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A table avec Bruno Verjus

Bruno Verjus, un chef atypique et autodidacte.
Bruno Verjus, un chef atypique et autodidacte. © Jean-Gabriel Barthélemy
Par Emmanuel Tresmontant

Sans formation culinaire, cet ancien médecin s’est fait une place parmi les grands chefs avec une première étoile. Il livre les secrets de son agneau de regain aux trois aulx. 

A deux pas du marché d’Aligre (l’un des plus anciens de Paris), le restaurant Table est un lieu unique, un théâtre de la gastronomie où les produits les plus purs et les plus rares sont mis en scène avec raffinement par le maître de céans, Bruno Verjus, qui embrasse ses clients les plus fidèles en les étouffant dans ses bras, comme naguère l’ogre Marc Meneau à Vézelay.

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Ce cuisinier autodidacte, que le guide Michelin a justement récompensé d’une étoile cette année, trouve son inspiration dans la beauté naturelle des produits qu’il va dénicher lui-même aux quatre coins du pays, comme ses fantastiques coquilles Saint-Jacques de Saint-Malo, ramassées à la main, qu’il ouvre devant vous avant de les servir crues avec quelques gouttes d’huile de feuilles de figuier. Prenez l’ail, par exemple. « Il fait peur aux gens, alors que les Chinois l’utilisaient trois mille ans avant Jésus-Christ comme condiment et que les Egyptiens en servaient à manger aux bâtisseurs de pyramides pour leur donner des forces ! Le secret, c’est qu’on ne doit quasiment pas le sentir, il doit se faire oublier. Si on le sent, c’est qu’il a été mal utilisé ! (il faut enlever le germe vert à l’intérieur). Il doit être suave comme une épice. C’est l’énergie de la terre ! »

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Le talent de Bruno Verjus est de mettre une intention dans chacun de ses plats, un imaginaire, et de ne jamais suivre aucune recette préétablie. Ainsi son succulent « agneau de regain aux trois aulx » est-il un poème qu’il a improvisé sous nos yeux, comme un grand acteur : « L’agneau de regain, c’est l’agneau d’automne qui broute des plantes qui poussent à cette époque de l’année dans les pâturages gras des Pyrénées. L’herbe [le regain] possède alors une acidité et une énergie fantastiques. L’idée de ce plat, c’est l’agneau qui descend en ce moment vers l’océan Atlantique dans les embruns, avant de passer l’hiver dans des bergeries. Mes trois aulx, eux, sont les trois saisons : été, automne et hiver. Il y a l’ail sauvage d’été qui embaume les dunes, il est frais et croquant ! Il y a l’ail d’automne, fumé au bord de la cheminée dans la bergerie où reposent les tomes de brebis. Et il y a l’ail noir, mariné trois semaines dans de l’eau de mer, qui offre une texture et un goût un peu sucré de pruneau… C’est un ail fermenté doucement qui, déjà, annonce l’hiver, le moment où la terre se repose et reprend des forces. »

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Table. 3, rue de Prague, Paris XIIe . Tél. : 01 43 43 12 26 De 85 à 125 euros.

La recette

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-Prendre une belle épaule d’agneau désossée et roulée.
-Faire rissoler dans une cocotte en fonte avec du beurre et de grosses gousses d’ail rose de Lautrec.
-Ajouter du thym, du laurier, de la verveine, de la menthe, toutes ces herbes mangées par l’agneau d’automne.
-Couvrir et laisser cuire une heure trente à feu doux.
-Pendant ce temps, préparer une sauce avec la tête d’ail confite au beurre, de l’ail noir et de l’ail fumé, que l’on mixe ensemble avec une huile neutre comme une mayonnaise en ajoutant un jaune d’œuf et de la moutarde.
-En garniture, Bruno Verjus conseille de faire cuire à l’eau des haricots de saison (comme ceux de Paimpol), que l’on fera ensuite revenir dans du beurre avec des coques (qui vont libérer leur eau de mer) et de l’oseille ciselée.
-L’agneau a capté tous les parfums. Les aulx lui apportent du fondant, des notes sucrées et acidulées. On s’en régale avec un beau vin rouge de Provence épicé, comme celui de Dominique Hauvette à Saint-Rémy-de-Provence.

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