Ploum.netle blog de Lionel Dricot2025-02-27T15:28:40.344442Zhttps://ploum.net/Ploumhttps://ploum.netDe la soumission au technofascisme religieuxhttps://ploum.net/2025-02-19-technofascisme-religieux.html2025-02-19T00:00:00Z2025-02-19T00:00:00Z
<h1>De la soumission au technofascisme religieux</h1>
<h2 id="soustitre-1">Les générateurs de code stupide</h2>
<p>Sur Mastodon, David Chisnall fait le point sur une année d’utilisation de GitHub Copilot pour coder. Et le résultat est clair : si, au début, il a l’impression de gagner du temps en devant moins taper sur son ordinateur, ce temps est très largement perdu par les heures voire les jours nécessaires à déboguer des bugs subtils qui ne seraient jamais arrivés s’il avait écrit le code lui-même en premier lieu ou, au pire, qu’il aurait pu détecter beaucoup plus vite.</p>
<ul>
<li><a href="https://mamot.fr/@[email protected]/113690087179982501">Thread Mastodon de David Chisnall</a></li>
</ul>
<p>Il réalise alors que la difficulté et le temps passé sur le code n’est pas d’écrire le code, c’est de savoir quoi et comment l’écrire. S’il faut relire le code généré par l’IA pour le comprendre, c’est plus compliqué pour le programmeur que de tout écrire soi-même.</p>
<p>« Oui, mais pour générer le code pas très intelligent »</p>
<p>Là, je rejoins David à 100% : si votre projet nécessite d’écrire du code bête qui a déjà été écrit mille fois ailleurs, c’est que vous avez un problème. Et le résoudre en le faisant écrire par une IA est à peu près la pire des choses à faire.</p>
<p>Comme je le dis en conférence : ChatGPT apparait utile pour ceux qui ne savent pas taper sur un clavier. Vous voulez être productif ? Apprenez la dactylographie !</p>
<ul>
<li><a href="https://indymotion.fr/w/1FBN53pHuK3QBzFUL4sL6n">Comprendre les bulles (conférence à Rennes Breizhcamp 2024)</a></li>
</ul>
<p>Là où ChatGPT est très fort, par contre, c’est de faire semblant d’écrire du code. En proposant des tableaux d’avancement de son travail, en prétendant que tout est bientôt prêt et sera sur WeTransfer. C’est évidemment bidon : ChatGPT a appris à arnaquer !</p>
<ul>
<li><a href="https://xcancel.com/JulienPasteur1/status/1891896422397563217?mx=2">Julien Paster raconte sur X comment son kiné s’est fait arnaqué par ChatGPT (xcancel.com)</a></li>
</ul>
<p>Bref, ChatGPT est devenu le parfait Julius.</p>
<ul>
<li><a href="/2024-12-23-julius-fr.html">Mon collègue Julius (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Ed Zitron enfonce encore plus le clou à ce sujet : les ChatGPTs et consorts sont des « succès » parce que toute la presse ne fait qu’en parler en termes élogieux, que ce soit par bêtise ou par corruption. Mais, en réalité, le nombre d’utilisateurs payants est incroyablement faible et, comme Trump, Sam Altman s’adresse à nous en considérant que nous sommes des débiles qui avalons les plus gros mensonges sans broncher. Et les médias et les CEOs applaudissent…</p>
<ul>
<li><a href="https://www.wheresyoured.at/longcon/">The Generative AI Con (www.wheresyoured.at)</a></li>
</ul>
<p>Débiles, nous le sommes peut-être complètement. Plusieurs dizaines d’articles scientifiques mentionnent désormais la « miscroscopie électronique végétative ». Ce terme ne veut rien dire. Quelle est son origine ?</p>
<p>Il vient tout simplement d’un article de 1959 publié sur deux colonnes, mais qui est entré dans le corpus comme une seule colonne !</p>
<ul>
<li><a href="https://retractionwatch.com/2025/02/10/vegetative-electron-microscopy-fingerprint-paper-mill/">As a nonsense phrase of shady provenance makes the rounds, Elsevier defends its use (retractionwatch.com)</a></li>
</ul>
<p>Ce que cette anecdote nous apprend c’est que, premièrement, les générateurs de conneries sont encore plus mauvais qu’on ne l’imagine, mais, surtout, que notre monde est déjà rempli de cette merde ! Les LLMs ne font qu’appliquer au contenu en ligne ce que l’industrie a fait pour le reste : les outils, les vêtements, la bouffe. Produire le plus possible en baissant la qualité autant que possible. Puis en l’abaissant encore plus.</p>
<ul>
<li><a href="/condorcet-les-reseaux-sociaux-et-les-producteurs-de-merde/index.html">Condorcet, les réseaux sociaux et les producteurs de merde (ploum.net)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-2">La suppression des filtres</h2>
<p>L’imprimerie fait passer la communication de "One to one" à "One to many", ce qui rend obsolète l’Église catholique, l’outil utilisé en occident pour que les puissants imposent leur discours à la population. La première conséquence de l’imprimerie sera d’ailleurs le protestantisme qui revendique explicitement la capacité pour chacun d’interpréter la parole de Dieu et donc de créer son propre discours à diffuser, le "One to many". </p>
<p>Comme le souligne Victor Hugo dans Notre-Dame de Paris, « la presse tuera l’église ».</p>
<ul>
<li><a href="/lectures-4-un-tournant-civilisationnel/index.html">Lectures 4 : un tournant civilisationnel (voir la section "L’imprimerie")</a></li>
</ul>
<p>Conséquences directes de l’imprimerie : la Renaissance puis les Lumières. Toute personne qui réfléchit peut diffuser ses idées et s’inspirer de celles qui sont diffusées. Chaque humain ne doit plus réinventer la roue, il peut se baser sur l’existant. L’éducation prend le pas sur l’obéissance.</p>
<p>Après quelques siècles de « One to many » apparait l’étape suivante : Internet. Du « One to many » on passe au « Many to many ». Il n’y a plus aucune limite pour diffuser ses idées : tout le monde peut le faire envers tout le monde.</p>
<ul>
<li><a href="/il-faudra-la-construire-sans-eux/index.html">Il faudra la construire sans eux… (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Une conséquence logique qui m’avait échappé à l’époque du billet précédent, c’est que si tout le monde veut parler, plus personne n’écoute. Comme beaucoup, j’ai cru que le « many to many » serait incroyablement positif. La triste réalité est que l’immense majorité d’entre nous n’avons pas grand-chose à dire, mais que nous voulons quand même nous faire entendre. Alors nous crions. Nous générons du bruit. Nous étouffons ce qui est malgré tout intéressant. </p>
<p>L’investissement nécessaire pour imprimer un livre ainsi que le faible retour direct constitue un filtre. Ne vont publier un livre que ceux qui veulent vraiment le faire.</p>
<p>La pérennité de l’objet livre et la relative lenteur de sa transmission implique également un second filtre : les livres les moins intéressants seront vite oubliés. C’est d’ailleurs pourquoi nous idéalisons parfois le passé, tant en termes de littérature que de cinématographie ou de musique : parce que ne nous sont parvenus que les meilleurs, parce que nous avons oublié les sombres merdes qui firent un flop ou eurent un succès éphémère.</p>
<p>Bien que très imparfait et filtrant probablement de très bonnes choses que nous avons malheureusement perdues, la barrière à l’entrée et la dilution temporelle nous permettaient de ne pas sombrer dans la cacophonie.</p>
<h2 id="soustitre-3">L’échec de la démocratisation de la parole</h2>
<p>Internet, en permettant le « many to many » sans aucune limite a rendu ces deux filtres inopérants. Tout le monde peut poster pour un coût nul. Pire : les mécanismes d’addiction des plateformes ont rendu plus facile de poster que de ne pas poster. Le support numérique rend également floue la frontière temporelle : un contenu est soit parfaitement conservé, soit disparait totalement. Cela entraine que de vieux contenus réapparaissent comme s’ils étaient neufs et personne ne s’en rend compte. Le filtre temporel a totalement disparu.</p>
<p>De possible, le « many to many » s’est transformé en obligation. Pour exister, nous devons être vus, entendus. Nous devons avoir une audience. Prendre des selfies et les partager. Recevoir des likes qui nous sont vendus bien cher.</p>
<p>Le « many to many » s’est donc révélé une catastrophe, peut-être pas dans son principe, mais dans sa mise en œuvre. Au lieu d’une seconde renaissance, nous entrons en décadence, dans un second moyen-âge. La frustration de pouvoir s’exprimer, mais de ne pas être entendu est grande.</p>
<p>Olivier Ertzscheid va même plus loin : pour lui, ChatGPT permet justement d’avoir l’impression d’être écouté alors que personne ne nous écoute plus. Du « many to many », nous sommes passés au « many to nobody ».</p>
<ul>
<li><a href="https://affordance.framasoft.org/2025/02/google-wikipedia-et-chatgpt-les-trois-cavaliers-de-lapocalypse-qui-ne-vient-pas/">Google, Wikipédia et ChatGPT. Les trois cavaliers de l’apocalypse (qui ne vient pas). (affordance.framasoft.org)</a></li>
</ul>
<p>Utiliser ChatGPT pour obtenir des infos se transforme en utiliser ChatGPT pour obtenir confirmation à ses propres croyances, comme le relève le journaliste politique Nils Wilcke.</p>
<ul>
<li><a href="https://mamot.fr/@[email protected]/114013674404801094">Pouet de Nils Wilcke sur Mastodon</a></li>
</ul>
<p>J’en ai marre de le répéter, mais ChatGPT et consorts sont des générateurs de conneries explicitement conçus pour vous dire ce que vous avez envie d’entendre. Que « ChatGPT a dit que » puisse être un argument politique sur un plateau télévisé sans que personne ne bronche est l’illustration d’un crétinisme total généralisé.</p>
<h2 id="soustitre-4">Le Techno-Fascisme religieux</h2>
<p>La « Many to nobody » est en soi un retour à l’ordre ancien. Plus personne n’écoute la populace. Seuls les grands seigneurs disposent de l’outil pour imposer leur vue. L’Église catholique a été remplacée par la presse et les médias, eux-mêmes remplacés par les réseaux sociaux et ChatGPT. ChatGPT qui n’est finalement qu’une instance automatisée d’un prêtre qui vous écoute en confession avant de vous dire ce qui est bien et ce qui est mal, basé sur les ordres qu’il reçoit d’en haut.</p>
<p>Dans un très bon billet sur le réseau Gemini, small patata réalise que l’incohérence du fascisme n’est pas un bug, c’est son mode de fonctionnement, son essence. Une incohérence aléatoire et permanente qui permet aux esprits faibles de voir ce qu’ils ont envie de voir par paréidolie et qui brise les esprits les plus forts. En brisant toute logique et cohérence, le fascisme permet aux abrutis de s’affranchir de l’intelligence et de prendre le contrôle sur les esprits rationnels. Le légendaire pigeon qui chie sur l’échiquier et renverse les pièces avant de déclarer victoire.</p>
<ul>
<li><a href="gemini://gemini.patatas.ca/posts/poison-as-praxis.gmi">Poison as Praxis (gemini.patatas.ca)</a></li>
</ul>
<p>L’incohérence de ChatGPT n’est pas un bug qui sera résolu ! C’est au contraire ce qui lui permet d’avoir du succès avec les esprits faibles qui, en suivant des formations de « prompt engineering », ont l’impression de reprendre un peu de contrôle sur leur vie et d’acquérir un peu de pouvoir sur la réalité. C’est l’essence de toutes les arnaques : prétendre aux personnes en situation de faiblesse intellectuelle qu’ils vont miraculeusement retrouver du pouvoir.</p>
<p>Small patata fait le lien avec les surréalistes qui tentèrent de lutter artistiquement contre le fascisme et voit dans le surréalisme une manière beaucoup plus efficace de lutter contre les générateurs de conneries. </p>
<p>Il faut dire que face à un générateur mondial de conneries, fasciste, centralisé, ultra capitaliste et bénéficiant d’une adulation religieuse, je ne vois pas d’autre échappatoire que le surréalisme.</p>
<p>Brandissons ce qui nous reste d’humanité ! Aux âmes citoyens !</p>
<blockquote> Image reprise du gemlog de small patatas: Le triomphe du surréalisme, Max Ernst (1937)<br></blockquote>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
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Ploumhttps://ploum.netLe succès existe-t-il ?https://ploum.net/2025-02-18-le-succes.html2025-02-18T00:00:00Z2025-02-18T00:00:00Z
<h1>Le succès existe-t-il ?</h1>
<h2 id="soustitre-1">La notion de succès d’un blog</h2>
<p>Un blogueur que j’aime beaucoup, Gee, revient sur ses 10 ans de blogging. Cela me fascine de voir l’envers du décor des autres créateurs. Gee pense avoir fait l’erreur de ne pas profiter de la vague d’enthousiasme qu’à connu son Geektionnerd et de ne pas en avoir profité pour faire plus de promo.</p>
<ul>
<li><a href="https://grisebouille.net/gb10ans-0-auteur-en-burnout/">[GB10ans] 0. Auteur en burnout (grisebouille.net)</a></li>
</ul>
