locataire ne peut avoir lieu qu’à la suite d’un jugement du juge de paix. En effet, un propriétaire doit toujours avoir un titre exécutoire pour pouvoir procéder à une expulsion. Il ne peut donc pas, de sa seule autorité, mettre son locataire et ses meubles sur le trottoir, ou remplacer les serrures.

Dans les logements sociaux de la région Bruxelloise, il existe une protection supplémentaire, une période hivernale s’étendant du 1er décembre de chaque année au 15 mars de l’année suivante est reconnue.

Pendant cette période toute expulsion « physique» d’un locataire d’un logement social,
modéré ou moyen ne pourra être effectuée que pour des cas exceptionnels.

Voir circulaire SLRB n° 635 du 28/09/2018.

Circulaires Slrb sur les expulsions

actuellement en vigueur

Les expulsions de logements gérés par les SISP (sociaux, modérés et moyens).

Autres circulaires (abrogées)

N° 230

N° 231

Pas d’expulsion sans relogement.

Le syndicat des locataires conteste l’expulsion d’une mère et de ses quatre enfants à Molenbeek

Par Philippe Carlot

Khadija Chaou, la quarantaine, habite un appartement social au 13e étage d’un building du Logement molenbeekois depuis 2018. Cette mère de quatre garçons âgés de 8 à 17 ans les élève seule depuis le départ de son mari. Bien qu’en règlement collectif de dettes, elle a toujours payé son loyer sans interruption. 

Le comportement des enfants en question

Dès 2019, le Logement molenbeekois reproche à Khadija Chaou de ne pas entretenir correctement son appartement et de manquer d’hygiène. Viennent ensuite des plaintes concernant le comportement des deux jumeaux de la locataire, alors âgés de 12-13 ans. Les plaintes cessent une fois les deux adolescents placés dans un internat. Puis, c’est au tour de l’aîné, 17 ans actuellement, d’être accusé de commettre des délits et des incivilités, sans que le jeune fasse – semble-t-il – l’objet de poursuites judiciaires. 

Pour Madame Chaou, le Logement molenbeekois fait preuve d’acharnement à son égard. « Pendant le confinement, mon aîné est souvent resté devant la porte de l’immeuble avec ses amis. On m’a convoquée à propos de son comportement et quand j’y suis allée, le Logement molenbeekois m’a montré plusieurs photos, prises par la concierge du bâtiment voisin, de jeunes parmi lesquels se trouvait mon fils. Ces jeunes, ils étaient 7 ou 8 mais il n’y a que moi qui ai été convoquée, il n’y a que moi qu’on expulse par rapport au comportement de mon fils. 

Et que reproche exactement le Logement molenbeekois à son fils? Khadija Chaou poursuit : « en fait, on lui reproche beaucoup de choses mais il n’y a aucune preuve. On me dit « votre fils fait du trafic », « votre fils a brûlé des voitures », « votre fils a agressé » mais il n’y a aucune preuve. »

Pour éloigner son fils d’éventuelles mauvaises fréquentations dans ce quartier molenbeekois d’Osseghem, réputé « difficile », Madame Chaou accepte de déménager dans un autre appartement du Logement molenbeekois. On lui en propose un situé rue de l’Eléphant, dans un quartier tout aussi « difficile », ce qui ne lui convient pas. Le jour fixé pour la visite, Khadija Chaou ne se présente pas. Fatale erreur. 

Expulsée par la Justice de Paix

Le Logement molenbeekois demande la rupture du contrat de bail devant la Justice de Paix. De tous les griefs avancés par la SISP (Société Immobilière de Service Public), le juge n’en retient qu’un : le fait de ne pas avoir honoré le rendez-vous pour la visite d’un nouvel appartement, qualifié de « manquement grave » et de nature à entraîner l’expulsion de la famille Chaou de son logement social.

Pour le secrétaire général du Syndicat des Locataires, José Garcia, la motivation du Juge de Paix est erronée. Le jugement considère en effet que le refus de visite de Madame Chaou se situait dans le contexte d’une mutation alors que, pour le Syndicat, il s’agissait d’une procédure de transfert. Un refus de logement dans le cadre d’une mutation (quand un ménage occupe un logement trop grand pour lui et est invité à « muter » dans un logement plus adapté) peut être sanctionné d’un renon. Ce n’est en revanche pas le cas lors d’un transfert. Si le locataire refuse le changement d’appartement, il conserve celui qu’il occupe, sans pénalité. 

En insistant un peu, nous avons du reste fait admettre au directeur du Logement molenbeekois qu’il s’agissait bien d’un transfert, et non d’une mutation. 

