Appel à communications

PENSER L’EMANCIPATION

Colloque international et interdisciplinaire, Troisième édition, 28-30 janvier 2016

Université Libre de Bruxelles

« Quelle convergence des luttes face à l’approfondissement de la crise ? »

Ce colloque international, qui aura lieu des 28 au 30 janvier 2016 à l’université libre de Bruxelles, est organisé par le réseau “Penser l’émancipation”. Il fait suite aux éditions de Lausanne en octobre 2012 (http://wp.unil.ch/ple/ ) et Paris (http://www.penserlemancipation.net/site.html?page=accueil) en février 2014 et s’inscrit dans une série d’initiatives visant à développer, dans le monde francophone, un espace de réflexion et de discussion autour des élaborations théoriques et des pratiques sociales qui mettent en jeu l’émancipation humaine.

Les propositions de communication (environ 2000 signes) sont à envoyer à l’adresse électronique suivante, le dimanche 17 mai 2015 au plus tard. : [email protected]

PRESENTATION

La « crise financière » qui a éclaté en 2008 est loin d’être surmontée. La généralisation actuelle des politiques d’austérité, l’exploitation accrue du travail qui s’accompagne d’une mise en concurrence incessante des travailleurs, les remises en cause de l’État social, le recours à une appropriation militaire et néocoloniale des richesses naturelles aux dépens de la survie des populations ont pour corollaire une dégradation du niveau de vie d’un nombre croissant d’individus, qui s’accompagne bien souvent de restrictions de leurs droits sociaux et syndicaux, voire de leurs libertés politiques. Partout, les appareils répressifs (policiers, législatifs et judiciaires) tendent à se renforcer. On assiste également à un retour offensif de courants jouant sur la différenciation nationaliste, religieuse, ethnique, voire ouvertement raciste, et/ou sexiste comme prétendue solution à la crise capitaliste. Ces idées réactionnaires déteignent sur la grande majorité des partis défenseurs de l’ordre économique capitaliste, même ceux qui se réclament de la gauche.

Le capitalisme, qui étend sa domination à l’ensemble des temporalités et des espaces de la vie sur terre pour satisfaire à des exigences de rentabilité toujours accrues, démultiplie, dans ce mouvement même, les champs de sa « crise » – dont le concept et la réalité doivent aujourd’hui plus que jamais faire l’objet d’analyses et de débats.

À l’autre pôle, la recrudescence depuis 2008 des mobilisations et manifestations de masse mais aussi le retour et le renouvellement de pratiques de résistance plus diffuses sont également les témoins de l’approfondissement de la crise en cours. Dans le monde du travail, on assiste à une déstabilisation des cadres traditionnels de l’action collective en lien avec la fragilisation de la condition salariale, qui ne se traduit pas par une éradication de la conflictualité au travail, mais bien par un redéploiement sous contrainte des pratiques conflictuelles. La transformation des modes de la conflictualité sociale se décline en boycotts, grèves perlées, grèves du zèle, sabotages, etc., et se traduit par une progression des conflits courts (grèves de moins de deux jours et débrayages), des conflits sans arrêt de travail et des conflits individuels. De manière plus globale, les révolutions dans le monde arabe, les mouvements sociaux dans le sud de l’Europe (Grèce, Portugal, Espagne,..), les grèves massives dans l’industrie asiatique, les actions collectives contre les privatisations des ressources et de l’accès à la terre en Amérique centrale et du Sud, l’impact du mouvement « Occupy » aux États-Unis, la mise en place d’« alternatives » au diktat des marchés (cantines populaires, potagers collectifs, habitats communautaires, « donneries », « repairs café », etc.) comme le développement de mouvements d’opposition spécifiques (luttes contre les expulsions de sans-papiers, constitution de comités de chômeurs, de comités de quartiers contre les expropriations de logements ou encore de « Zone à Défendre », telle que la « ZAD » opposée au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes en France) expriment également tous, explicitement ou implicitement, avec des contenus politiques et des pratiques certes très variés, cette recrudescence des pratiques d’émancipation sociale. Un certain nombre de structures qui voient le jour dans ces mouvements de résistances deviennent en même temps de nouveaux espaces de théorisation critique.