<p>Je ne suis pas d’accord avec Gee : il a très bien fait de continuer sa vie sans se préoccuper du succès. Les vagues d’enthousiasme vont et viennent, elles sont très brèves. Le public passe très vite à autre chose. Partir en quête du buzz permanent est la recette absolue pour se perdre. C’est un métier à part entière : le marketing. Trop d’artistes et de créateurs se sont détournés vers le marketing, espérant obtenir une fraction du succès obtenu par des gens sans talents autre que le marketing.</p>
<p>Mais vous oubliez que la perception du succès elle-même fait partie du plan marketing. Vous pensez qu’un tel a du succès ? Vous n’en savez rien. Vous ne savez même pas définir « succès ». C’est une intuition confuse. Faire croire qu’on a du succès fait partie du mensonge !</p>
<p>Pour beaucoup de gens de mon entourage éloigné, je suis soudainement devenu un écrivain à succès parce que… je suis passé à la télé à une heure de grande écoute. Pour ces gens-là qui me connaissent, je suis passé de « type qui écrit de vagues livres dont personne n’a entendu parler » à « véritable écrivain connu qui passe à la télé ». Pour ceux, et ils sont nombreux, qui ont délégué à la télévision le pouvoir d’ordonner les individus au rang de « célébrité », j’ai du succès. Pour eux, je ne peux rien rêver de plus si ce n’est, peut-être, passer régulièrement à la télé et devenir une « vedette ». </p>
<p>Dans ma vie quotidienne et aux yeux de toutes les (trop rares) personnes qui n’idolâtre pas inconsciemment la télévision, ces passages à la télé n’ont strictement rien changé. J’ai certainement vendu quelques centaines de livres en plus. Mais ai-je du « succès » pour autant ?</p>
<p>Il y a quelques mois, j’étais invité comme expert pour le tournage d’une émission télé sur l’importance de protéger ses données personnelles en ligne. Lors d’une pause, j’ai demandé au présentateur ce qu’il faisait d’autre dans la vie. Il m’a regardé, étonné, et m’a répondu : « Je présente le JT ». Ça ne devait plus lui arriver très souvent de ne pas être reconnu. La moitié de la Belgique doit savoir qui il est. Nous avons rigolé et j’ai expliqué que je n’avais pas la télévision.</p>
<p>Question : cette personne a-t-elle du « succès » ?</p>
<h2 id="soustitre-2">Le succès est éphémère</h2>
<p>À 12 ans, en vacances avec mes parents, je trouve un livre abandonné sur une table de la réception de l’hôtel. « Tantzor » de Paul-Loup Sulitzer. Je le dévore et je ne suis visiblement pas le seul. Paul-Loup Sulitzer est l’écrivain à la mode du moment. Selon Wikipédia, il a vendu près de 40 millions de livres dans 40 langues, dont son roman le plus connu : « Money ». Il vit alors une vie de milliardaire flamboyant.</p>
<p>Trente ans plus tard, ruiné, il publie la suite de Money: « Money 2 ». Il s’en écoulera moins de 1.300 exemplaires. Adoré, adulé, moqué, parodié des centaines de fois, Sulitzer est tout simplement tombé dans l’oubli le plus total.</p>
<p>Si le « succès » reste une notion floue et abstraite, une chose est certaine : il doit s’entretenir en permanence. Il n’est jamais véritablement acquis. Si on peut encore comprendre la notion de « faire fortune » comme « avoir plus d’argent que l’on ne peut en dépenser » (et donc ne plus avoir besoin d’en gagner), le succès lui ne se mesure pas. Il ne se gère pas de manière rationnelle. </p>
<h2 id="soustitre-3">Quels indicateurs ?</h2>
<p>Dans son billet, Gee s’étonne également d’avoir reçu beaucoup moins de propositions pour le concours des 5 ans du blog que pour celui du premier anniversaire. Malgré une audience supposée supérieure.</p>
<p>De nouveau, le succès est une affaire de perception. Quel succès voulons-nous ? Des interactions intéressantes ? Des interactions nombreuses (ce qui est contradictoire avec la précédente) ? Des ventes ? Du chiffre d’affaires ? Des chiffres sur un compteur de visite comme les sites web du siècle précédent ?</p>
<p>Il n’y a pas une définition de succès. En fait, je ne connais personne, moi le premier, qui soit satisfait de son succès. Nous sommes, par essence humaine, éternellement insatisfaits. Nous sommes jaloux de ce que nous croyons voir chez d’autres (« Il passe à la télé ! ») et déçus de nos propres réussites (« Je suis passé à la télé, mais en fait, ça n’a rien changé à ma vie »). </p>
<h2 id="soustitre-4">Écrire dans le vide</h2>
<p>C’est peut-être pour cela que j’aime tant le réseau Gemini. C’est le réseau anti-succès par essence. En publiant sur Gemini, on a réellement l’impression que personne ne va nous lire, ce qui est donne une réelle liberté. </p>
<ul>
<li><a href="/gemini-le-protocole-du-slow-web/index.html">Ma découverte du protocole Gemini</a></li>
</ul>
<p>Certains de mes posts de blog font le buzz sur le web. Je n’ai pas de statistiques, mais je vois qu’ils tournent sur Mastodon, qu’ils font la première page sur Hacker News. Mais si je n’allais pas sur Hacker News ni sur Mastodon, je ne le saurais pas. J’aurais tout autant l’impression d’ếcrire dans le vide que sur Gemini.</p>
<p>À l’opposé, certains de mes billets ne semblent pas attirer les "likes", "partages", "votes" et autres "commentaires". Pourtant, je reçois de nombreux emails à leur sujet. De gens qui veulent creuser le sujet, réfléchir avec moi. Ou me remercier pour cette réflexion. C’est particulièrement le cas avec le réseau Gemini qui semble attirer des personnes qui sont dans l’échange direct. Moi-même il m’arrive souvent de dégainer mon client mail pour répondre spontanément à un billet personnel lu sur Gemini. La réaction la plus fréquente à ces messages est : « Wow, je ne pensais pas que quelqu’un me lisait ! ».</p>
<p>Je vous pose la question : quel type de billet a, selon vous, le plus de « succès » ?</p>
<p>Est-ce que la notion de succès a réellement un sens ? Peut-on avoir assez de succès ?</p>
<ul>
<li><a href="https://ptilouk.net/#soutien">Pour donner un peu de succès financier à Gee</a></li>
<li><a href="https://pvh-editions.com/product/sortileges-and-syndicats-une-fantastique-lutte-des-classes-papier">Sortilèges & Sindycats, le roman de Gee qui mériterait plus de succès !</a></li>
</ul>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
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</div>
Ploumhttps://ploum.netÀ la recherche de la déconnexion parfaitehttps://ploum.net/2025-02-11-deconnexion_parfaite.html2025-02-11T00:00:00Z2025-02-11T00:00:00Z
<h1>À la recherche de la déconnexion parfaite</h1>
<h2 id="soustitre-1">Une rétrospective de ma quête de concentration</h2>
<h2 id="soustitre-2">Une première déconnexion</h2>
<p>À la fin de l’année 2018, épuisé par la promotion de la compagne Ulule de mon livre « Les aventures d’Aristide, le lapin cosmonaute » et prenant conscience de mon addiction aux réseaux sociaux, je décide de me « déconnecter ».</p>
<p>Un bien grand mot pour m’interdire pendant 3 mois l’utilisation des réseaux sociaux et des sites d’actualité.</p>
<ul>
<li><a href="/en-partance-pour-ma-deconnexion/index.html">En partance pour ma déconnexion… (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/je-suis-deconnecte/index.html">Je suis déconnecté ! (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Le premier effet va se faire sentir très vite avec la désinstallation de l’app que j’utilise le plus à l’époque : Pocket.</p>
<ul>
<li><a href="/le-jour-ou-jai-desinstalle-mon-app-preferee/index.html">Le jour où j’ai désinstallé mon app préférée ! (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>L’expérience est avant tout une prise de conscience. Je découvre que, dès que je m’ennuie, j’ouvre machinalement un navigateur web sans même y réfléchir. C’est littéralement un réflexe.</p>
<ul>
<li><a href="/1-mois-de-deconnexion-premier-bilan/index.html">1 mois de déconnexion, premier bilan (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Je commence à percevoir la différence entre l’information et le « bruit ». L’hyperconnexion est, comme le tabac, une assuétude et une pollution. Une notion qui deviendra essentielle dans ma réflexion.</p>
<ul>
<li><a href="/le-silence-au-milieu-du-bruit/index.html">Le silence au milieu du bruit (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/lhumeur-dun-deconnecte/index.html">L’humeur d’un déconnecté (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Si je tente de subir moins de bruit, mon épouse me fait remarquer que je tente toujours d’en générer en postant sur des réseaux que je ne lis plus. Je suis incohérent.</p>
<ul>
<li><a href="/de-la-pollution-mentale-et-de-la-quete-dego/index.html">De la pollution mentale et de la quête d’égo (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Comme souvent dans ce genre d’expérience, on en sort sans aucune envie de se « reconnecter ». Mais je vais, bien entendu, très vite reprendre mes anciennes habitudes.</p>
<ul>
<li><a href="/3-mois-de-deconnexion-bilan-final/index.html">3 mois de déconnexion : bilan final (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Le problème de l’hyperconnexion est désormais clair dans ma tête. Je suis addict et cette addiction m’est néfaste à tous les points de vue. </p>
<ul>
<li><a href="/sous-les-reseaux-sociaux-un-monde-post-deconnexion/index.html">Sous les réseaux sociaux, un monde post-déconnexion (ploum.net)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-3">La période technosolutionniste</h2>
<p>Face à la réalisation de l’ampleur du problème, mon premier réflexe est de trouver une solution technique, technologique. Beaucoup de personnes sont dans le même cas et, si cette étape est loin de suffire, elle est indispensable : faire du tri dans les outils numériques que nous utilisons. Je me rends compte que l’univers Apple, que je fréquente à l’époque, ayant reçu un MacBook de mon employeur, est à la fois contraire à mes valeurs et complètement incompatible avec une forme de sobriété numérique, car poussant à la consommation. Cette dichotomie entre ma philosophie et mon vécu entraine une tension que je tente d’évacuer par la surconnexion. Il est temps pour moi de revenir entièrement sous Linux.</p>
<ul>
<li><a href="/a-la-poursuite-du-minimalisme-numerique/index.html">À la poursuite du minimalisme numérique (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/linux-et-minimalisme-numerique/index.html">Linux et minimalisme numérique (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>J’achète également un téléphone qui est tellement merdique et bugué que je n’ai jamais envie de l’utiliser (non, ne l’achetez pas).</p>
<ul>
<li><a href="/se-passer-decran-avec-un-telephone-e-ink/index.html">Se passer d’écran avec un téléphone e-ink (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Concrètement, cette première déconnexion a également été l’opportunité de terminer mon feuilleton « Printeurs » ainsi que d’écrire quelques nouvelles. Celui-ci intéresse un éditeur et je publie mon premier roman en 2020.</p>
<ul>
<li><a href="/printeurs-le-premier-roman-imprime-en-3d/index.html">Printeurs, le premier roman imprimé en 3D (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Une autre action concrète que j’entreprends est de supprimer au maximum de comptes en ligne. Je ne le sais pas encore, mais je vais en découvrir et en supprimer près de 500 et cela va me prendre près de trois ans. Pour la plupart, j’ai oublié qu’ils existent, mais pour certains, l’étape est significative.</p>
<ul>
<li><a href="/je-ne-suis-plus-a-vendre-sur-linkedin/index.html">Je ne suis plus à vendre sur Linkedin (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>En parallèle, je découvre le protocole minimaliste Gemini. Suite à l’utilisation de ce protocole, une idée commence à me trotter dans la tête : travailler complètement déconnecté. J’ai en effet découvert que bloquer certains sites n’est pas suffisant : je trouve automatiquement des alternatives sur lesquelles procrastiner, alternatives qui sont même parfois moins intéressantes. J’ai donc envie d’explorer une déconnexion totale. Je commence à rédiger mon journal personnel à la machine à écrire.</p>
<ul>
<li><a href="/gemini-le-protocole-du-slow-web/index.html">Gemini, le protocole du slow web (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/2021-01-10.html">The Offline-First Quest (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/2021-01-12.html">Offline-First, Typewriters, Emails and Gemini (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/2021-09-24.html">Looking for offline-first tools (ploum.net)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-4">Seconde déconnexion : une tentative d’année déconnectée</h2>
<p>Le 1er janvier 2022, trois ans après la fin de ma première déconnexion, je me lance dans une tentative d’année complètement déconnectée. L’idée est de n’utiliser mon ordinateur que déconnecté dans mon bureau, de le synchroniser une fois par jour. Le tout est rendu possible par un logiciel que j’ai développé dans les derniers mois de 2021 : Offpunk.</p>
<ul>
<li><a href="https://offpunk.net">Offpunk, an offline-first browser</a></li>
</ul>
<p>Évidemment, la connexion est nécessaire pour certaines actions que je me propose de chronométrer et d’enregistrer. J’écris, en direct, le compte-rendu de cette déconnexion et, contre toute attente, ces écrits semblent passionner les lecteurs.</p>
<ul>
<li><a href="/1er-janvier-2022-quelques-minutes-apres-minuit/index.html">1er janvier 2022, quelques minutes après minuit (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/3-janvier-2022-quest-ce-quune-deconnexion/index.html">3 janvier 2022, qu’est-ce qu’une déconnexion ? (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-3-le-manque/index.html">Chapitre 3 : Le manque (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-4-les-messageries-instantanees/index.html">Chapitre 4 : les messageries instantanées (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-5-le-plaisir-coupable-de-lexploration/index.html">Chapitre 5 : le plaisir coupable de l’exploration (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-6-la-machine-a-cliquer-se-rebelle-contre-le-superorganisme/index.html">Chapitre 6 : la machine à cliquer se rebelle contre le superorganisme (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-7-lhysterie-mediatique/index.html">Chapitre 7 : l’hystérie médiatique (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-8-lartiste-deconnecte/index.html">Chapitre 8 : l’artiste déconnecté (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Mieux préparée et beaucoup plus ambitieuse (trop ?), cette déconnexion est finalement un échec après moins de 6 mois.</p>
<ul>
<li><a href="/chapitre-9-lechec/index.html">Chapitre 9 : l’échec (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>La leçon est dure : il n’est quasiment pas possible de se déconnecter de manière structurelle dans la société actuelle. Nous sommes tout le temps sollicités pour accomplir des actions en ligne, actions qui nécessitent du temps, mais pas toujours de la concentration. Tout est désormais optimisé pour que nous soyons en ligne.</p>
<p>Ma déconnexion est un échec. Le livre de cette déconnexion est inachevé. Un autre manuscrit sur lequel je travaille durant cette déconnexion est dans un état inutilisable. Cependant, j’ai profité de ce temps pour écrire quelques nouvelles et finaliser mon recueil « Stagiaire au spatioport Omega 3000 et autres joyeusetés que nous réserve le futur ».</p>
<ul>
<li><a href="/et-autres-joyeusetes-que-nous-reserve-le-futur/index.html">…et autres joyeusetés que nous réserve le futur (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Conséquence directe de cette déconnexion, mon compte Whatsapp disparait. Mon compte Twitter suit bientôt également.</p>
<ul>
<li><a href="/le-suicide-de-mon-compte-whatsapp/index.html">Le suicide de mon compte WhatsApp (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/chapitre-10-la-suppression-des-comptes-en-ligne/index.html">Chapitre 10 : la suppression des comptes en ligne (ploum.net)</a></li>
<li><a href="/2023-10-29-le-droit-de-supprimer-twitter.html">Pourquoi j’ai supprimé mon compte Twitter (et pourquoi vous pouvez probablement en faire autant sans hésiter) (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>J’ai également pris conscience que mon blog Wordpress n’est plus du tout en phase avec ma philosophie. En parallèle de mon travail sur Offpunk, je réécris complètement mon blog pour en faire un outil « offline ».</p>
<ul>
<li><a href="/2022-12-04-fin-du-blog-et-derniere-version.html">La fin d’un blog et la dernière version de ploum.net (ploum.net)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-5">Le second retour à la normalité</h2>
<p>Début 2023, je m’isole pour commencer l’écriture de Bikepunk qui paraitra en 2024. J’alterne entre les périodes de déconnexion totale et des périodes d’hyperconnexion.</p>
<ul>
<li><a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk, les chroniques du flash</a></li>
</ul>
<p>Le seul réseau social où j’ai gardé un compte, Mastodon, commence à attirer l’attention. J’y suis très présent et, philosophiquement, je ne peux que soutenir et encourager toutes les personnes cherchant à quitter X et Meta. Je retombe dans l’hyperconnexion. Une hyperconnexion éthique, mais une hyperconnexion tout de même.</p>
<p>Pendant deux ans, j’utilise l’extension Firefox LeechBlock qui permet de n’autoriser qu’un temps limité par jour sur certains sites web. Cela fonctionne pas trop mal pendant un temps jusqu’au moment où j’acquiers le réflexe de désactiver le plugin sans même y penser.</p>
<p>Comme tous les trois ans, il est temps pour moi de lancer un nouveau cycle et de m’interroger sur mes usages. </p>
<p>Un de mes apprentissages principaux est que toute modification de mon comportement mental doit s’accompagner chez moi par une modification physique. Mon esprit suit les réflexes de mon corps. Je tape encore parfois machinalement dans la barre d’adresse Firefox les premières lettres de sites procrastinatoires sur lesquels je n’ai plus été depuis dix ans !</p>
<p>Le second apprentissage est que la radicalité implique une rechute plus forte. La connexion est nécessaire tous les jours, de manière imprévisible. Je ne souhaite pas m’isoler, mais concevoir une manière de fonctionner durable. Créer de nouveaux réflexes.</p>
<h2 id="soustitre-6">Une troisième déconnexion</h2>
<p>Pour ma « déconnexion 2025 », j’ai donc pris une grande décision : j’ai acheté un fauteuil pour remplacer ma chaise de bureau. Pendant toutes mes études et mes premières années professionnelles, je n’avais que des chaises de récupération. Au printemps 2008, disposant d’un salaire stable et d’un appartement, j’achète une chaise de bureau neuve : le premier prix de chez Ikea. Cette chaise, rafistolée avec des coussins défoncés dont mes beaux-parents ne voulaient plus, était encore celle que j’utilisais jusqu’il y a quelques jours. Ce nouveau fauteuil est donc un très grand changement pour moi.</p>
<p>Et je me suis promis de ne l’utiliser qu’en étant déconnecté.</p>
<p>Pour ce faire, je désactive le wifi dans le Bios de mon ordinateur. J’ai également organisé un « bureau debout » dans un coin de la pièce, bureau debout où arrive un câble RJ-45. Si je veux me connecter, je dois donc physiquement me lever et brancher un câble. Tout ce que je dois faire en ligne s’effectue désormais en étant debout. Lorsque je suis assis (ou vautré, pour être plus exact), je suis déconnecté.</p>
<p>J’ai également pris d’autres petites mesures. En premier lieu, mes todos ne sont plus stockés sur mon ordinateur, mais sur des fiches sur un tableau de liège. Un comble pour qui se rappelle que j’ai passé plusieurs années à développer le logiciel « Getting Things GNOME ».</p>
<p>Je revois aussi la gestion de mon email. J’adore recevoir des emails et de mes lecteurs et j’ai beaucoup de mal à ne pas y répondre. Puis à répondre à la réponse de ma réponse. Avec le succès de Bikepunk, mon courrier s’est étoffé et je me retrouve parfois à la fin de la journée en réalisant que j’ai… « répondu à mes emails ». Des discussions certes enrichissantes, mais chronophages. Dans bien des cas, je répète dans plusieurs mails ce qui pourrait être un billet de blog. Considérez que j’ai lu votre mail, mais que ma réponse alimentera mes prochains billets de blogs. Certains billets futurs traiteront de thèmes que je n’aborde pas d’habitude, mais pour lesquels je reçois énormément de questions.</p>
<p>Sur Mastodon, que je ne consulte plus que debout, j’ai pris la décision de mettre tous les comptes que je suis dans une liste, liste que j’ai configurée pour qu’elle ne s’affiche pas dans ma timeline. Quand je consulte Mastodon, je ne vois donc que mes posts à moi et je dois accomplir une action en plus si je veux voir ce qui se dit (ce que je ne fais plus tous les jours). Comme avant, les notifications sont régulièrement « vidées ». </p>
<p>Si vous voulez suivre ce blog, privilégiez le flux RSS ou bien mes deux newsletters:</p>
<ul>
<li><a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">Newsletter avec mes billets francophones</a></li>
<li><a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">Newsletter avec mes billets en anglais</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-7">À la recherche de l’ennui. </h2>
<p>Déconnexion est un bien grand mot pour simplement dire que je ne serai plus connecté 100% du temps. Mais telle est l’époque où nous vivons. Cal Newport parle de l’incroyable productivité de l’écrivain Brandon Sanderson qui a créé une entreprise de 70 personnes uniquement dédiée à une seule activité : le laisser écrire le plus possible !</p>
<ul>
<li><a href="https://calnewport.com/let-brandon-cook/">Let Brandon Cook (calnewport.com)</a></li>
</ul>
<p>Si l’exemple est extrême, Cal s’étonne de ce qu’on ne voit pas plus de structures qui cherchent à favoriser la concentration et la créativité. Dans un âge où l’hyperdistraction permanente est la norme, il est nécessaire de se battre et de développer les outils pour se concentrer. Et s’ennuyer. Surtout s’ennuyer. Car pour réfléchir et créer, l’ennui est primordial. </p>
<p>D’ailleurs, si je ne m’étais pas ennuyé, je n’aurais jamais écrit ce billet ! Nous dresserons le bilan dans 3 ans pour ma quatrième déconnexion…</p>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
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</div>
Ploumhttps://ploum.netDe la décadence technologique et des luddites technophileshttps://ploum.net/2025-02-06-decadence-technologique.html2025-02-06T00:00:00Z2025-02-06T00:00:00Z
<h1>De la décadence technologique et des luddites technophiles</h1>
<h2 id="soustitre-1">La valeur de texte brut</h2>
<p>Thierry s’essaie à publier son blog sur le réseau Gemini, mais a du mal avec le format minimaliste. Qui est justement pour moi la meilleure partie du protocole Gemini.</p>
<ul>
<li><a href="https://tcrouzet.com/2025/01/29/low-tech/">La low-tech peut-elle coexister avec la high-tech ? (tcrouzet.com)</a></li>
</ul>
<p>Le format Gemini impose, comme dans un livre, du texte pur. Il est possible d’ajouter un titre, des sous-titres, des liens, des citations, mais avec une particularité importante : cela doit concerner toute la ligne, pas une simple partie de texte. Les liens doivent donc être sur leur propre ligne plutôt que de se perdre et foisonner dans le texte. Comme ils interrompent la lecture entre deux paragraphes, ils doivent être explicités et justifiés plutôt que d’être cachés au petit bonheur du clic.</p>
<p>Il est également impossible de mettre de l’italique ou du gras dans son texte. Ce qui est une excellente chose. Comme le rappelle Neal Stephenson dans son « In the beginning was the command line », les mélanges gras/italiques aléatoires n’ont rien à faire dans un texte. Prenez un livre et tentez de trouver du texte en gras dans le corps du texte. Il n’y en a pas et pour une bonne raison : cela ne veut rien dire, cela perturbe la lecture. Mais lorsque Microsoft Word est apparu, il a rendu plus facile de mettre en gras que de faire des titres corrects. Tout comme le clavier azerty a soudainement fait croire qu’il ne fallait pas mettre d’accent sur les majuscules, l’outil technologique a appauvri notre rapport au texte. </p>
<p>Car le besoin d’attirer l’attention au milieu d’un texte est un aveu d’insécurité de l’auteur. Le texte doit exister par lui-même. C’est au lecteur de choisir ce qu’il veut mettre en avant en surlignant, pas à l’auteur. Orner un texte d’artifices inutiles pour tenter de combler les vides porte un nom : la décadence.</p>
<p>Le gras, le word art, le Comic San MS, les powerpoints envoyés par mail, tous sont des textes décadents qui tentent de camoufler la vacuité ou l’inanité du contenu.</p>
<h2 id="soustitre-2">La décadence inexorable de la tech</h2>
<p>Le texte n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.</p>
<p>Thierry se pose également beaucoup de questions sur les notions low-tech et high-tech, notamment dans le médical. Mais le terme « low-tech » est selon moi trompeur. Je suis un luddite technophile. Contrairement à ce que la légende prétend, les luddites n’étaient pas du tout opposés à la technologie. Ils étaient opposés à la propriété technologique par la classe bourgeoise, ce qui transformait les artisans spécialisés en interchangeables esclaves des machines. Les luddites n’ont pas tenté de détruire des métiers à tisser technologiques, mais des machines que leurs patrons utilisaient pour les exploiter.</p>
<ul>
<li><a href="/2024-08-26-luddites-technophiles.html">Le retour de la vengeance des luddites technophiles (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>De la même manière, je ne suis pas opposé aux réseaux sociaux centralisés ni aux chatbots parce que c’est « high tech », mais parce que ce sont des technologies qui sont activement utilisées pour nous appauvrir, tant intellectuellement que financièrement. C’est même leur seul objectif avoué. </p>
<p>Que l’IA soit utilisée pour détecter plus précocement des cancers, je trouve l’idée formidable. Mais je sais également qu’elle est impossible dans le contexte actuel. Pas d’un point de vue technique. Mais parce que, bien utilisée, elle coûtera plus cher que pas d’IA du tout. En effet, l’IA peut aider en détectant des cancers que le médecin a ratés. Il faut donc un double diagnostic, tant du médecin que de l’IA et se poser des questions lorsque les deux sont en désaccord. Il faut payer le coût de l’IA en plus du surplus du travail du médecin, car il devra faire plus d’heures vu qu’il devra revoir les diagnostics « divergents » pour trouver son erreur ou celle de l’IA. L’IA est un outil qui peut être utile si on accepte qu’il coûte beaucoup plus cher.</p>
<p>Ça, c’est la théorie.</p>
<p>En pratique, une telle technologie est vendue sous prétexte de « faire des économies ». Elle va forcément induire un relâchement attentionnel des médecins et, pour justifier les coûts, une diminution du temps consacré à chaque diagnostic humain. Perdant de l’expérience et de l’habitude, le diagnostic des médecins va devenir de moins en moins sûr et, par effet ricochet, les nouveaux médecins vont être de moins en moins bien formés. Les cancers indétectés par l’IA ne le seront plus par les humains. L’IA étant entrainée sur les diagnostics réalisés par des humains, elle va également devenir de moins en moins compétente et s’autovalider. Au final, nul besoin d’être grand clerc pour voir que si la technologie est intéressante, son utilisation dans notre contexte socio-économique ne peut que se révéler catastrophique et n’est intéressante que pour les vendeurs d’IA.</p>
<h2 id="soustitre-3">Le mensonge high tech</h2>
<p>Les partisans du « low tech » ont l’intuition que la « high tech » cherche à les exploiter. Ils ont raison sur le fond, pas sur la cause. Ce n’est pas la technologie le nœud du problème, mais sa décadence.</p>
<p>La course à la technologie est une bulle bâtie sur un mensonge. L’idée n’est pas de construire quelque chose de durable, mais de faire croire qu’on va le construire pour attirer des investisseurs. Les entreprises du NASDAQ sont devenues une énorme pyramide de Ponzi. Elles tentent de se soutenir l’une l’autre à coup de millions, mais perdent toutes énormément d’argent, ce qu’elles arrivent à cacher grâce au cours de la bourse.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.wheresyoured.at/godot-isnt-making-it/">Godot Isn't Making it (www.wheresyoured.at)</a></li>
</ul>
<p>D’ailleurs, des recherches sérieuses confirment mon intuition : au plus on comprend ce qu’il y a derrière « l’intelligence artificielle », au moins on en veut. L’IA est littéralement un piège à ignorants. Et les producteurs l’ont très bien compris : ils ne veulent pas que l’on comprenne ce qu’ils font.</p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/knowing-less-about-ai-makes-people-more-open-to-having-it-in-their-lives-new-research-247372">Knowing less about AI makes people more open to having it in their lives - new research (theconversation.com)</a></li>
</ul>
<p>Ed Zitron continue sur sa lancée avec l’inattendue arrivée de DeepSeek, le ChatGPT chinois qui est simplement 30 fois moins cher. À la question « Pourquoi OpenAI et les autres n’ont pas réussi à faire moins cher », il propose la réponse rétrospectivement évidente : « Parce que ces entreprises n’avaient aucun intérêt à faire moins cher. Au plus elles perdent de l’argent, au plus elles justifient que ce qu’elles font est cher, au plus elles attirent les investisseurs et effraient de potentiels compétiteurs ». En bref : parce qu’elles sont complètement décadentes !</p>
<ul>
<li><a href="https://www.wheresyoured.at/deep-impact/">Deep Impact (www.wheresyoured.at)</a></li>
</ul>
<p>Cory Doctorow parle souvent de merdification, je propose plutôt de parler de « décadence technologique ». Nous produisons la technologie la plus chère, la plus complexe et la moins écologique possible par simple réflexe. Comme pour les orgies romaines, la complexité et le coût ne sont plus des obstacles, mais les objectifs premiers que nous cherchons à atteindre.</p>
<p>Ceci explique aussi pourquoi la technologie se retourne complètement contre ses utilisateurs. Dernièrement, une dame d’un certain âge voulait me montrer sur son téléphone un post vu sur son compte Facebook. La moitié de son gigantesque écran de téléphone était littéralement une publicité fixe pour une voiture. Dans la seconde moitié de l’écran, la dame scrollait et alternait entre d’autres pubs pour des voitures et ce qui était probablement du contenu. Son téléphone était doté d’un écran gigantesque, mais seule une fraction de celui-ci était au service de l’utilisateur. Et encore, pas complètement.</p>
<p>La bagnole est en soi le parfait exemple de décadence : d’outil, elle est devenue un symbole qui doit être le plus gros, le plus lourd, le plus voyant possible. Ce qui entraine une complexité infernale tant en termes d’espace public que d’espace privé. Les maisons des dernières décennies sont, pour la plupart, bâties comme des pièces autour d’un garage. Les villes comme des bâtiments autour de nœuds routiers. La voiture est devenue le véritable citoyen des villes, les humains n’en sont que les servants. Le Web suit la même trajectoire avec les robots remplaçant les voitures.</p>
<p>La frénésie envers l’intelligence artificielle est l’archétype de cette décadence. Car si les nouveaux outils ont clairement une utilité et peuvent clairement aider dans certains contextes, nous sommes dans une situation inverse : trouver un problème auquel appliquer l’outil .</p>
<h2 id="soustitre-4">Retour au concept d’utilité</h2>
<p>C’est également la raison pour laquelle Gemini me passionne tellement. C’est l’outil le plus direct pour transmettre le texte de mon cerveau à celui d’un lecteur. En ouvrant la porte au gras, à l’italique puis aux images et au JavaScript, le Web est devenu une jungle décadente. Les auteurs y publient puis, sans se soucier d’être lus, consultent avidement les statistiques de clics et de likes. Le texte est de plus en plus optimisé pour ces statistiques. Avant d’être automatisés par des robots, robots qui pour s’entrainer vont consulter les textes en ligne et générer automatiquement des clics.</p>
<p>La boucle de la décadence technologique est bouclée : les contenus sont lus et générés par les mêmes machines. Les bourgeois capitalistes propriétaires ont réussi à automatiser totalement tant leurs ouvriers (les créateurs de contenus) que leurs clients (ceux qui font du clic).</p>
<p>Je ne veux pas servir les propriétaires de plateforme. Je ne veux pas consommer ce fade et inhumain contenu automatisé. Je tente de comprendre les conséquences de mes usages technologiques pour en tirer le maximum d’utilité avec le moins de conséquences négatives possible.</p>
<p>Face à la décadence technologique, je suis devenu un luddite technophile. </p>
<ul>
<li><a href="https://betterimagesofai.org/images?artist=AnneFehresandLukeConroy&title=HumansDoTheHeavyDataLifting">Photo by Anne Fehres and Luke Conroy & AI4Media CC-BY 4.0</a></li>
</ul>
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Ploumhttps://ploum.netEt si on arrêtait d’être de bons petits consultants obéissants ?https://ploum.net/2025-01-29-bon_consultant.html2025-01-29T00:00:00Z2025-01-29T00:00:00Z
<h1>Et si on arrêtait d’être de bons petits consultants obéissants ?</h1>
<h2 id="soustitre-1">Le cauchemar des examens</h2>
<p>Régulièrement, je me réveille la nuit avec une boule dans le ventre et une bouffée de panique à l’idée que je n’ai pas étudié mon examen à l’université. Cela fait 20 ans que je n’ai plus passé d’examen et pourtant j’en suis encore traumatisé.</p>
<p>Du coup, j’essaye de proposer à mes étudiants un examen le moins stressant possible. Si un étudiant n’est vraiment nulle part, je profite de l’adrénaline inhérente à un examen pour tenter de lui inculquer les concepts. Parfois, je demande à un étudiant d’enseigner la matière à l’autre. J’impose toute de même certaines règles vestimentaires : la cravate est interdite, mais tout le reste est encouragé. J’ai déjà eu des étudiants en peignoir, un étudiant en costume traditionnel de son pays, et toujours insurpassé, une étudiante en costume complet de Minnie (avec les oreilles, le maquillage, les chaussures, la totale !). Cette année j’ai eu droit… à une banane !</p>
<figure>
<a href="/files/banane_exam.jpg"><img alt="Un étudiant passe son examen déguisé en banane." src="/files/banane_exam.jpg" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Un étudiant passe son examen déguisé en banane.</figcaption>
</figure>
<h2 id="soustitre-2">Le monopole de l’East India Company</h2>
<p>J’encourage également les étudiants à venir avec leur propre sujet d’examen.<br>
Un de mes étudiants m’a proposé cet article qui compare Google avec l’East India Company qui, comme tous les empires, a fini par s’écrouler sous son propre poids. J’aime l’analogie et la morale : on ne gagne le pouvoir qu’en se faisant des ennemis. C’est lorsqu’on croit avoir le plus de pouvoirs qu’on a le plus d’ennemis qui n’ont rien à perdre et qui veulent se venger. Trump, Facebook, Google. Ils sont au sommet. Mais chaque jour les rangs des rebelles sont étoffés par ceux qui ont cru que leur allégeance et leur soumission leur offriraient une fraction de pouvoir ou de richesse avant d’être déçus. Car le pouvoir absolu ne se partage pas. Il ne se partage, par définition, jamais.</p>
<ul>
<li><a href="https://substack.com/home/post/p-153427851">Google Is Now the East India Company of the Internet (substack.com)</a></li>
</ul>
<p>Bon, l’article est fort naïf sur certains aspects. Il dit par exemple qu’AT&T n’a pas exploité sa position dominante parce qu’il suivait une certaine éthique. C’est faux. AT&T n’a pas exploité sa position dominante tout simplement parce que l’entreprise était sous la menace d’un procès pour abus de position dominante. La crainte du procès est ce qui a permis le succès d’UNIX (développé par AT&T) et d’Internet. Lorsque IBM a commencé à avoir une position dominante dans le marché informatique naissant, la crainte d’un procès est ce qui a permis la standardisation du PC que l’on connait aujourd’hui et ce qui a permis l’apparition de l’industrie logicielle où s’est engouffrée Microsoft.</p>
<p>Mais je vous ai déjà raconté cette histoire :</p>
<ul>
<li><a href="/lhistoire-du-logiciel-entre-collaboration-et-confiscation-des-libertes/index.html">L’histoire du logiciel : entre collaboration et confiscation des libertés (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Malheureusement, tout change dans les années 1980 avec la présidence de Reagan (le Trump de l’époque). Ses conseillers instaurent l’idée que les monopoles ne sont finalement pas si nocifs, ils sont même plutôt bons pour l’économie (surtout les économies des politiciens qui ont des actions dans ces monopoles). Du coup, on va beaucoup moins les poursuivre, voire les encourager. De là les succès de Microsoft, Google et Facebook qui, malgré les procès, n’ont pas été scindés ni n’ont jamais dû adapter leurs pratiques.</p>
<ul>
<li><a href="/la-terrifiante-hegemonie-des-monopoles/index.html">La terrifiante hégémonie des monopoles (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Si vous lisez ceci, ça vous parait sans doute absurde : comment peut-on justifier que les monopoles ne sont pas nocifs juste pour enrichir les politiciens ? Quelle astuce utiliser ?</p>
<p>Le secret ? Il n’y a pas d’astuce. Pas besoin de se justifier. Il suffit de le faire. Et pour tous les aspects pratiques de n’importe quelle loi, aussi absurde et injuste soit-elle, il suffit de se passer des fonctionnaires scrupuleux et de tout faire faire par des cabinets de consultance. Enfin, surtout un : McKinsey.</p>
<h2 id="soustitre-3">McKinsey et la naïveté de la bonté</h2>
<p>Étudiant, j’ai participé à une soirée d’embauche de McKinsey. Bon, je n’avais pas trop d’espoir, car ils annonçaient ne prendre que celleux avec les meilleurs points (ce dont j’étais loin), mais je me suis dit qu’on ne savait jamais. Je n’avais aucune idée de ce qu’était McKinsey ni de ce qu’ils faisaient, je savais juste que c’était une sorte de Graal vu qu’ils ne prenaient que les meilleurs.</p>
