Une semaine après le cyclone tropical Chido 

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Une semaine après le cyclone tropical Chido 

Ce 14 décembre, le cyclone tropical « Chido » frappait Mayotte lors de son passage dans le canal du Mozambique.

Si pour le moment il est toujours difficile d’évaluer le bilan humain de cette catastrophe inédite, des milliers de victimes semblent être à prévoir. Cette difficulté manifeste de l’Etat à évaluer le nombre de décès révèle une population mahoraise largement délaissée par les institutions. 

Une catastrophe à tous les niveaux 

Les bidonvilles mahorais peuplés par des populations souvent sans-papiers et venant des îles alentours ont ainsi été durement touchés par Chido : avec ses 20 000 habitants, Kaweni, plus grand bidonville de l’île, a été rayé de la carte alors que seul 5000 de ses habitants ont pu trouver refuge dans des abris identifiés par la préfecture.

Sur le plan des infrastructures, Mayotte est également particulièrement touchée, et cela alors que l’île est déjà caractérisée par des sous-investissements chroniques. L’unique centre hospitalier de l’île et la plupart de ses centres de santé se trouvent ainsi dans une situation critique avec plusieurs services inopérants. De même, l’aéroport de Mayotte-Dzaoudzi, lien central de l’île avec la Métropole et la Réunion, est fortement impacté, complexifiant ainsi l’envoi d’avions cargos. Ces destructions couplées à une précarité déjà présente avant la catastrophes viennent accentuer la crise : les pénuries alimentaires, d’eau potable ou encore d’électricité impactent déjà les 320 000 mahorais, tandis que les autorités sanitaires craignent le retour d’une épidémie de choléra.

Face à cette catastrophe la gestion de l’urgence commence à peine à se mettre en place : tandis que les forces progressistes réunionnaises ont initié de grandes actions de solidarité et des couloirs aériens en soutien aux mahorais, plusieurs organisations humanitaires commencent à se déployer sur l’île. Le Secours Populaire a ainsi lancé sa propre campagne de dons « Urgence Mayotte » et déploie actuellement sur l’île des bénévoles formés.

Le gouvernement pas à la hauteur 

Si les organisations humanitaires commencent donc à se mobiliser, le gouvernement semble ne pas saisir la gravité de la situation : l’absence du Premier ministre, les propos du ministre de l’Intérieur concernant l’immigration, ou encore les polémiques liées à la récente venue du président de la République sont autant de signaux inquiétants. De même, les 655 000 euros débloqués par l’Etat en aide d’urgence sont une première étape largement insuffisante au vue de la destruction de l’île et de la précarité que connaissait déjà un territoire avec plus de 75% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté.

Si le passage de Chido était inévitable, Mayotte paie des années de délaissement par l’Etat percevant d’abord l’île comme un avant-poste stratégique en plein « Indopacifique ». Il faut dire que pour la bourgeoisie française – et ce depuis le référendum sur l’indépendance de 1974 – Mayotte représente d’abord une véritable base en plein canal du Mozambique, espace stratégique emprunté par 5000 navires par ans et où transite 30% du commerce mondial de pétrole.

La catastrophe humanitaire qui se profile à Mayotte démontre ainsi une gestion française largement héritée de la colonisation et marquée par des sous-investissements chroniques concernant le bien-être de la population. Le passage de Chido montre également le besoin d’institutions solides et d’infrastructures mieux préparées à des catastrophes climatiques amenées à être de plus en plus violentes et régulières. Si pour Mayotte le temps présent est urgent, il y a également un véritable combat pour permettre au peuple mahorais un avenir viable au-delà des intérêts stratégiques de la bourgeoisie française. 


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