par mon graphiste Olivier Dentier
Grandir c'est par les deux bouts
"vous rêvez ou vous parlez
?"
"Je voudrais…"
Je parle… J'en parle…
Je dis, je redis… "Je voudrais bien que…"
un rêve, puis deux, trois, quatre… Une arborescence de
rêves, lequel choisir ?
Ils vibrent tous en moi chargés de sens et de
ressources.
mes rêves portent mes mots qui portent mes rêves
Un rêve s'enhardit, saisit le porte-voix, ose ;
Ma coquille lâche brise.
Les mots criés sur la place publique osent se faire
entendre;
les mots passés sous silence par peur de… peur du
qu'en-dira-quoi ? par peur de se faire abattre par des 'Long Rifle' silencieux,
les terroristes du langage ?
Juché sur un petit promontoire aux teintes flashy, je
tente quelques fines percées dans la léthargie quotidienne. Y glisser de la
parole vraie, la rendre audible, palpable, infuser, diffuser, parmi le flot des
paroles déguisées, biaisées, venimeuses qui saturent nos espaces. Et tous ces
rêves vendus au prix de notre servilité. Mais comme l'eau claire, les silences
purs, les rayons de soleil, le rêve ne se vend pas. Qui t'a laissé croire ça ?
Je voudrais… JE VEUX être eau claire, silence pur,
rayon du soleil, et vivre mes rêves, au moins quelques uns.
La vie me veut ainsi.
"Seul l'éphémère dure"
"jouis de ma matière
première"
Vidée la corbeille de ce que je croyais ne pas pouvoir
être. Je sens et sais que je peux.
je goûte à l'éphémère de ces instants multipliés où je
m'accorde les pleins pouvoirs de pincer les joues de mon petit tyran. Celui qui
me laisserait croire que ma joie ne pouvait être que la petite cerise de
récompense sous la montagne déplacée, qu'elle serait denrée rare et
infinitésimale… C'était mal me connaître. Je n'ai qu'à ouvrir mon attention, me
sonder à la baguette de sourcier pour mettre à jour le gisement de ma matière
première inépuisable. Accessible sans accord préalable d'une autorité. Tout un
univers, tissé en souterrain. Mes racines auraient pu se contenter de donner un
arbre rachitique. Elles en ont décidé autrement, en perçant la croûte bétonnée
d'ennui et de plonger plus profond en terre. Exploration heureuse, chemin
d'alliance naturelle avec la faune étrange qui la malaxe, l'enrichit et la
fertilise. Elles sont allées à la rencontre d'autres racines aimantes qui ont
fait ce même chemin incertain des profondeurs. Racines d'arbres clowns,
d'arbres poètes, écrivains, artistes sauvages, repentis de barbarie humaine.
C'est là que se développe un langage de survie solidaire avec les âmes
choisies, contre les pilleurs, prédateurs et colonisateurs. Mes racines vont
continuer de buter sur des poches de métaux lourds et toxiques, de s'abîmer sur
des sols pierreux et contre les déchets de l'époque. Peut-être connaîtront-elles
encore quelques vertiges d'abîme. "Faire de l'interruption, un nouveau
chemin" dit Pessoa.. Mes racines apprennent, capables de ramifications qui
sont de nouveaux rebonds devant l'obstacle. Personne ne m'empêchera l'accès à
la nappe nourricière en forme de sourire à la vie.
La vie me veut ainsi.
"Tout est dit avec force,
sans hausser la voix
La fragilité de ces existences
qui ne tiennent qu'à un fil"
"c'est dans la rosée des
petites choses que le coeur trouvent son matin et se rafraichit"
L'Olivier, fort de sa jouissance de toute sève, voit
ses ramures s'étoffer, se développer en touffes très denses de mille projets.
Elles deviennent en même temps le siège des pépiements
incessants des pensées dissonnantes faisant leurs nids. Le soleil intérieur
peine à filtrer au travers de cette cacophonie. De sa sève même, puisée très
profond, lui remontent les conseils utiles à son ascension. l'Olivier sent une
étreinte à la base de son tronc. c'est un enfant qui l'enserre de ses 2 petits
bras et lui parle avec douceur. "c'est facile - un jeu d'enfant : il
suffit d'élaguer les branches inutiles, ouvre grand ton attention : je vais te
guider dans ton choix". Celles où l'enfant fait le cochon pendu en
éclatant de rire, c'est bon signe. Celles où il joue les singes agiles et
libres, je les garde. Puis celles où il s'endort, rêve et s'éveille chaque
matin le coeur rafraichi à la rosée des petites choses, celles-ci je leur
laisse le chant libre. Mes branches, celles où j'excelle, mes branches de
créativité infinie, torrent de sève d'amour, sont assez fortes pour te
soutenir, enfant rieur et espiègle qui fait des entorses à la dureté du monde
pincé dans l'étau.
En quelques clics et quelques clacs, les branches
pesantes et pompeuses de sève s'éliminent, et les branches saines et sûres
peuvent reprendre le chemin des cîmes.
La vie me veut ainsi, à donner les plus beaux fruits.