Réalisme poétique
La réalisme poétique est un courant du cinéma français qui s'est développé à la fin des années 1930.
Historique
[modifier | modifier le code]Le courant, influencé par la littérature naturaliste, par les avant-gardes et par le cinéma expressionniste allemand, est illustré notamment par les films de Jean Vigo, René Clair, Jean Renoir, Marcel Carné, Marcel L'Herbier, Marc Allégret, Jacques Becker, Jean Grémillon, Jacques Feyder et Julien Duvivier. Il faut également souligner l'importance de personnalités telles que les scénaristes et dialoguistes Jacques Prévert et Henri Jeanson, l'écrivain et producteur Marcel Pagnol, le scénariste belge Charles Spaak, le directeur artistique Lazare Meerson et le décorateur hongrois Alexandre Trauner.
Les acteurs emblématiques du réalisme poétique sont Michel Simon, Jean Gabin, Arletty et Michèle Morgan.
À son tour, le réalisme poétique aura une influence importante sur le cinéma néoréaliste italien et sur la Nouvelle Vague.
Le réalisme poétique se résume à deux tendances :
- Des personnages et un environnement populaires (ouvriers surtout, mais aussi soldats, prostituées etc.). Le courant accompagne de près le mouvement du Front populaire en France dont il est en quelque sorte la voix. La quasi-totalité des films se situent dans un cadre urbain, concentré sur l'idée même de la ville et des échanges qui y ont lieu. C'est le côté « réaliste ».
- Des personnages maudits, souvent marginaux[1] et parias (le déserteur du Quai des brumes par exemple), représentants d'une classe sociale, mais aussi et surtout marqués par un fatalisme qui leur est propre. Le destin et la fatalité ont d'ailleurs une place prépondérante dans ces films. C'est le côté « poétique ». Le jour se lève ou La Bête humaine sont, par exemple, entièrement construits sur cette idée.
L'importance du dialogue
[modifier | modifier le code]Le réalisme poétique est le premier grand courant cinématographique français du cinéma parlant. Il romance et met en évidence les enjeux dramatiques, sous l'influence de Prévert notamment. Une grande partie des scènes est d'ailleurs tournée pour servir ces dialogues, dans le sens où la parole, l'idée exprimée verbalement, devient le centre d'attention. Un traitement issu à la fois du cinéma expressionniste et du documentaire. Les films expressionnistes des années 1920 représentent souvent la ville comme la personnification du vice, les rues sont déformées, les architectures torturées, suggérant ainsi une certaine déviance des milieux bourgeois. Le réalisme poétique reprend cette idée, mais de façon plus souterraine, principalement pour les scènes de nuit (l'éclairage des rues subit des effets plus discrets, les rues sont brumeuses, ombrées, baignant dans une sorte d'entre-deux). Ce travail subtil sur la lumière est sans doute l'élément visuel le plus caractéristique du réalisme poétique. Les scènes de jour sont quant à elle traitées de manière plus naturaliste, à la manière du documentaire[2]. Les décors sont très travaillés. Les décorateurs recherchent une sublimation du réel plus qu'un réalisme. Ils créent aussi des structures qui permettent des jeux de lumière et de caméra, notamment des plans inclinés pour des perspectives forcées[3] et ils juxtaposent décors en studios et décors naturels[4].
Films emblématiques
[modifier | modifier le code]- Sous les toits de Paris, de René Clair (1930)
- À nous la liberté, de René Clair (1931)
- Cœur de lilas, d'Anatole Litvak (1932)
- 14 juillet, de René Clair (1933)
- Liliom, de Fritz Lang (1934)
- La Rue sans nom, de Pierre Chenal (1934)
- L'Atalante, de Jean Vigo (1934)
- La Kermesse héroïque, de Jacques Feyder (1935)
- La Belle Équipe, de Julien Duvivier (1936)
- Pépé le Moko, de Julien Duvivier (1937)
- La Grande Illusion, de Jean Renoir (1937)
- Entrée des artistes, de Marc Allégret (1938)
- Le Quai des brumes, de Marcel Carné (1938)
- Hôtel du Nord, de Marcel Carné (1938)
- La Bête humaine, de Jean Renoir (1938)
- Le jour se lève, de Marcel Carné (1939)
- Remorques, de Jean Grémillon (1941)
- Les Enfants du paradis, de Marcel Carné (1945)
Notes et références
[modifier | modifier le code]- André Gagnon et Nicky Ackland-Snow, 3 minutes pour comprendre 50 grands courants et acteurs de l'histoire du cinéma, c 2019 (ISBN 978-2-7029-1517-2 et 2-7029-1517-5, OCLC 1127536495, lire en ligne)
- Vincent Pinel, Ecoles, genres et mouvements au cinéma, Paris, Larousse, , p. 184-185.
- Jean-Pierre Berthome, Le décor au cinéma, Paris, 2003.
- Léon Barsacq, Le décor de film, Paris, 1970.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean-Louis Comolli, « Réalisme poétique, cinéma français », dans Encyclopædia Universalis , consulté le . URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/realisme-poetique-cinema-francais/
- Vincent Pinel, « Réalisme poétique », dans Écoles, genres et mouvements au cinéma, Larousse, Comprendre et reconnaître, Paris, 2000. p. 184-185
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :