En mécanique quantique, la représentation de Heisenberg est une des trois formulations et modes de traitement des problèmes dépendant du temps dans le cadre de la mécanique quantique classique. Dans cette représentation, les opérateurs du système évoluent avec le temps alors que le vecteur d'état quantique ne dépend pas du temps.
Remarque : La représentation de Heisenberg ne doit pas être confondue avec la « mécanique des matrices », quelquefois appelée « mécanique quantique de Heisenberg ».
Donnons nous un espace de Hilbert , un état quantique normé , une observable quantique ainsi qu'un opérateur hamiltonien .
À l'opérateur correspond une base de vecteurs propres orthonormés de valeurs propres :
Dans cette base, le vecteur d'état quantique et l'opérateur quantique se décomposent comme :
où .
La probabilité qu'un état propre soit le résultat de la mesure par d'un état quantique est .
Supposons maintenant que le système évolue dans le temps.
Plus précisément, supposons que les évoluent dans le temps.
L'équation indique qu'il y a deux manières équivalentes de décrire l'évolution temporelle du système quantique.
Soit on fait évoluer soit on fait évoluer .
C'est-à-dire, soit on fait évoluer l'observable (et donc sa base de vecteurs propres) soit on fait évoluer le vecteur d'état .
Ces deux manières équivalentes de décrire l'évolution temporelle sont respectivement la représentation de Heisenberg et la représentation de Schrödinger.
Dans la représentation de Heisenberg :
- L'état est constant dans le temps
- L'observable évolue dans le temps selon l'équation de Heisenberg :
Dans la représentation de Schrödinger :
- L'état évolue dans le temps selon l'équation de Schrödinger :
- L'observable peut dépendre explicitement du temps (e.g. un champ magnétique externe dépendant du temps) mais une telle éventuelle dépendance au temps n'a rien à voir avec l'évolution temporelle dictée par l'hamiltonien.
Dénotons respectivement par et les représentations de Heisenberg et de Schrödinger.
L'évolution temporelle du vecteur d'état quantique
dans la représentation de Schrödinger est décrite par l'équation de Schrödinger :
Ici, dénote l'opérateur hamiltonien possiblement non-autonome (i.e. admettant une possible dépendance explicite en temps) dans la représentation de Schrödinger.
De manière équivalente, cette évolution temporelle peut s'écrire comme :
où est l'opérateur d'évolution temporelle unitaire correspondant à l'hamiltonien .
C'est-à-dire :
Supposons qu'au temps le vecteur d'état des deux représentations concorde :
L'espérance quantique au temps d'une observable quantique ne dépend pas de la représentation mathématique choisie.
Ce faisant :
-
On en déduit que la relation entre l'observable et l'observable est :
Ensuite, un calcul direct montre que :
Démonstration
Par simplicité, écrivons , , , , .
Alors :
Remarque :
Une autre manière équivalente utile d'écrire l'équation de Heisenberg est :
Cette égalité découle du fait que , i.e. les relations de commutations sont les mêmes dans la représentation de Heisenberg et celle de Schrödinger.
Cas particulier :
Lorsque est indépendant du temps, on peut écrire plus simplement .
Dans ce cas, l'opérateur d'évolution unitaire temporel est simplement :
Dans ce cas, commute avec et donc .
On écrit alors plus simplement .
Ce faisant :
Ainsi, on écrit plus simplement l'équation de Heisenberg comme :
L'équation d'Heisenberg décrivant l'évolution temporelle d'une observable quantique est :
L'équation d'Hamilton décrivant l'évolution temporelle d'une observable classique en mécanique classique est donné, dans la convention de signe du crochet de Poisson de Landau et Lifschitz [1], par :
En comparant ces deux équations, on obtient une correspondance entre le commutateur quantique d'observables quantiques et le crochet de Poisson d'observables classiques :
Cette relation, due à Dirac en 1925[2], joue un rôle primordial dans les méthodes de quantifications, par exemple en quantification géométrique initié par Jean-Marie Souriau ou encore en quantification par déformation de Maxime Kontsevitch[3]. Remarquons au passage que dans le papier original de Dirac en 1925 il utilisait une convention de signe opposée à celle de Landau et Lifschitz pour le crochet de Poisson de sorte qu'il avait plutôt ceci:
Exemple 1 : (mécanique newtonnienne)
Dans la représentation de Schrödinger, considérons l'opérateur impulsion et l'opérateur position .
Ces deux opérateurs ne dépendent pas explicitement du temps, i.e. et .
En se donnant un opérateur hamiltonien , on obtient un opérateur d'évolution temporelle .
Les opérateurs impulsion et position sont donnés au temps dans la représentation d'Heisenberg comme :
L'évolution temporelle de et de est donc décrite par l'équation de Heisenberg :
Ces deux équations sont l'analogue quantique des équations d'Hamilton en mécanique classique :
On peut pousser l'analogie encore plus loin avec la mécanique classique en définissant respectivement un opérateur de force ainsi qu'un opérateur de vitesse :
Considérons et et l'opérateur hamiltonien usuel suivant :
Les relations de commutations sont :
on obtient l'analogue quantique de la mécanique newtonnienne classique :
Démonstration
En effet :
et :
Exemple 2 : (oscillateur harmonique)
Considérons l'hamiltonien décrivant un oscillateur harmonique quantique dans la représentation de Schrödinger :
Ici, il est question d'un cas particulier de l'exemple 1 où .
Il suit que :
Pour alléger la notation, écrivons plus simplement et de sorte qu'on se retrouve avec un oscillateur harmonique classique :
La solution de cette équation différentielle ordinaire est donnée par :
C'est ainsi que les opérateurs et tournent de manière déterministe sous l'influence de en l'espace des endomorphismes .
Si le système quantique est dans un état donné, alors les espérances quantiques et tournent aussi dans le temps :
Exemple 3 : (zitterbewegung)
En considérant l'opérateur hamiltonien de l'équation de Dirac :
on trouve le fameux zitterbewegung découvert par Schrödinger en 1930.
Les relations de commutations sont :
En utilisant l'équation de Heisenberg, les opérateurs impulsion , position et l'hamiltonien dans la représentation de Heisenberg évoluent comme :
où :
La dérivée temporelle de est donnée par l'équation de Heisenberg :
Puisque et sont constants, on a :
En intégrant on trouve :
où .
L'opérateur vitesse devient donc :
En intégrant on trouve :
Pour un hamiltonien qui ne dépend pas explicitement du temps, on a :
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Représentation :
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Heisenberg
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Interaction
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Schrödinger
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Ket
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constant
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Observable
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constant
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Opérateur d'évolution
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- ↑ (1969) Mechanics (Landau AND Lifshitz), p.95
- ↑ P.A.M. Dirac, 1925, The fundamental equations of quantum mechanics. Proc. Roy. Soc. London ser. A, 109, 642-653
- ↑ M. Kontsevich (2003), Deformation Quantization of Poisson Manifolds, Letters of Mathematical Physics 66, p.157–216