Mazan : Un procès historique qui montre le chemin qu’il reste à parcourir 

Publié le 19 décembre 2024

Le procès dit «de Mazan» est un procès historique dont le verdict vient de tomber.
La reconnaissance de la culpabilité des 51 accusés est désormais justement acquise. Pas un seul acquitté alors qu'une trentaine d'avocats de la défense l'avait demandé. En revanche, nous comprenons la colère des associations face aux peines prononcées, inférieures aux réquisitions du parquet. L'accusation avait demandé 652 ans de prison contre les 51 accusés qui ont finalement été condamnés à 428 ans, selon l'AFP. Ce verdict montre l'ampleur du chemin qu'il reste à parcourir face au crime qu'est le viol.

Ce procès, le plus important depuis celui d’Aix en Provence en 1978, a permis d'entendre ce qu'est la culture du viol.
51 accusés ont comparu pour la plupart d'entre eux pour "viols aggravés". Des semaines d'audience pour définir tour à tour les profils de ces violeurs. Peu ont assumé, beaucoup ont continué à marteler qu'ils croyaient au consentement de Gisèle Pelicot en vertu de celui accordé par son ex mari : symbole du patriarcat qui imprime les esprits. Une femme serait la propriété matérielle de son mari dont on peut disposer à sa guise. C'est une négation même de l'humanité des femmes.
​​​​​​Le choix courageux de Gisèle Pélicot de refuser le huis-clos a permis à la société une conscientisation massive de la réalité systémique des violences faites aux femmes, en particulier sexuelles. 51 accusés, 51 hommes avec pour la grande majorité une vie rangée, une famille, un métier. Des hommes du coin.
​​​​​​Sur le banc des accusés aura manqué l'industrie pornographique qui a pourtant été citée à maintes reprises, les hébergeurs des sites internet qui ont accueilli des forums appelant et organisant des viols. Leur responsabilité est immense. Fabien Roussel avait d'ailleurs écrit au gouvernement en avril 2024 la fermeture du site coco.gg.
Le 1er décembre dernier, nous avons reçu Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol lors de notre Assemblée des femmes. Elle a rappelé avec force que le viol n'était pas une erreur de jugement ou d'interprétation, c'est le fruit d'une volonté de dominer. Il ne peut y avoir aucune confusion entre sexualité et violences sexuelles. La stratégie de l'agresseur a été pleinement mise au jour durant ce procès. Comment les accusés qui se sont garés très loin, qui ont réchauffé leurs mains, qui n'ont pas mis de parfum, qui ont répondu à un forum portant le nom "à son insu" ont pu décemment plaidé le consentement de Gisèle Pelicot ? Ces hommes se sont retrouvés face à leur stratégie, à des contradictions qui ne sont habituellement pas interrogées par la société au regard de l'impunité en place.
Ce verdict doit mettre au jour la nécessité d'une véritable révolution pour que toutes les femmes puissent disposer de leur corps librement, protégés de toute forme de domination et de marchandisation. Cette révolution, féministe, demande des moyens humains, matériels, financiers à la hauteur des enjeux. 2,6 milliards d'euros sont nécessaires. Il est urgent d'écouter les associations. Nous soutenons la coalition d'associations et de syndicats appelant à l'adoption d'une loi-cadre contre les violences faites aux femmes.


Seul 1% des plaintes pour viol aboutissent à une condamnation. Cette impunité doit cesser. La République française doit garantir aux victimes de violences sexuelles que leurs plaintes, leur démarche judiciaire soient une quête de justice et non une violence supplémentaire. Nous avons besoin d’un service public de la justice de qualité, à égalité sur l’ensemble du territoire, de former les professionnel·les aux mécanismes des violences sexuelles, de brigades et juridictions spécialisées.
Notre société a besoin d’une réelle mise en œuvre de l’éducation à la sexualité et aux relations affectives, d’un service public de la protection de l’enfance avec les moyens nécessaires, d'une sortie des schémas de l’industrie pornographique et prostitutionnelle dont les jeunes générations sont abreuvées. Ce sont à ces conditions que les femmes et les enfants pourront être protégé·es.

​​​​Madame Pelicot, vous avez souhaité que ce nom que vous portez soit une fierté pour vos enfants et petits-enfants, qu'il ne soit pas associé à votre ex mari mais à votre combat pour la justice. Nous saluons votre courage, votre force, votre dignité, votre justesse.
Nous souhaitons à Gisèle Pélicot, à ses enfants, sa famille, à toutes les familles meurtries, aux co-victimes, de trouver la paix suite à ce verdict et de se reconstruire.

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF,
Shirley Wirden, responsable de la commission « Droits des femmes » au PCF,

Le 19 décembre 2024.