Le rideau tombe à l’Opéra de Paris 

publié le dans
Le rideau tombe à l’Opéra de Paris 

Bastion onirique de la culture et de  l’art, l’Opéra de Paris est en grève. Entre revendications des danseurs sur leurs conditions de travail et dénonciations d’un sous-effectif chronique, cette mobilisation met en lumière les tensions profondes qui traversent cette prestigieuse institution, et plus globalement l’austérité qui n’épargne aucun milieu de la culture en France.

Un cri pour la reconnaissance

À l’Opéra de Paris, danseurs, techniciens et administratifs multiplient les mouvements de grève pour dénoncer une dégradation de leurs conditions de travail. À l’initiative des danseurs du ballet, une première mobilisation s’est organisée début décembre visant à rouvrir les dialogues sur la revalorisation des salaires ainsi que de la reconnaissance du temps de préparation artistique non rémunéré. Ces heures de maquillage, d’échauffement et de coiffure, étant indispensables à la réussite d’un spectacle.

Parallèlement, un autre front s’est ouvert depuis le 19 décembre, qui dénonce un sous-effectif structurel. En dix ans, le plafond d’emploi imposé par le Parlement est passé de 1 600 à 1484 postes, tout en sachant que l’Opéra n’emploie que 1459 salariés laissant plusieurs services en état “dépuisement total”, et ne respectant pas le plafond imposé. Burn-out, accidents, et surcharge de travail rythment désormais le quotidien des employés de l’Opéra​​. Ces luttes soulèvent une question essentielle : à quoi sert la beauté si elle se fait au détriment de ceux qui la rendent possible ?

Ces actions ont conduit à l’annulation de plusieurs représentations : quatre du ballet Paquita et la représentation de Play du chorégraphe Alexander Ekman.

Une lutte contre l’austérité culturelle  

La crise qui secoue l’Opéra de Paris reflète les tensions systémiques auxquelles sont confrontées les institutions culturelles. D’un côté, ces lieux sont censés incarner l’excellence artistique et offrir au public des spectacles de renommée internationale. De l’autre, ils doivent composer avec des contraintes budgétaires croissantes, dictées par l’État ou les gestionnaires.

La marchandisation de la culture et les impératifs de rationalisation économique créent un environnement où les travailleurs de l’ombre – qu’ils soient danseurs, techniciens ou administratifs – peinent à obtenir la reconnaissance qu’ils méritent. À l’Opéra, cette dualité est d’autant plus flagrante que la beauté des représentations masque souvent les luttes sociales en coulisses.

L’Opéra de Paris n’est par ailleurs pas le seul en grève, un préavis national a été déposé par la CGT du 19 au 21 décembre, sur les revendications du refinancement de la Culture et de l’Audiovisuel public, l’instauration de la Culture comme compétence obligatoire des collectivités territoriales, d’une revalorisation de la dotation générale de fonctionnement des collectivités territoriales de la politique culturelle conduite ainsi que de l’assurance par les pouvoirs publics et parlementaires d’une politique en faveur de la Culture et de la garantie de la liberté de Création, de produire et de diffuser des œuvres au public sur tous les territoires.

Dans ces lieux comme l’Opéra de Paris où le rideau symbolise la grandeur artistique, sa chute temporaire résonne comme un rappel : sans les travailleurs, même les temples de la culture restent plongés dans l’obscurité. 


Édition hebdomadaire

Mêmes rubriques