Ghi
Le ghi ou ghee (hindi : घी ; bengali : ঘী ; tamoul : நெய் (ghī) ; télougou : neyyi) est un beurre clarifié, originaire du sous-continent indien, que l'on retrouve également dans les cuisines levantine et égyptienne.
Préparation
Le ghi est préparé en faisant mijoter dans une casserole à fond épais du beurre non salé que l'on aura préalablement fait fondre à feu doux. Après quelques minutes d'ébullition lente, les substances grasses solides se séparent du gras liquide sous forme d'une mousse jaunâtre accompagnée de particules blanchâtres composées de caséine, de petit lait et d'impuretés du beurre qu'il faut ôter peu à peu au moyen d'une petite passoire ou d'une simple cuillère. Lorsque toutes ces impuretés ont été enlevées et que l'on a filtré ce qui reste du beurre fondu, on obtient un liquide d'une belle couleur dorée : le ghi. En refroidissant, ce liquide devient semi-solide[1],[2].
À la différence du beurre, le ghi peut être conservé durant de longues périodes sans réfrigération, s'il est stocké dans un conteneur étanche. Sa texture, sa couleur et son goût dépendent de la provenance du lait et de la durée de l'ébullition. En Inde, le ghi est généralement obtenu à partir du lait de vache mais peut également provenir du lait de chèvre ou de bufflonne d'eau.
Utilisation dans le domaine religieux
Le ghi joue un rôle sacré dans les libations et les onctions offertes aux divinités de l'hindouisme au cours desquelles des hymnes lui sont même dédiés[3] et où il est brulé dans le cadre de rituels tels que l'Âratî.
Il est également utilisé dans les mariages, les inhumations et des fêtes religieuses, telles que Dipavali, au cours de laquelle on le brûle dans de petites lampes décoratives du nom de dipa. Mélangé à quatre autres substances (du sucre, du lait, du yaourt et du miel), il est appelé panchamrita et est également utilisé dans de nombreuses cérémonies, notamment celle de la Maha Shivaratri, la Grande Nuit de Shiva, et certaines yagyas où il est considéré comme de la nourriture pour les deva, les divinités.
Médecine ayurvédique
La médecine ayurvédique attribue de nombreuses propriétés curatives au ghi, tant sur le plan physique que mental. Les principales sont les suivantes :
- Absorption : le ghi est un élément essentiel des formulations ayurvédiques à base de plantes et d'herbes médicinales. Comme le ghi est un beurre, il peut se lier aux nutriments solubles dans les lipides et augmenter de cette manière le potentiel de certaines herbes en transportant leurs composants actifs à l'intérieur des cellules où elles ont le maximum d'effet.
- Digestion : les textes ayurvédiques attestent que le ghi aide à réduire l'excès d'acide gastrique et à rétablir ou à maintenir le mucus de l'estomac.
- Brûlures légères : comme l'aloe, le ghi aide à prévenir les ampoules et les lésions s'il est appliqué rapidement sur la peau. Le ghi stocké longtemps aurait des propriétés médicinales supérieures.
Utilisation dans l'alimentation
Le ghi est très largement utilisé dans la cuisine indienne : dans le sadya (un plat dont les éléments sont présentés sur une feuille de bananier), le parippu (un curry de lentilles), le kadhi (un plat épicé à base de pois chiches)… Dans plusieurs régions de l'Inde, en particulier au Bengale et en Orissa, le riz est toujours servi avec du ghi dans le biryani. De même, au Penjab, les restaurants utilisent de grandes quantités de ghi, notamment dans leur masala. Le naan et le roti en sont recouverts au pinceau durant leur préparation ou lors du service.
Le ghi est enfin utilisé dans les pâtisseries indiennes, notamment dans le mysore pak et différentes variétés de halva et de laddu.
Nutrition et santé
Dans une étude menée sur des rongeurs[4], il a été démontré que le ghi réduit la production de cholestérol alors que comme tous les beurres clarifiés, il est en grande partie composé d'acides gras saturés. Aux États-Unis, la valeur nutritionnelle mentionnée sur les bouteilles de ghi fabriqué à partir de lait de vache indique une concentration de 8 mg de cholestérol pour une cuillère à café, alors que le beurre en contient 30.