<p>Assis dans un auditoire, j’ai assisté à la présentation de « cas » réels. Une employée de McKinsey, qui a annoncé avoir fait les mêmes études que moi quelques années auparavant (mais avec de bien meilleurs résultats), a présenté son travail. Il s’agissait de réaliser la fusion de deux entités dont les noms avaient été cachés. Sur l’écran s’affichait des colonnes de « ressources » pour chaque entité puis comment la fusion permettait d’économiser les ressources.</p>
<p>J’étais d’abord un peu perdu dans le jargon. J’ai posé quelques questions et finis par comprendre que les « ressources » étaient des employé·e·s. Que ce que je voyais était avant tout un plan de licenciement brutal. J’ai interrompu la présentation pour demander comment étaient pris en compte les aspects éthiques. J’ai eu droit à une réponse standard comme quoi « l’éthique était primordiale chez McKinsey, qu’ils suivaient des règles strictes ». J’ai insisté, j’ai creusé. Parmi la cinquantaine d’étudiants participants, j’étais le seul à prendre la parole, j’étais le seul à m’étonner (j’en ai discuté après avec d’autres, personne ne semblait avoir vu le problème). J’ai demandé à la présentatrice de me donner un exemple d’une des fameuses règles de l’éthique McKinsey. Et j’ai obtenu cette réponse qui est restée gravée dans ma mémoire : « Un consultant McKinsey doit toujours favoriser l’intérêt de son client, quoi qu’il arrive ».</p>
<p>Après la présentation, je suis allé trouver la consultante en question. Autour d’un petit four, j’ai insisté une fois de plus sur l’éthique. Elle m’a ressorti le même blabla. Je lui ai alors dit que je ne parlais pas de ça. Que toutes ses colonnes de chiffres étaient des personnes qui allaient perdre leur emploi, que la fusion allait avoir un impact économique important sur des milliers de familles et que je me demandais comment cet aspect était envisagé.</p>
<p>Elle a ouvert la bouche. Son visage s’est décomposé. Et la brillante ingénieure qui avait réussi les études les plus difficiles avec les meilleurs points m’a répondu :</p>
<p>« Je n’avais jamais pensé à ça… »</p>
<p>Même les personnes soi-disant les plus intelligentes ne pensent pas. Elles obéissent. « Ne recruter que les meilleurs » n’était pas une technique de recrutement, mais bien une manière de créer un élitisme de façade qui empêchait les heureux élus de se poser des questions.</p>
<h2 id="soustitre-4">« Je n’avais jamais pensé à ça… »</h2>
<p>À mon examen, j’ai eu une étudiante particulièrement brillante. Je lui ai dit que, vu sa compréhension hyper fine, j’attendais d’elle qu’elle questionne plus les choses, qu’elle réagisse surtout face à d’autres, moins brillants, mais plus sûrs d’eux. Elle est clairement plus intelligente que moi alors pourquoi n’intervient-elle pas pour me signaler lorsque je suis incohérent ? Le monde a besoin de gens intelligents qui posent des questions. Elle s’est défendue : « Mais on m’a toujours appris à faire le contraire ! ».</p>
<p>Dans un très bon article, Garrison Lovely revient sur la stratégie de McKinsey.</p>
<blockquote> Le fait que les personnes qui avaient participé à une manifestation contre Trump soient ensuite des pièces centrales [en temps que consultants McKinsey] de sa politique de déportation est, en un sens, tout ce qu’il faut savoir.<br></blockquote>
<blockquote> McKinsey exécute, ne fait pas de politique<br></blockquote>
<p>L’auteur interroge sur ce qui aurait empêché McKinsey d’optimiser la fourniture de fils barbelés des camps de concentration. La réponse tombe : "McKinsey a des valeurs". Des valeurs qui sont enseignées et répétées lors des "Values Days". 20 ans après ma propre expérience d’une soirée McKinsey, rien n’a changé.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.thenation.com/article/society/mckinsey-whistleblower-confessions/">Confessions of a McKinsey Whistleblower (www.thenation.com)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-5">La naïveté du bien</h2>
<p>Le problème des gens bons et subtils, c’est qu’ils n’arrivent pas à imaginer que l’arnaque est fondamentalement malhonnête et pas subtile.</p>
<p>Ils cherchent à comprendre, à expliquer, à justifier.</p>
<p>Il n’y a rien à comprendre : le malhonnête cherche son profit de manière directe et non subtile. C’est tellement évident que même les plus subtils laissent passer en se disant que ça cache « autre chose ».</p>
<p>Je vois passer des messages qui disent que Trump ou Musk font des choses illégales. Qu’ils ne respectent pas les règles. </p>
<p>Ben justement. C’est le principe.</p>
<p>Que Trump ne peut décemment pas avoir triché aux élections parce que « quelqu’un » se serait opposé. Quelqu’un ? Mais qui ? Ceux qui obéissent à leurs chefs sans poser de questions parce que c’est leur boulot ? Ceux qui ont peur de perdre leur place et qui préfèrent ménager celui qui a gagné les élections ? Ceux qui, au contraire, se disent qu’ils peuvent faire une bonne affaire en brossant le vainqueur dans le sens du poil ?</p>
<p>Si Trump avait été condamné pour son implication dans l’insurrection du 6 janvier, tout le monde lui serait tombé dessus et se serait disputé sa dépouille. Mais même les juges impliqués savaient qu’il pouvait redevenir président. Qu’il utiliserait son pouvoir pour punir toute personne impliquée dans sa condamnation. Il était moins risqué de soutenir Trump que le contraire. La majorité des gens, même les plus puissants, surtout les plus puissants, sont des moutons terrorisés par le bâton et à l’affut de la moindre petite carotte.</p>
<p>Les seuls qui peuvent s’indigner sont celleux qui ont un sens moral fort, qui n’ont rien à perdre, qui n’ont rien à gagner, qui ont la force et l’énergie de s’indigner, le temps pour le faire et les réseaux pour se faire entendre. J’insiste sur le « et » logique. Il faut que toutes ces conditions soient remplies. Et force est de constater que ça ne fait pas beaucoup de monde.</p>
<p>Surtout quand on réalise que ce « pas beaucoup de monde » est majoritairement peuplé d’idéalistes qui ne veulent pas croire que la personne en face puisse être à ce point dénuée de sens moral et de scrupule. Alors, comme des crétins, ils tentent de se faire entendre… sur X ou sur Facebook, des plateformes qui appartiennent à ceux qu’ils cherchent à combattre.</p>
<p>Celleux qui se plaignent sur ces plateformes ont l’impression d’être actifs, mais ils sont algorithmiquement enfermés dans leur petite bulle où iels n’auront aucun impact sur le reste du monde. </p>
<p>« Bon » et « bête » ça commence par la même lettre. On a ce qu’on mérite. Le simple fait d’avoir gardé un compte sur X après le rachat par Elon Musk était un vote virtuel pour Trump. Tout le monde le savait. Vous le saviez. Vous ne pouviez pas ne pas le savoir. C’est juste que, comme un bon consultant McKinsey, vous vous disiez que « ça n’était pas si grave que ça ». Qu’ « il y a des règles, non ? ». Si vous me lisez, vous êtes, comme beaucoup, une bonne personne et donc incapable d’imaginer qu’Elon Musk puisse avoir simplement et très ouvertement manipulé son réseau social pour favoriser Trump. </p>
<h2 id="soustitre-6">Mieux vaut tard que jamais</h2>
<p>Mais il n’est jamais trop tard pour réagir. Le 1er février est annoncé comme le « Global Switch Day ». Vous êtes invités à migrer de X vers Mastodon.</p>
<figure>
<a href="/files/x_mastodon.png"><img alt="Le 1er février, migrez de X vers Mastodon" src="/files/x_mastodon.png" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Le 1er février, migrez de X vers Mastodon</figcaption>
</figure>
<p>Mastodon qui devient une fondation. Ça fait plaisir de voir qu’Eugen, le créateur de Mastodon qui tout un temps s’enorgueillait du titre de « CEO de Mastodon » se rend compte que cette pression est énorme, qu’il ne joue pas dans la même cour et que Mastodon est un bien commun. En se faisant appeler « CEO », Meta le flattait pour obtenir sa coopération. Eugen semble avoir compris qu’il se perdait. Excellente interview de Renaud, développeur Mastodon.</p>
<ul>
<li><a href="https://basta.media/mastodon-bien-commun-surtout-vu-environnement-mediatique-politique-quitter-X">Quitter X, mais pour Mastodon ou BlueSky ? (basta.media)</a></li>
</ul>
<p>Thierry Crouzet fait la comparaison avec les résistants.</p>
<ul>
<li><a href="https://tcrouzet.com/2025/01/24/technofascisme/">Le technofascisme est-il une fatalité ? (tcrouzet.com)</a></li>
</ul>
<p>En parallèle, Dansup développe Pixelfed, qui ressemble à Instagram. Ce qui est génial c’est que vous pouvez suivre des gens sur Mastodon depuis Pixelfed et vice-versa (enfin, en théorie, faudra qu’on en reparle, car, depuis Pixelfed, vous ne verrez pour le moment que les messages Mastodon contenant une image, j’espère que ça évoluera). </p>
<p>Pixelfed a attiré tellement de gens dégoutés par Meta (propriétaire d’Instagram) que Dansup s’est vu assailli par les investisseurs désireux de mettre des sous dans son "entreprise".</p>
<figure>
<a href="/files/instagram_pixelfed.png"><img alt="Le 1er février, migrez de Instagram vers Pixelfed" src="/files/instagram_pixelfed.png" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Le 1er février, migrez de Instagram vers Pixelfed</figcaption>
</figure>
<p>Dommage pour eux, comme Mastodon, Pixelfed est un bien public. Il est et sera financé par les dons. Dansup lance d’ailleurs une campagne Kickstarter :</p>
<ul>
<li><a href="https://www.kickstarter.com/projects/pixelfed/pixelfed-foundation-2024-real-ethical-social-networks">Pixelfed’s Kickstarter</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-7">Signal et la messagerie</h2>
<p>Lors de mon examen, la plupart des étudiants ont eu des questions sur le Fediverse ou sur Signal. Ce qui m’a permis de sonder leurs utilisations des réseaux sociaux et messageries. Fait marrant : ils sont tous sur des réseaux où ils pensent que « tout le monde est ». Mais, sans communiquer entre eux, ne sont pas d’accord sur quel est le réseau où tout le monde est. J’ai eu des étudiants qui ne jurent que par Instagram et d’autres qui n’ont jamais eu de compte. J’ai eu un étudiant qui est sur Facebook Messenger et sur Signal, mais n’a jamais éprouvé le besoin d’être sur Whatsapp. À côté de lui, un autre étudiant n’avait tout simplement jamais entendu parler de Signal. Il n’y a que Discord qui semble faire l’unanimité.</p>
<p>Celleux qui utilisaient Signal disaient tou·te·s qu’iels regrettaient que Signal ne soit pas plus utilisé. Et bien, le 1er février, c’est l’occasion !</p>
<figure>
<a href="/files/whatsapp_signal.png"><img alt="Le 1er février, migrez de Whatsapp vers Signal" src="/files/whatsapp_signal.png" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Le 1er février, migrez de Whatsapp vers Signal</figcaption>
</figure>
<p>Alors, c’est peut-être le moment d’arrêter de jouer au bon petit consultant McKinsey ! Surtout si vous n’êtes pas payé pour ça…</p>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
</div>
Ploumhttps://ploum.netNe venez pas dire que vous n’étiez pas prévenus…https://ploum.net/2025-01-20-vous-etiez-prevenus.html2025-01-20T00:00:00Z2025-01-20T00:00:00Z
<h1>Ne venez pas dire que vous n’étiez pas prévenus…</h1>
<h2 id="soustitre-1">…c’est juste que vous pensiez ne pas être concernés</h2>
<p>Depuis des décennies, je fais partie de ces gens qui tentent d’alerter sur les terrifiantes possibilités qu’offre l’aveuglement technologique dans lequel nous sommes plongés.</p>
<p>Je croyais que je devais expliquer, informer encore et encore.</p>
<p>Je découvre avec effroi que même ceux qui comprennent ce que je dis n’agissent pas. Voire agissent dans le sens contraire. Les électeurs de Trump, pour la plupart, savent très bien ce qui va arriver. Les artistes défendent Facebook et Spotify. Les politiciens les plus à gauche restent accrochés à X comme leur seule fenêtre sur le monde. Pourtant, ils sont prévenus ! </p>
<p>C’est juste qu’ils croient qu’ils ne sont pas concernés. C’est juste que nous pensons naïvement que ça n’arrive qu’aux autres. Que nous sommes, d’une manière ou d’une autre, parmi ceux qui seront les privilégiés.</p>
<p>Je suis un homme. Blanc. Cisgenre. Avec un très bon diplôme. Une très bonne situation. Dans un des endroits les plus protégés, les plus démocratiques. Bref, je serai parmi les tout derniers à souffrir des effets combinés de la politique et de la technologie.</p>
<p>Et j’ai peur. Je suis terrifié.</p>
<h2 id="soustitre-2">J’ai peur de l’espionnage permanent</h2>
<p>Nous nous soumettons volontairement et presque consciemment à un espionnage permanent. Je vous avais déjà raconté que même les distributeurs de boissons font de la reconnaissance faciale ! </p>