La nécessité de réfléchir sur les dynamiques régressives dominantes autant que sur les pratiques d’émancipation n’a cessé d’être à l’ordre du jour depuis la première édition de la série de colloques « Penser l’émancipation » en 2012 à Lausanne. À l’heure où nous écrivons ces lignes se dessinent dans les dits “pays riches” d’Europe les contours de plans d’austérité drastiques. C’est le cas notamment en Belgique – qui vient de connaître une large mobilisation contre cette politique (120.000 manifestants le 6 novembre 2014) – où doit se tenir la présente édition du colloque en janvier 2016. Les théories de l’émancipation seront-t-elles une fois encore en retard sur la réalité sociale, politique et économique ?

L’édition 2016 du colloque « Penser l’émancipation » propose d’interroger, au travers d’une vingtaine d’ateliers (de trois intervenant-e-s chacun), les articulations, les relations et les convergences des différents champs de résistance face à l’approfondissement de la crise capitaliste.

Afin de donner une certaine cohérence à ces ateliers, ceux-ci seront regroupés dans six grandes sessions structurées comme suit : en amont, une première session introductive rassemblera diverses interventions consacrées à l’analyse des caractéristiques et des manifestions de la « crise » actuelle, dans ses dimensions les plus générales et globales. Suivront ensuite quatre sessions, structurées autour de quatre grands champs de lutte – économique, politique, écologique et culturel – sachant que, dans la réalité, les frontières entre ces « champs » sont évidemment floues et poreuses et qu’il est impossible de les cloisonner strictement comme objet d’étude. La question que nous voudrions voir transversalement posée, dans chaque atelier, est précisément celle des liens entre les luttes particulières et une perspective émancipatrice d’ensemble. Pour l’ensemble de ces sessions, nous souhaiterions des exposés analytiques sur les théories et pratiques spécifiques d’émancipation que ces différents types de luttes suscitent. L’approche interdisciplinaire (sociologie, histoire, économie, anthropologie, géographie,…) sera privilégiée, y compris des retours historiques sur des expériences et pratiques du passé, essentielles pour comprendre et agir sur le présent. Une sixième et dernière session sera consacrée à l’étude de mouvements qui étendent en acte aujourd’hui – mais à une échelle encore locale – les champs de leurs pratiques contestatrices à une multiplicité d’aspects de la vie sociale (production, enseignement, modalités de prise de décision, culture, information, arts, etc.) et qui constituent à nos yeux autant de précieux laboratoires de réflexion sur les questions que pourraient poser un processus d’émancipation sociale d’ensemble. Cette dernière session sera également l’occasion de poser la question de la convergence et de la coordination des luttes au niveau international.

Notre réseau réunit des chercheurs et chercheuses, des éditeurs et éditrices, des acteurs et actrices du mouvement social, qui entendent contribuer à développer dans le monde francophone, un espace de réflexion et de discussion ouvert et respectueux des différences, sans pour autant se départir du débat et de la confrontation. Il s’agit pour nous de permettre aux recherches et élaborations théoriques, comme aux pratiques sociales, de participer à l’émergence d’une politique d’émancipation riche, exigeante, consciente de son histoire, et à même de répondre aux défis du temps présent.

Les propositions de contributions pour ce colloque devront s’inscrire dans l’une des six sessions suivantes (les thèmes suggérés pour chacune des sessions ne sont pas exhaustifs, il s’agit simplement de donner – à travers une série d’exemples – une orientation générale aux sessions) :

1. Les ressorts de la crise globale

– pertinence du concept de « crise » (en usage sans interruption depuis les années 1970) ;

– outils théoriques de compréhension des mécanismes de l’approfondissement de la crise du capitalisme ces dernières années ;

– pays émergents, gouvernements latino-américains post-néolibéraux, nouveaux rapports de force internationaux et évolution de l’impérialisme consécutivement à la crise ;

– précarisation des conditions d’existence des individus, démantèlement des acquis sociaux, remise en question de l’État social, et offensive généralisée contre les organisations du travail/des travailleurs ;

– analogies historiques pertinentes à la crise actuelle en termes d’inspirations pour des pratiques d’émancipation ou crise sans précédent ?