Malgré l’appel, une expulsion maintenue

Madame Chaou a donc fait appel du jugement. Lequel est, comme de coutume, exécutoire en dépit de cet appel. Autrement dit, le Logement molenbeekois n’est pas tenu d’attendre la décision de l’instance supérieure pour procéder à l’expulsion. Lors d’un conseil d’administration, le 29 mars dernier, le cas de Madame Chaou figurait à l’ordre du jour. Selon le PV, le CA a décidé de poursuivre la procédure d’expulsion après avoir pesé le pour et le contre. 

Parmi les arguments en faveur de l’expulsion, le CA pointe notamment : « si nous n’exécutions pas et que nous devions néanmoins avoir gain de cause en appel, aucun huissier n’acceptera de procéder à une expulsion plusieurs années après un jugement ». Cet argument est purement et simplement inexact. La décision d’appel sera évidemment tout aussi exécutoire que le jugement du Juge de Paix. 

Autre argument « pour » : « même si la motivation retenue par le juge ne nous paraît pas la bonne, il convient de faire de ce dossier un exemple ». Dans son jugement, pourtant, le Juge de Paix écrit ceci : « Tout d’abord, tout comme en matière pénale, il ne peut être question de « faire un exemple », il ne peut être question de « sanctionner » pour réconforter pas plus qu’il ne peut être question de « soutenir » une partie dans ses revendications à l’égard d’une autre ». 

Parmi les arguments en défaveur de l’exécution du jugement malgré l’appel, le CA du Logement molenbeekois note : 

« – Il n’y a aucune certitude quant à l’issue de cet appel. Le tribunal de première instance pourrait en effet considérer que la résolution du bail ne peut être prononcé (sic). 

– Outre l’aspect financier, les retombées que pourraient (sic) avoir ce dossier sont davantage à considérer. En effet, la presse pourrait se saisir du dossier et faire grand bruit en pointant le fait que le Logement Molenbeekois a expulsé, à tort, une femme seule avec quatre enfants ». 

Sans commentaire. 

Le Logement Molenbeekois s’explique

Frédéric Dufour est le directeur-gérant du Logement molenbeekois. Dans ce dossier, il estime avoir fait preuve de mansuétude et de bienveillance mais, désormais, la coupe est pleine. « Vous n’êtes pas conscient de tout ce qu’il y a comme dégradations, comme bienveillance du Logement Molenbeekois en préalable de cette décision d’aller en Justice de Paix. C’est un dossier qui date d’il y a plus de deux ans, et madame Chaou n’a rien voulu entendre. Madame Chaou ne s’est pas occupée de ses enfants. Madame Chaou n’a rien fait. On a donné toutes les possibilités pour que Madame Chaou puisse rester là où elle est et que tout se passe bien. A partir d’un certain moment, je dois veiller, moi, au bien-être et au calme de mes locataires et là on parle de plus de 1000 personnes ». 

L’expulsion est prévue pour le 30 avril au plus tard. Le Syndicat des Locataires en appelle à la bourgmestre de Molenbeek, à la SLRB (la société régionale du logement) et à la secrétaire d’Etat au Logement du gouvernement bruxellois pour l’empêcher. 

Expulsions locatives: STOP ou ENCORE

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Moratoire des expulsions (Reg. Bxl)

Le Syndicat des Locataires salue à sa juste mesure le moratoire contre les expulsions,
tant dans le logement social que privé, pris par Rudi Vervoort et Nawal Ben Hamou ce mardi 17 mars 2020.
Pour bien faire, cette mesure devrait se poursuivre après l’épidémie de coronavirus car nous sommes convaincus que, via un bon accompagnement social des locataires concernés, on pourrait aboutir à zéro expulsion dans notre Région.
La spectaculaire diminution des expulsions dans le logement social suite à l’établissement d’un tel mécanisme le 16/11/2000 prouve, à elle seule, la faisabilité de la méthode ainsi que  son extrême efficacité.
Nous demandons au Cabinet de la Ministre du Logement d’organiser, après l’épidémie, une concertation avec le secteur en vue de mettre en place pour le logement privé un tel dispositif.
Pour le Syndicat des Locataires
José GARCIA
Secrétaire général

 

 

TEXTE OFFICIEL / OFFICIËLE TEKST

AMPRBC interdisant les expulsions domiciliaires 1AMPRBC interdisant les expulsions domiciliaires 2AMPRBC interdisant les expulsions domiciliaires 3

Expulsée sans titre ni droit !

Philippe Carlot. RTBF

Expulsés de leur logement bruxellois, une étudiante italienne et son bébé n’ont droit à aucune aide.