<ul>
<li><a href="/2024-03-15-lectures-mensonges.html">Lectures : Une société de mensonges (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Comme le souligne Post Tenebras Lire, la réalité ressemble de plus en plus à mon roman Printeurs.</p>
<ul>
<li><a href="https://post-tenebras-lire.net/printeurs-ploum/">Printeurs - Ploum - (post-tenebras-lire.net)</a></li>
</ul>
<p>Mais la réalité a complètement dépassé la fiction, le cas le plus emblématique étant ce qui arrive aux Ouïghours qui sont contrôlés en permanence, dont la moindre image postée sur les réseaux sociaux (même si elle a été effacée depuis des années) peut servir d’excuse pour être enfermé. </p>
<ul>
<li><a href="https://outsiderland.com/danahilliot/terror-capitalism-sur-un-livre-de-darren-byler-au-sujet-des-ouighours-au-xinjiang/">Terror Capitalism : sur un livre de Darren Byler au sujet des Ouïghours au Xinjiang (outsiderland.com)</a></li>
</ul>
<p>Fuir les réseaux sociaux ? C’est trop tard pour eux, car le simple fait de ne pas avoir un smartphone est considéré comme suspect. Tout comme, en France, le fait d’utiliser Signal a déjà été considéré comme un élément à charge suffisant pour suspecter l’utilisateur d’écoterrorisme. (une seule solution pour contrer cela: migrer massivement vers Signal !)</p>
<p>Je le dis et je le répète : vous avez le droit de quitter les réseaux sociaux propriétaires. Vous avez le droit de désinstaller Whatsapp pour Signal. Si vous avez le moindre doute, je vous garantis que vous vous sentirez nettement mieux après.</p>
<ul>
<li><a href="/2023-10-29-le-droit-de-supprimer-twitter.html">Pourquoi j’ai supprimé mon compte Twitter (et pourquoi vous pouvez probablement en faire autant sans hésiter) (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Ne venez pas dire que vous n’étiez pas prévenus. </p>
<h2 id="soustitre-3">J’ai peur de l’uniformisation abrutie</h2>
<p>Les algorithmes des plateformes propriétaires leur permettent de vous imposer leur choix, leur vision du monde. X/Twitter cache les démocrates et met Trump en avant pendant les élections. Facebook cache le moindre bout de nichon, mais promeut les nazis. Ce n’est donc pas une surprise d’apprendre que Spotify fait exactement la même chose en générant de la musique qui est ensuite imposée dans les playlists, surtout celle qui sont de type "musique de fond/musique d’ambiance".</p>
<p>De cette manière, ils ne doivent pas payer de royalties aux musiciens. Qui n’en touchent déjà pas beaucoup.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.honest-broker.com/p/the-ugly-truth-about-spotify-is-finally">The Ugly Truth About Spotify Is Finally Revealed (www.honest-broker.com)</a></li>
</ul>
<p>Je suis un pirate. Lorsque je découvre un groupe qui me parle, je télécharge plusieurs albums illégalement en MP3. Si j’aime bien, j’achète les MP3 légaux sans DRM (ce que permet Bandcamp par exemple). Je suis un pirate, mais en achetant l’album directement, je fais plus pour l’artiste plus que des centaines voire des milliers de streams.</p>
<p>Le CEO de Spotify gagne chaque année plus d’argent que Taylor Swift. Il est plus riche que Paul McCartney ou Mick Jagger après 50 ans de carrière chacun.</p>
<p>Les pirates sont aux artistes ce que les immigrés sont aux pauvres : un bouc émissaire bien pratique. Et, en attendant, Amazon et Spotify tuent les artistes et nous baignent dans une mélasse uniformisée.</p>
<p>C’est bien pour ça que l’IA semble si intéressante pour le business : c’est, par définition, une production de mélasse fade et uniforme.</p>
<ul>
<li><a href="https://ludic.mataroa.blog/blog/i-will-fucking-piledrive-you-if-you-mention-ai-again/">I Will Fucking Piledrive You If You Mention AI Again (ludic.mataroa.blog)</a></li>
</ul>
<p>IA qui sont entraînées en utilisant… les bases de données pirates ! Car, oui, Meta a entrainé ses IA sur la base de données libgen.is.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.wired.com/story/new-documents-unredacted-meta-copyright-ai-lawsuit/">Meta Secretly Trained Its AI on a Notorious Piracy Database, Newly Unredacted Court Docs Reveal (www.wired.com)</a></li>
</ul>
<p>Ne venez pas dire que vous n’étiez pas prévenus. </p>
<p>Rappel: libgen.is est aux livres ce que thepiratebay est aux films. Une gigantesque bibliothèque pirate, un bastion de préservation de la culture. Je n’exagère pas : lors d’un dîner, mon ami Henri Lœvenbruck m’a parlé d’un livre assez vieux qui n’était plus édité et qui était devenu introuvable. Même dans les bibliothèques, les bouquineries et les catalogues en ligne, il ne parvenait pas à mettre la main sur ce livre. Livre que j’ai trouvé, devant lui, sur libgen.is en quelques secondes.</p>
<p>Ceux que vous accusez d’être des pirates sont les défenseurs, les protecteurs et les diffuseurs de la culture humaine. Et puisque Meta utilise libgen.is pour entrainer ses IA, ce n’est plus vraiment du piratage, vous avez moralement le droit d’utiliser cette bibliothèque partagée. Sur laquelle, soit dit en passant, je vous encourage à découvrir mes livres si vous ne voulez/pouvez pas les payer.</p>
<ul>
<li><a href="https://libgen.is/fiction/?q=ploum&criteria=&language=&format=">Ploum sur Library Genesis (libgen.is)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-4">J’ai peur de voir disparaitre la démocratie </h2>
<p>Tous les experts le clament depuis 25 ans : le vote électronique enterre complètement la démocratie.</p>
<ul>
<li><a href="/157-pour-ou-contre-le-vote-electronique/index.html">Pour ou contre le vote électronique ? (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>La tricherie n’a même pas besoin d’être subtile ni même plausible. Le marketing et la politique ont découvert que les 5% d’intellectuels qui s’indignent ne pèsent pas lourd. Que le reste de la population ne demande qu’une chose : qu’on leur mente !</p>
<ul>
<li><a href="/2024-10-24-ils-nous-mentent.html">Ils nous mentent (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Les personnes qui mettent en place le vote électronique sont des gens malhonnêtes qui espèrent en tirer profit sans se rendre compte que leurs adversaires peuvent faire de même.</p>
<p>Ou alors des complets crétins.</p>
<p>Mais les deux ne sont pas incompatibles.</p>
<p>Dans tous les cas, ce sont les fossoyeurs de la démocratie.</p>
<p>Il est presque certain que Trump a triché pour être élu en piratant les systèmes de vote.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.planetcritical.com/p/cyber-security-experts-warn-election-hacked/">Cyber-Security Experts Warn Election Was Hacked (www.planetcritical.com)</a></li>
</ul>
<p>J’en étais convaincu depuis bien avant l’élection. Pourquoi ? Tout simplement parce que Georges W. Bush l’a fait avant lui en 2000 et que ça a très bien fonctionné. Le CEO de Diebold, la société en charge de construire les ordinateurs de vote, avait d’ailleurs déclaré à l’époque qu’il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour que Georges W. Bush soit élu.</p>
<p>Georges W. Bush a d’ailleurs perdu cette élection. Sur absolument tous les critères. Mais Al Gore a préféré reconnaître une défaite mathématiquement impossible en Floride pour éviter des débordements de violence.</p>
<ul>
<li><a href="https://jacobin.com/2020/10/trump-coup-florida-2000-recount">To Stop an Electoral Coup, Study What Went Wrong in the 2000 Florida Recount (jacobin.com)</a></li>
</ul>
<p>La tricherie et la violence ont permis à Georges W Bush de devenir président à la place d’Al Gore, ce qui a consacré cette stratégie électorale et durablement orienté le monde entier.</p>
<ul>
<li><a href="/et-si-al-gore-etait-devenu-president-des-etats-unis-en-2000/index.html">Et si Al Gore était devenu président des États-Unis en 2000 ? (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Grâce au vote électronique et aux connexions de Trump avec la Silicon Valley (Elon Musk, Peter Thiel, …), Trump avait la possibilité de tricher très facilement.</p>
<p>La question n’est donc pas de savoir s’il l’a fait, mais « Qu’est-ce qui l’aurait empêché de le faire ? »</p>
<p>Réponse : rien.</p>
<p>Ne vous demandez pas s’il est probable que Trump ait triché, mais, au contraire, s’il est probable qu’il ne l’ait pas fait.</p>
<p>Résumons : l’équipe de Trump avait clairement les moyens de pirater le vote électronique. Elle avait les données nécessaires (souvenez-vous d’Elon Musk offrant un million de dollars dans une tombola en échange des données personnelles des votants). Et Trump a obtenu un résultat statistiquement incroyablement improbable : gagner les sept swing states en gagnant juste les comtés les plus disputés avec juste ce qu’il faut de marge pour éviter un recompte et avec entre 5% et 7% de "bullet votes" (des bulletins juste pour Trump, mais ne participant pas aux autres élections) alors que la norme pour les "bullet votes" est entre… 0,05% et 1% dans les cas extrêmes (ce qui est le cas dans les comtés moins disputés). Le tout en ayant exactement le même nombre de voix que lors de l’élection de 2020.</p>
<p>EDIT: après recomptage, il semblerait que l’argument des "bullet votes" ne tiennent pas complètement la route. Le fond ne change pas mais toute triche, si avérée, ne serait pas aussi statistiquement évidente. Voir l’article suivant écrit suite au premier.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.planetcritical.com/p/election-fraud-debunked">Election Fraud Debunked? (www.planetcritical.com)</a></li>
</ul>
<p>Mais vous savez quoi ?</p>
<p>Cela ne change rien. Parce que depuis Al Gore, on sait que les républicains trichent à outrance et que les démocrates, pour être élus, ne doivent pas juste remporter l’élection : ils doivent la gagner à un tel point que même les tricheries ne soient pas suffisantes. Cela ne veut pas dire que les démocrates ne trichent pas. Mais juste qu’ils le font moins bien ou qu’ils ont une certaine retenue quand ils le font.</p>
<p>La tromperie et la menace de violence gouvernent. Pendant que les politiciens vaguement plus progressistes/humanistes perdent les élections en tentant d’obtenir des followers sur des réseaux sociaux propriétaires totalement contrôlés par leur ennemi juré. Ils sont peut-être moins malhonnêtes, mais totalement crétins.</p>
<p>Ne venez pas dire que vous n’étiez pas prévenus. C’est juste que vous pensiez ne pas être concernés.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/30257395/">Photo par Cris Ramos</a></li>
</ul>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
</div>
Ploumhttps://ploum.netMon collègue Juliushttps://ploum.net/2024-12-23-julius-fr.html2024-12-23T00:00:00Z2024-12-23T00:00:00Z
<h1>Mon collègue Julius</h1>
<ul>
<li><a href="/2024-12-23-julius-en.html">Translation in English</a></li>
<li><a href="https://lazygyu.net/blog/my_colleague_julius">Lazygyu의 한국어 번역</a></li>
</ul>
<p>Vous connaissez Julius ? Mais si, Julius ! Vous voyez certainement de qui je veux parler ! </p>
<p>J’ai rencontré Julius à l’université. Un jeune homme discret, sympathique, le sourire aux lèvres. Ce qui m’a d’abord frappé chez Julius, outre ses vêtements toujours parfaitement repassés, c’est la qualité de son écoute. Il ne m’interrompait jamais, acceptait de s’être trompé et répondait sans hésiter à toutes mes interrogations.</p>
<p>Il allait à tous les cours, demandait souvent les notes des autres pour « comparer avec les siennes » comme il disait. Et puis il y eut le fameux projet informatique. Nous devions, en équipe, coder un logiciel système assez complexe en utilisant le langage C. Julius participait à toutes nos réunions, mais je ne me souviens pas de l’avoir vu écrire une seule ligne de code. Au final, je crois qu’il s’est contenté de faire la mise en page du rapport. Qui était très bien.</p>
<p>De par sa prestance et son élégance, Julius était tout désigné pour faire la présentation finale. Je suis sûr qu’il a fait du théâtre, car, à son charisme naturel, il ajoute une diction parfaite. Il émane de sa personne une impression de confiance innée.</p>
<p>À tel point que les professeurs n’ont pas tout de suite réalisé le problème lorsqu’il s’est mis à parler de la machine virtuelle C utilisée dans notre projet. Il avait intégré dans la présentation un slide avec un logo que je n’avais jamais vu, un screenshot et des termes n’ayant aucun rapport avec quoi que ce soit de connu en informatique.</p>
<p>Pour celleux qui ne connaissent pas l’informatique, le C est un langage compilé. Il n’a pas besoin d’une machine virtuelle. Parler de machine virtuelle C, c’est comme parler du carburateur d’une voiture électrique. Cela n’a tout simplement aucun sens.</p>