Ces éléments sont néanmoins à considérer avec prudence : le ghi, bien que contenant moins de cholestérol et de graisses saturées que le beurre, reste néanmoins un aliment essentiellement composé de matières grasses dont la consommation est connue pour augmenter le risque de maladie coronarienne car il est très riche en cholestérol oxydé[5] : 259 μg/g, ou 12.3 % du cholestérol total[6].
Faux ghi à base d'huile végétale
Des restaurants indiens et de nombreux ménages utilisent pour des raisons économiques de l'huile végétale hydrogénée (également connue sous les noms de vanaspati, dalda ou « beurre clarifié végétal ») en lieu et place de beurre clarifié. Ce « ghi végétal », qui a la même apparence que le vrai ghi, est en réalité une graisse saturée partiellement hydrogénée, un acide gras trans nuisible pour la santé. Source de radicaux libres, il n'est pas recommandé de le chauffer à haute température, au contraire du vrai ghi qui a un point de fumée beaucoup plus élevé et permet donc les cuissons intenses.
En Inde, l'appellation shuddh ghee (« beurre clarifié pur ») n'étant pas officiellement reconnue dans de nombreuses régions, des huiles partiellement hydrogénées sont cependant commercialisées sous ce nom et les autorités sont amenées à sévir contre la vente de ce faux beurre clarifié[7]. Pour le distinguer du « beurre clarifié végétal », le véritable ghee est parfois appelé desi ghee (« beurre clarifié de pays ») ou asli ghee (« beurre clarifié véritable »).
En dehors de l'Inde
En dehors de l'Inde, plusieurs peuples produisent du beurre clarifié. Les Égyptiens connaissent un produit appelé سمنة بلدي (samna baladi, signifiant littéralement « beurre clarifié du pays », c'est-à-dire le beurre clarifié égyptien), pratiquement identique au ghi en termes de processus de fabrication et de produit final. En Éthiopie, le niter kibbeh (amharique : niṭer ḳibē) est produit et utilisé en grande partie de la même façon que le ghi, mais en ajoutant des épices pendant la fabrication, ce qui lui donne un goût distinctif. En Afrique du Nord, les Berbères poussent la fabrication une étape plus loin, vieillissant le beurre clarifié épicé dans la terre pendant des mois ou même des années, aboutissant à un produit appelé smen. Les Peuls confectionnent le nebam sirme (appelé en Guinée nebam na'i, « huile issue du lait de la vache »), utilisé dans le Sahel sur les plats de riz. Au nord-est du Brésil, on trouve un beurre non réfrigéré très semblable au beurre clarifié, appelé manteiga de garrafa (« beurre de bouteille »), manteiga da terra (« beurre de terre cuite ») ou encore manteiga do gado (« beurre de troupeau »).
Notes et références
- Faire son ghee ou ghî « maison », Cfaitmaison.com.
- Il est ėgalement possible de produire du ghi à partir de crème fraîche, mais la préparation est sensiblement différente.
- (en)Tatyana J. Elizarenkova, Language and Style of the Vedic Rsis, introduction et édition de Wendy Doniger, New York, State University of New York Press, 1995, p. 18.
- (en) Matam Vijaya Kumara, Kari Sambaiaha et Belur R. Lokesh, « Hypocholesterolemic effect of anhydrous milk fat ghee is mediated by increasing the secretion of biliary lipids », The Journal of Nutritional Biochemistry, vol. 11, no 2, , p. 69-75 (DOI 10.1016/S0955-2863(99)00072-8).
- A. Otaegui-Arrazola, M. Menéndez-Carreño, D. Ansorena et I. Astiasarán, « Oxysterols: A world to explore », Food and Chemical Toxicology: An International Journal Published for the British Industrial Biological Research Association, vol. 48, no 12, , p. 3289–3303 (ISSN 1873-6351, PMID 20870006, DOI 10.1016/j.fct.2010.09.023, lire en ligne)
- M. S. Jacobson, « Cholesterol oxides in Indian ghee: possible cause of unexplained high risk of atherosclerosis in Indian immigrant populations », Lancet (London, England), vol. 2, no 8560, , p. 656–658 (ISSN 0140-6736, PMID 2887943, lire en ligne)
- (en) « Sellers of fake ghee booked in Hyderabad », sur hindu.com (consulté le ).