2. Luttes sur le terrain des entreprises et expérimentations/pratiques économiques en résistance

– analyse de luttes sur le terrain économique des entreprises : grèves, occupations d’usines/entreprises, etc. ;

– retours sur des expérimentations économiques alternatives et/ou en résistance : des coopératives à l’économie sociale et solidaire, en passant par les services d’échanges locaux (SEL), l’autogestion, les mouvements pour la décroissance, etc.

3. Luttes dans le champ politique

– analyse des mouvements de résistance contre les politiques étatiques d’austérité actuelle, contre des gouvernements/régimes en place, mais aussi contre les politiques déployées par les institutions internationales (OMC, FMI, BM, Commission européenne, BCE,…) ;

– analyse des continuités et ruptures dans les formes d’organisations (partis, syndicats, collectifs…) ; déploiement de pratiques politiques alternatives (démocratie directe, assemblées populaires, regroupements par affinités, décision par consensus, occupation de places publiques, etc.) ;

4. Luttes dans le champ sociétal, philosophique et culturel

– luttes contre les discriminations sexistes, racistes, ethniques ;

– émancipation et religion (retour du religieux – théologies d’émancipation) ;

– résistances à l’isolement social (à la médiatisation des rapports humains par la marchandise, le travail, etc.) : création de solidarités nouvelles, retour du « collectif », projets de vie alternatifs ;

– luttes et pratiques alternatives contre les modèles de développement et de consommation effrénés (problèmes de “malbouffe”, de santé, d’isolement social des individus..) : culture « underground », mouvement antipub, réinvestissement de l’espace public, questionnement des pratiques d’enseignement, critique des technologies nouvelles, mouvements anti-industriels/anti-productivistes, etc.

5. Luttes écologiques/environnementales

– mouvements anti-industriels/anti-productivistes, etc.

– mouvements anti-nucléaire, luttes contre l’exploitation du gaz de schiste (Québec, Algérie, Pologne,…) ;

– mouvement pour la décroissance, retour « au local » (production et consommation), agroécologie… ;

– luttes contre la privatisation des ressources naturelles, contre « l’accumulation par dépossession » ; luttes pour les « communs ».

6. Luttes convergentes – convergence des luttes

– création de « communes libres », de « centres sociaux », de « zones à défendre » (ZAD), contre l’appropriation capitaliste des espaces de vie ;

– expériences « autogestionnaires » locales : par exemple à partir des mouvements des « usines récupérées » en Argentine mais qui vont déborder le seul cadre de l’entreprise, au cœur du mouvement Barrios en Lucha (Quartiers en lutte) en Espagne, ou encore au cours des occupations dans le quartier athénien d’Exarchia en Grèce, etc. ;

– quelle coordination des luttes au niveau international ? Analyse en terme d’action syndicale, de pratiques de solidarité, refus ou nécessité d’une cohésion internationale ? (retour sur le passé des « Internationales ») ?

 

DEPOT DES PROPOSITIONS :

La date limite pour soumettre une proposition de communication est le dimanche 17 mai 2015 au plus tard.

 

Les propositions, d’environ 2000 signes, sont à envoyer à l’adresse électronique suivante : [email protected]

 

INFOS PRATIQUES :

Les frais de voyage et d’hébergement ne pourront être pris en charge par les organisateurs et organisatrices que de façon exceptionnelle. La priorité sera donc donnée à des participants et participantes ne disposant que de très faibles moyens.

 

Date du colloque : Jeudi 28, vendredi 29, samedi 30 janvier 2016

Lieu : Université Libre de Bruxelles, Campus du Solbosch