<p>Je me suis levé, j’ai interrompu Julius et j’ai improvisé en disant qu’il s’agissait d’une simple blague entre nous. « Bien entendu ! » a fait Julius en me regardant avec un grand sourire. Le jury de projet était perplexe, mais j’ai sauvé les meubles.</p>
<p>Durant toutes nos études, j’ai entendu plusieurs professeurs discuter du « cas Julius ». Certains le trouvaient très bon. D’autres disaient qu’il avait des lacunes profondes. Mais, malgré des échecs dans certaines matières, il a fini par avoir son diplôme en même temps que moi.</p>
<p>Nos chemins se sont ensuite séparés durant plusieurs années.</p>
<p>Alors que je travaillais depuis presque une décennie dans une grande entreprise où j’avais acquis de belles responsabilités, mon chef m’a annoncé que les recruteurs avaient trouvé la perle rare pour renforcer l’équipe. Un CV hors-norme m’a-t-il dit.</p>
<p>À la coupe parfaite de son costume, à sa démarche et sa prestance, je reconnus Julius avant même de voir son visage.</p>
<p>Julius ! Mon vieux camarade !</p>
<p>Si j’avais vieilli, il semblait avoir mûri. Toujours autant de charisme, d’assurance. Il portait désormais une barbe de trois jours légèrement grisonnante qui lui donnait un air de sage autorité. Il semblait sincèrement content de me revoir.</p>
<p>Nous parlâmes du passé et de nos carrières respectives. Contrairement à moi, Julius n’était jamais resté très longtemps dans la même entreprise. Il partait après un an, parfois moins. Son CV était impressionnant : il avait acquis diverses expériences, il avait touché à tous les domaines de l’informatique. À chaque fois, il montait en compétence et en salaire. Je devais découvrir plus tard que, alors que nous occupions une position similaire, il avait été engagé pour le double de mon salaire. Plus des primes dont j’ignorais jusqu’à l’existence.</p>
<p>Mais je n’étais pas au courant de cet aspect des choses lorsque nous nous mîmes au travail. Au début, je tentai de le former sur nos projets et nos process internes. Je lui donnais des tâches sur lesquelles il me posait des questions. Beaucoup de questions pas toujours très pertinentes. Avec ce calme olympien et cet éternel sourire qui le caractérisait. </p>
<p>Parfois il prenait des initiatives. Écrivait du code ou de la documentation. Il avait réponse à toutes les questions que nous pouvions nous poser, quel que soit le domaine. C’était quelquefois très bon, souvent médiocre voire du grand n’importe quoi. Il nous a fallu un certain temps pour comprendre que chacune des contributions de Julius nécessitait d’être entièrement revue et corrigée par un autre membre de l’équipe. Si nous ne connaissions pas le domaine, il fallait le faire vérifier par un expert externe. Très vite, le mot d’ordre fut qu’aucun document issu de Julius ne devait être rendu public avant d’avoir été relu par deux d’entre nous.</p>
<p>Mais Julius excellait dans la mise en page, la présentation et la gestion des réunions. Régulièrement, mon chef s’approchait de moi et me disait : « On a vraiment de la chance d’avoir ce Julius ! Quel talent ! Quel apport à l’équipe ! »</p>
<p>J’essayais vainement d’expliquer que Julius ne comprenait rien à ce que nous faisions, que nous en étions au point où nous l’envoyions à des réunions inutiles pour nous en débarrasser afin de ne pas avoir à répondre à ses questions et corriger son travail. Mais même cette stratégie avait ses limites.</p>
<p>Il nous a fallu une semaine de réunion de crises pour expliquer à un client déçu par une mise à jour de notre logiciel que, si Julius avait promis que l’interface serait simplifiée pour ne comporter qu’un seul bouton qui ferait uniquement ce que voulait justement le client, il y avait un malentendu. Qu’à part développer une machine qui lisait dans les pensées, c’était impossible de répondre à des besoins aussi complexes que les siens avec un seul bouton.</p>
<p>C’est lorsque j’ai entendu Julius prétendre à un autre client, paniqué à l’idée de se faire « hacker », que, par mesure de sécurité, nos serveurs connectés à Internet n’avaient pas d’adresse IP que nous avons du lui interdire de rencontrer un client seul.</p>
<p>Pour celleux qui ne connaissent pas l’informatique, le "I" de l’adresse IP signifie Internet. La définition même d’Internet est l’ensemble des ordinateurs interconnectés possédant une adresse IP.</p>
<p>Être sur Internet sans adresse IP, c’est comme prétendre être joignable par téléphone sans avoir de numéro.</p>
<p>L’équipe s’était désormais organisée pour que l’un d’entre nous ait en permanence la charge d’occuper Julius. Je n’ai jamais voulu dire du mal à son sujet, car c’était mon ami. Une codeuse exaspérée a cependant exposé le problème à mon chef. Qui lui a répondu en l’accusant de jalousie, car il était très satisfait du travail de Julius. Elle a reçu un blâme et a démissionné un peu après.</p>
<p>Heureusement, Julius nous a un jour annoncé qu’il nous quittait, car il avait reçu une offre qu’il ne pouvait pas refuser. Il a apporté des gâteaux pour fêter son dernier jour avec nous. Mon chef et tout le département des ressources humaines étaient sincèrement tristes de le voir partir.</p>
<p>J’ai dit au revoir à Julius et ne l’ai plus jamais revu. Sur son compte LinkedIn, qui est très actif et reçoit des centaines de commentaires, l’année qu’il a passée avec nous est devenue une expérience incroyable. Il n’a pourtant rien exagéré. Tout est vrai. Mais sa façon de tourner les mots et une certaine modestie mal camouflée donne l’impression qu’il a vraiment apporté beaucoup à l’équipe. Il semblerait qu’il soit ensuite devenu adjoint de la CEO puis CEO par intérim d’une startup qui venait d’être rachetée par une multinationale. Un journal économique a fait un article à son sujet. Après cet épisode, il a rejoint un cabinet ministériel. Une carrière fulgurante !</p>
<p>De mon côté, j’ai essayé d’oublier Julius. Mais, dernièrement, mon chef est venu avec un énorme sourire. Il avait rencontré le commercial d’une boîte qui l’avait ébahi par ses produits. Des logiciels d’intelligence artificielle qui allait, je cite, doper notre productivité !</p>
<p>J’ai désormais un logiciel d’intelligence artificielle qui m’aide à coder. Un autre qui m’aide à chercher des informations. Un troisième qui résume et rédige mes emails. Je n’ai pas le droit de les désactiver.</p>
<p>À chaque instant, à chaque seconde, j’ai l’impression d’être entouré par Julius. Par des dizaines de Julius. </p>
<p>Je dois travailler cerné par des Julius. Chaque clic sur mon ordinateur, chaque notification sur mon téléphone semble provenir de Julius. Ma vie est un enfer pavé de Julius.</p>
<p>Mon chef est venu me voir. Il m’a dit que la productivité de l’équipe baissait dangereusement. Que nous devrions utiliser plus efficacement les intelligences artificielles. Que nous risquions de nous faire dépasser par les concurrents qui, eux, utilisent à n’en pas douter les toutes dernières intelligences artificielles. Qu’il avait mandaté un consultant pour nous installer une intelligence artificielle de gestion du temps et de la productivité.</p>
<p>Je me suis mis à pleurer. « Encore un Julius ! » ai-je sangloté.</p>
<p>Mon chef a soupiré. Il m’a tapoté l’épaule et m’a dit : « Je comprends. Moi aussi je regrette Julius. Il nous aurait certainement aidés à passer ce moment difficile. »</p>
<ul>
<li><a href="https://mamot.fr/@[email protected]/113675679701829415">Inspiré par un post d’Étienne sur Mastodon</a></li>
<li><a href="https://betterimagesofai.org/images?artist=MaxGruber&title=Clickworker3d-printed">Image de Max Gruber/Better Images of AI</a></li>
</ul>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
</div>
Ploumhttps://ploum.netL’urgence de soutenir l’énergie du librehttps://ploum.net/2024-12-18-april.html2024-12-18T00:00:00Z2024-12-18T00:00:00Z
<h1>L’urgence de soutenir l’énergie du libre</h1>
<blockquote> Éditorial rédigé pour le Lama déchaîné n°9, l’hebdomadaire réalisé par l’April afin d’alerter sur la précarité financière de l’association. J’étais limité à 300 mots. Pour un bavard comme moi, c’est un exercice très difficile ! (il est déchaîné… hi hi hi ! Elle est amusante celle-là, je viens de la comprendre )<br></blockquote>
<ul>
<li><a href="https://april.org/campagne/numero/9/">Le Lama déchaîné n°9</a></li>
</ul>
<p>Montée de l’extrémisme, catastrophes climatiques, crises politiques et sociales, guerres. Entre ces urgences, est-il encore raisonnable de consacrer de l’énergie au logiciel libre, aux communs numériques et culturels? Ne devrait-on pas revoir nos priorités?</p>
<p>Le raccourci est dangereux.</p>
<p>Ne faut-il pas au contraire revenir aux fondamentaux, réfléchir à l’infrastructure même de notre société?</p>
<p>Contrairement à ce que nous serinent les magnats de l’industrie, la technologie n’est jamais neutre. Elle porte en elle sa propre idéologie. Par essence, l’extrême centralisation de nos outils Internet préfigure la centralisation d’un pouvoir autoritaire fasciste. L’ubiquité du modèle publicitaire rend la croissance et l’hyperconsommation incontournable. Ces deux piliers se rejoignent et se complètent dans la normalisation de l’espionnage technologique permanent.</p>
<p>Si nous voulons changer de direction, si nous voulons apprendre à limiter notre consommation des ressources naturelles, à écouter et respecter nos différences, à bâtir des compromis démocratiques, il est urgent et indispensable de nous attaquer à la racine: notre infrastructure de communication et d’échange. De libérer le réseau qui nous relie, qui relie nos données, nos échanges commerciaux, nos pensées, nos émotions.</p>
<p>Rejoindre un groupe anticapitaliste sur Facebook, poster des vidéos zéro déchet sur Instagram ou utiliser l’infrastructure Outlook pour les mails de son syndicat sont des actes qui participent activement à promouvoir, justifier et perpétuer le système qu’ils cherchent, naïvement, à dénoncer.</p>
<p>Ce n’est pas un hasard si les discussions sur le Fediverse et le réseau Mastodon parlent de cyclisme, d’écologie, de féminisme. Parce que la technologie libre et décentralisée porte sa propre idéologie. Parce qu’elle arrive à se maintenir, à effrayer les plus gros monopoles que le capitalisme ait jamais engendrés, et cela malgré le fait qu’elle ne tienne que grâce à des bouts de ficelle et l’énergie de quelques personnes sous-payées ou bénévoles.</p>
<p>Lorsque tout semble aller de travers, il faut se concentrer sur les racines, les fondamentaux. L’infrastructure, l’éducation. C’est pourquoi je pense que les actions de l’April, la Quadrature du Net, Framasoft, la Contre-voie et toutes les associations libristes ne sont pas simplement importantes.</p>
<p>Elles sont vitales, cruciales.</p>
<p>Le libre n’est pas un luxe, c’est une urgence absolue.</p>
<blockquote> — Et alors, hi hi hi, Ploum a dit : il est… hi hi hi… Il est déchaîné !<br> — Par pitié, faites un don à l’April sinon il va la raconter de nouveau !<br></blockquote>
<ul>
<li><a href="https://enventelibre.org/fr/dons/273-dons-april.html">Faire un don à l’April</a></li>
<li><a href="https://don.laquadrature.net/fr">Faire un don à la Quadrature du Net</a></li>
<li><a href="https://framasoft.org/fr/#support">Faire un don à Framasoft</a></li>
<li><a href="https://lacontrevoie.fr/participer/#don">Faire un don à la Contre-Voie</a></li>
</ul>
<blockquote> Il est déchaîné… hi hi hi…<br></blockquote>
<ul>
<li><a href="https://ptilouk.net/">Le dessin du Lama est de Gee et sous licence CC By-SA</a></li>
</ul>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
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Ploumhttps://ploum.netLa colère de l’écrivainhttps://ploum.net/2024-12-09-colere-ecrivain.html2024-12-09T00:00:00Z2024-12-09T00:00:00Z
<h1>La colère de l’écrivain</h1>
<blockquote> RAPPEL: je serai à Louvain-la-Neuve mardi 10 décembre à 19h à La Page d’Après pour ma dernière rencontre de l’année.<br></blockquote>
<ul>
<li><a href="https://mobilizon.fr/events/6377c6f1-2941-4008-b333-c11bf8b044e5">Rencontre Littéraire Bikepunk avec Ploum (mobilizon.fr)</a></li>
</ul>
<blockquote> Comme je l’explique dans la suite de ce billet, le succès de Bikepunk a pris le distributeur au dépourvu et le livre s’est retrouvé indisponible pour beaucoup de libraires. La situation devrait être à présent résolue. Si votre libraire ne peut pas l’avoir rapidement, commandez avant le 10-11 décembre sur le site PVH. Vous devriez le recevoir avant Noël. Un tout grand merci pour votre patience !<br></blockquote>
<ul>
<li><a href="https://pvh-editions.com/product/bikepunk">Commander Bikepunk sur le site PVH</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-1">Une colère inextinguible</h2>
