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Étudiées dans la communauté lesbienne de Buffalo, ces identités répondent au besoin d'affirmer la spécificité de la communauté des lesbiennes ; elles fixent alors les comportements. Elles se sont étendues durant les années 1950 et ont structuré la sous-culture des bars lesbiens aux États-Unis et au Canada, reprises sous ce nom au Québec. À cette époque, une butch était censée former un couple avec une fem[1]. En revendiquant visiblement des comportements alors exclusivement masculins, dans le même environnement, les « butches » rendaient visible la communauté lesbienne, mais souffraient davantage des violences et des discriminations. De leur côté, les « fems » pouvaient soutenir les « butches » tout en profitant de l'indifférence qu'elles suscitaient (voir placard), étant moins visibles.
Dans les années 1950, le couple butch-fem est tellement central à l'identité lesbienne que ce sont celles qui n'y rentrent pas, telles qu'Audre Lorde, qui sont marginalisées ; ces pratiques hors butch-fem sont appelées « kikisme »[2].
Dans les années 1970, certaines féministes radicales discréditent les identités masculines pour leur culture machiste, contestent donc l'imitation des hommes et critiquent le couple « butch-fem » comme caricature du couple hétérosexuel (le film Sex Revelations donne à voir une représentation de cette défaveur, dans sa partie centrale). Ces attaques ont mené à l'homogénéisation de l'apparence des lesbiennes, à la mode des lesbiennes androgynes, puis à celle des lesbiennes dites « lipstick » (rouge à lèvres), très féminines, qui s'est diffusée par le biais de la publicité.
C'est dans les années 1980 et 1990 que s'élève la défense et la réhabilitation de ces identités des années 1950, ainsi que de leurs codes d'identification, sous l'impulsion de Joan Nestle puis des théoriciens queer. En France, ces mots parviennent dans les années 1990 et 2000, où existaient déjà des vocables pour désigner les lesbiennes masculines tels que « camionneuse », ou « jules »/« nana » pour désigner un couple.
Dans les années 1990, avec Trouble dans le genre, Judith Butler analyse la dichotomie « butch-fem » d'un point de vue féministe. Elle soutient que le fait que des populations autres qu'hétérosexuelles puisse parodier des comportements hétéronormés montre que cette dualité des comportements n'est pas naturelle mais intégrée[réf. nécessaire] via un système de normes culturelles acquises.
Les identités « butch-fem » peuvent s'étendre à la sexualité pour déterminer des pratiques sexuelles et distribuer les rôles dans le couple. L'association de ces appellations suggère en effet une complémentarité des rôles. Elle procède d'un préjugé qui veut que les homosexuelles soient des femmes masculines cherchant à séduire des hétérosexuelles féminines. Dans d'autres sociétés, les couples de femmes se formaient suivant une exigence de complémentarité, généralement sous la forme d'un critère d'âge, par exemple chez les Nuer du Soudan ou chez les Yoruba.
L'apparente fixité des identités est contrebalancée par l'expression des goûts et des différences individuelles, offrant la possibilité de moduler les identités. Sans contrainte, les personnes homosexuelles peuvent adopter ou rejeter l'une ou l'autre de ces identités, ou les deux. Elles ont représenté alternativement des identités à défendre et à préserver, ou à critiquer et dépasser. Au fil de leur développement historique, récent, elles ont participé à la construction sociale des identités de genre et à la liberté de choix des éléments de différences.