Ouiame est étudiante à l’ULB. Elle a 21 ans et est de nationalité italienne. Elle logeait dans un kot étudiant, qu’elle a dû quitter à la naissance de sa fille, il y a cinq mois. En juin, elle trouve un appartement rue du Vautour, dans le quartier de la Porte d’Anderlecht, sur le territoire de la Ville de Bruxelles. Ouiame l’ignore au moment de signer le bail : elle vient de sous-louer un logement social à un locataire en délicatesse avec le Logement bruxellois depuis mai 2017 et en instance d’expulsion.

Escroquée et expulsée

La jeune femme est de bonne foi, tout le monde s’accorde à le dire. Elle ne savait pas que l’appartement qu’elle loue est un logement social, auquel elle n’a pas droit. Elle ignorait également qu’un limiteur de puissance avait été posé sur le compteur électrique, tout comme elle ignorait qu’une procédure en justice était pendante en vue d’expulser le locataire principal qui ne payait plus de loyer depuis plusieurs mois.

Dans l’histoire, la jeune étudiante est doublement victime : elle a perdu à la fois son logement et la garantie locative de 1050 euros payée au locataire principal. Elle a déposé plainte au pénal contre lui pour escroquerie mais en attendant la conclusion de l’enquête et un éventuel procès, l’argent est perdu. Ce mercredi 3 juillet, un huissier s’est présenté à son domicile avec la police pour faire exécuter le jugement d’expulsion.

Expulsée avec son bébé de 5 mois

Aucune aide sociale à attendre

Sans son avocate et la mobilisation du Délégué Général aux Droits de l’Enfant ainsi que du secrétaire général du Syndicat des Locataires de Logements sociaux, le Logement bruxellois aurait expulsé une jeune mère et son bébé de 5 mois sans s’inquiéter de leur sort. En tant qu’étudiante ressortissante d’un état de l’Union européenne, Ouiame et son enfant n’ont droit à aucune aide sociale : ni CPAS, ni logement de transit. Sans revenus propres, les AIS (agences immobilières sociales) ne lui sont pas accessibles. « Au bureau des étrangers de la Ville de Bruxelles, quand on fait la demande pour un titre de séjour, on doit signer un document en tant qu’étudiante européenne pour obtenir la carte E. En signant ce document, j’atteste que je ne vais jamais demander de l’aide sociale à l’Etat belge », explique Ouiame. « Au cas où je demanderais de l’aide, on me retirerait ma carte de séjour. Je suis de nationalité italienne, je suis en Belgique et en réalité, je suis comme une immigrée ». 

Un dialogue de sourds

Face à la situation de détresse de la jeune mère et de son bébé, initialement, le Logement bruxellois ne veut rien entendre. « Cette dame est une victime collatérale et nous sommes profondément désolés de devoir en arriver à une expulsion mais nous ne ferons pas marche arrière », explique Lionel Godrie, Directeur général du Logement bruxellois. Sur le plan légal, la société de logements sociaux est dans son droit. Elle veut récupérer un appartement pour lequel elle ne perçoit plus aucun loyer depuis de nombreux mois. La jeune femme et son bébé occupent le logement de manière irrégulière même si leur bonne foi n’est pas contestée. Pour autant, Franciska Bangisa, l’avocate d’Ouiame, ne comprend pas l’attitude du Logement bruxellois.

« J’ai été étonnée en fait de tant de fermeture parce que j’avais sollicité un moratoire, même court, pour permettre à ma cliente de se retourner. Et je dois bien dire que c’était un refus catégorique. (…) Ce n’était pas le droit des contrats qui était en jeu mais vraiment la dignité humaine et le droit à un logement décent de ma cliente et je n’ai pas eu le sentiment, en tout cas pas l’impression, que ça été vraiment entendu. »

Relogée in extremis

Les pressions de l’avocate, du Délégué Général aux Droits de l’Enfant, Bernard Devos, du Secrétaire général du Syndicat des Locataires de Logements sociaux, José Garcia, ont finalement abouti. Le tout récent échevin du Logement de la Ville de Bruxelles, Khalid Zian (PS), est par ailleurs président du CA du Logement bruxellois et en charge de la Régie foncière.  En urgence, ses services ont pu proposer deux options à la jeune mère. Soit un logement générationnel auprès de l’asbl « Un Toit pour deux âges », soit un appartement de la Régie, pour lequel il reste à rassembler la garantie locative équivalente à deux mois de loyer. Reste la « morale » de cette histoire : sans avocat ni relais politiques, une jeune femme et son bébé de 5 mois se seraient retrouvés à la rue sans que les services sociaux et les responsables politiques ne lèvent le petit doigt, juste parce qu’elle est une étudiante européenne.

​3 JUIN 2019​
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