<p>Il y a une vingtaine d’années, je me suis rendu dans un grand hôtel bruxellois pour une soirée de lectures de poésie. J’ai appelé l’ascenseur. Quand il s’est ouvert devant moi, je me suis subitement retrouvé face à Jean-Marie Le Pen et son garde du corps. Je l’ai reconnu sans aucune hésitation, sans aucun doute. </p>
<p>J’ai été tétanisé. </p>
<p>Sans réfléchir, par réflexe, j’ai fait un pas en arrière et refusé de rentrer dans l’ascenseur. Tout en montant les escaliers, je me suis longuement demandé si ce réflexe était juste. Si cette personne méritait cette attention, si j’aurais du l’ignorer totalement et faire comme si de rien n’était. Je me demandais également s’il se rendait à la même soirée que moi, soirée organisée par la veuve d’un résistant belge célèbre qui avait été prisonnier à Dachau. </p>
<p>À la fin de la soirée, discutant avec cette vieille dame adorable et très intéressante, je lui tends un recueil de mes propres poèmes. Elle prend un très long moment pour lire mes poèmes, les relire avant de se tourner vers moi avec un petit signe de dénégation :</p>
<p>— Vous n’êtes pas un poète.</p>
<p>La douche est froide.</p>
<p>— Vous avez trop de choses à dire. Trop de colère, trop de sujets à aborder. Vous n’êtes pas un poète. Vous êtes un écrivain !</p>
<p>Cette rencontre me revient régulièrement en tête et je ne peux que constater la justesse de cette analyse. Je veux en dire trop tout le temps. Parfois, je laisse écouler ma colère, brute, sauvage, violente et agressive. Parfois je tente de la catalyser ou de la camoufler en utilisant l’analyse rationnelle, l’humour voire même l’hypocrisie. Il n’en reste pas moins que je ne fais que rajouter un « é » devant chacun de mes cris pour en faire des écrits. </p>
<p>Chaque écrit est un cri, chaque cri est un écrit. Toute ma vie n’est que la gestion de cette colère bouillonnante qui m’anime (et que mon épouse m’éduque à contrôler).</p>
<p>C’est pour quoi j’ai été incroyablement touché de découvrir que Terry Pratchett, un de mes modèles, était un homme profondément, désespérément en colère.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.theguardian.com/books/2014/sep/24/terry-pratchett-angry-not-jolly-neil-gaiman">Neil Gaiman: ‘Terry Pratchett isn’t jolly. He’s angry’ (www.theguardian.com)</a></li>
</ul>
<p>Une autre anecdote que j’ai retenue de la très chouette biographie de Terry Pratchett est, qu’au bord du burn-out, il a finalement accepté de prendre six mois sabbatiques pour se reposer de l’écriture. À son retour, son agent lui a demandé ce qu’il avait fait de ces six mois. « J’ai écrit deux livres » a répondu Terry Pratchett.</p>
<p>Tout le monde peut écrire. L’écrivain est celui qui ne peut pas s’empêcher d’écrire. Il en est de même du blogging. On me demande parfois pourquoi je blogue autant. Je ne peux que répondre : « Parce que je ne peux physiquement pas faire moins ». Comme je répondais à Eddy Caekelberghs sur les ondes de la RTBF, si je ne le faisais pas, j’ai l’impression que j’exploserais. J’écris comme je refuse de monter dans un ascenseur avec Jean-Marie Le Pen : par réflexe, par nécessité vitale.</p>
<ul>
<li><a href="https://indymotion.fr/w/1iLbQeLuTdL3TyZY5GFupY">Ploum à l’émission Majuscules avec Eddy Caekelberghs (indymotion.fr)</a></li>
</ul>
<p>J’ai tellement de choses à écrire et il me reste tellement peu d’années pour le faire. Je dois en permanence faire des choix, me dire « non » à moi-même, repousser les nouvelles idées qui m’assaillent. Un problème que Thurk a appelé « The Boltzmann Brain ».</p>
<ul>
<li><a href="gemini://thurk.org/blog/613.gmi">The Existential Boltzmann Brain (thurk.org)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-2">L’industrie du livre</h2>
<p>Écrire. Oui, mais pourquoi ? Pour être lu bien sûr ! Le Graal, pour un auteur non anglophone, c’est d’être traduit en anglais pour accéder au marché international. Mais ce marché rêvé est-il si formidable ? Le monde de l’édition est typiquement un marché de type « Winner takes it all » comme le décrit Jaron Lanier dans son livre « Who owns the future ? ».</p>
<p>Si vous n’êtes pas une mégacélébrité de type Michelle Obama ou un auteur à franchise de type Tom Clancy, n’espérez pas vendre plus de 1000 voire 2000 livres. Dans le monde entier. Et, en fait, même si vous êtes une mégacélébrité avec des millions de followers, le succès n’est pas du tout garanti.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.elysian.press/p/no-one-buys-books">No one buys books (www.elysian.press)</a></li>
</ul>
<p>Mais pourquoi y’a-t-il autant de livres alors ? Parce que, comme les investisseurs dans les startups, les éditeurs cherchent le prochain Harry Potter ou le prochain 50 Shades of Grey, l’anomalie qui n’arrive que tous les 5 ou 10 ans.</p>
<p>L’article dépeint également une dépendance incroyablement morbide à Amazon, avec une grande partie du budget marketing des livres partant chez Amazon pour « remonter dans les résultats de recherche ». Faut dire qu’un livre sur deux est aujourd’hui acheté chez Amazon.</p>
<p>Alors, par pitié, soutenez les libraires indépendants ! Allez flâner, commandez chez eux, écoutez leurs recommandations. Nous avons déjà perdu trop de libertés chez les GAFAM, l’idée de perdre les librairies me terrorise.</p>
<p>Je vous propose de nous retrouver ce mardi 10 décembre, à 19h à La Page d’Après à Louvain-la-Neuve pour une rencontre littéraire. J’aime les libraires ! Si vous êtes libraire, n’hésitez pas à me contacter, je me déplace avec plaisir ou je profite de déplacements pour vous rendre visite.</p>
<ul>
<li><a href="https://mobilizon.fr/events/6377c6f1-2941-4008-b333-c11bf8b044e5">Rencontre Littéraire Bikepunk avec Ploum (mobilizon.fr)</a></li>
<li><a href="https://www.lapagedapres.be/">La Page d'Après (www.lapagedapres.be)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-3">L’indisponibilité de Bikepunk</h2>
<p>Je suis conscient de me tirer une balle dans le pied. De par la stratégie de mon éditeur de minimiser les interactions avec Amazon, de ne leur céder que le strict nécessaire, mon roman Bikepunk s’est retrouvé en rupture de stock chez le géant américain alors même que je faisais plusieurs apparitions télé. Puis en rupture de stock chez les libraires, le distributeur ne pouvant pas suivre la demande. On en est au point où je crains que la version EPUB soit bientôt également épuisée.</p>
<p>Je ne vais pas me plaindre que mon livre ait du succès ! Au point de voir une émission télé accoler mon nom à la phrase « Le vélo comme seule arme contre l’aveuglement d’une société ».</p>
<figure>
<a href="/files/ln24.jpg"><img alt="Ploum sur LN24, Le vélo comme seule arme contre l’aveuglement d’une société" src="/files/ln24.jpg" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Ploum sur LN24, Le vélo comme seule arme contre l’aveuglement d’une société</figcaption>
</figure>
<p>Ou de lire le peu suspect de gauchisme Paris-Match définir Bikepunk comme un mouvement de rébellion urbaine « utilisant le vélo comme symbole de résistance contre les systèmes dominants » (sic). </p>
<ul>
<li><a href="https://www.parismatch.be/actualites/societe/2024/12/08/deux-roues-un-combat-quand-le-bikepunk-redefinit-la-rebellion-urbaine-FCJV42AVDNEW5AKPQ2LEJPDK2E/">Deux roues, un combat : quand le bikepunk redéfinit la rébellion urbaine (www.parismatch.be)</a></li>
</ul>
<p>Je suis à la fois empli de gratitude envers vous pour cet enthousiasme, pour votre incroyable soutien et plein de frustration, car ce sont certainement des centaines d’exemplaires de Bikepunk qui n’ont pas trouvé leurs lecteurs. Des centaines de personnes frustrées ou déçues. Des opportunités manquées parce que tant mon éditeur que moi tentons de sortir de la ligne Amazon/grands distributeurs appartenant à des milliardaires. </p>
<p>Si Bikepunk n’est pas disponible chez votre libraire et que vous le voulez pour Noël, commandez-le en urgence sur le site PVH.</p>
<ul>
<li><a href="https://pvh-editions.com/product/bikepunk">Commander Bikepunk en ligne</a></li>
</ul>
<p>Et rappelez-vous qu’il est sous licence libre. Vous avez le droit de le copier et de le partager ! La première liberté est celle de l’imagination. Libérez les histoires, libérez l’imaginaire !</p>
<h2 id="soustitre-4">De la nourriture que nous offrons à notre cerveau</h2>
<p>Cette mainmise de quelques monopoles sur l’industrie du livre me rend inquiet. Beaucoup de jeunes auteurs ne sont pas mis en avant pour promouvoir des « valeurs sûres ». Si nous avons besoin de relire en permanence Zola ou Hugo, nous avons également besoin d’entendre de nouvelles voix, de tester de nouvelles idées. Pour éviter l’uniformisation, un livre n’a pas besoin d’être génialissime, grandiose ou culte. Il peut se contenter de nous offrir, à un moment de notre vie, une nouvelle perspective inconsciente. Il suffit qu’il soit différent. Votre corps est composé de ce que vous mangez, votre esprit est composé de ce que vous lisez. Même si vous ne vous en souvenez plus, même si ça vous a semblé sans importance, même si vous n’avez pas fini le livre. Vous êtes ce que vous lisez.</p>
<ul>
<li><a href="https://blog.jim-nielsen.com/2024/you-are-what-you-read/">You Are What You Read, Even If You Don’t Always Remember It (blog.jim-nielsen.com)</a></li>
</ul>
<p>Il y a déjà 11 ans, je faisais une analogie entre la nourriture que nous consommons et ce que nous offrons à notre cerveau.</p>
<ul>
<li><a href="/pour-une-alimentation-intellectuelle-saine-et-variee/index.html">Pour une alimentation intellectuelle saine et variée (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Cal Newport, l’auteur de « Digital Minimalism » a repris cette analogie pour décrire les réseaux sociaux comme des fabriques de contenus « ultra-transformés ». La nourriture ultra-transformée est, en effet, produite pour être irrésistible : un goût très fort, du sel, de la graisse, un engourdissement de la satiété. Finalement, on se rue sur des posts Facebook ou Instagram tout comme on se jette sur sachet de chips.</p>
<ul>
<li><a href="https://calnewport.com/on-ultra-processed-content/">On Ultra-Processed Content (calnewport.com)</a></li>
</ul>
<p>Ce qui me perturbe dans cette analogie, c’est la réalisation que les problèmes sont identiques, mais que les personnes qui sont conscientes de l’un ignorent complètement l’autre.</p>
<p>Dans les rassemblements de geeks linuxiens ou de rôlistes libristes, le coca et la cigarette, par exemple, sont trop souvent normalisés et tolérés (ce que je réprouve fortement).</p>
<p>Mais l’inverse est tout aussi vrai : les personnes attentives à l’alimentation, à l’écologie, à la santé se concentrent sur Instagram, Facebook, Tik-Tok et/ou Twitter, alimentant une crise d’obésité informationnelle morbide. Leur suggérer de communiquer par Signal plutôt que Whatsapp leur fait souvent lever les yeux au ciel. Le domaine ne les intéresse pas. Je ne parle même pas de Mastodon…</p>
<p>Il y a même des groupes "anticapitalistes" sur Facebook !</p>
<h2 id="soustitre-5">La cohérence plutôt que la perfection</h2>
<p>C’est pourquoi je suis particulièrement heureux de travailler avec un éditeur qui explore, qui teste de nouveaux modèles, qui crée une atmosphère de collaboration entre tous les auteurs et qui a pour mission première de contribuer à la liberté de la culture.</p>
<p>Non seulement les livres sont sous licence libre, mais les auteurs sont encouragés à rejoindre le Fediverse !</p>
<ul>
<li><a href="https://fedidevs.com/s/MjM/">Suivre tous les auteurs PVH sur Mastodon</a></li>
</ul>
<p>L’équipe PVH lutte tous les jours, toutes les heures pour tenter de diffuser des livres et des idées de liberté sans baisser son froc devant les milliardaires qui tentent d’imposer ce qu’ils sont sûrs de vendre ou, pire, ce qui arrange leurs intérêts idéologiques. C’est difficile, il y a des couacs comme l’indisponibilité de Bikepunk. Mais, vous savez quoi ? Ça commence à fonctionner ! Le logiciel libre Be-Bop, développé en interne, commence à prendre de l’ampleur.</p>
<ul>
<li><a href="https://be-bop.io/">Be-bop, le logiciel de vente de PVH</a></li>
</ul>
<p>PVH n’est pas parfait. Personne n’est parfait. Mais nous tentons de garder une ligne cohérente dans notre combat pour promouvoir et diffuser la culture de l’imaginaire et la philosophie du libre. </p>
<p>Votre compréhension, votre patience, vos achats, vos partages sont le meilleur des soutiens. Merci ! Merci de faire partie de cette aventure, de parler de nous autour de vous. Vous n’apaisez pas ma colère, mais vous m’aidez à la transformer, à la canaliser pour contribuer à quelque chose de plus grand, quelque chose dont nous pourrons un jour être fières et fiers.</p>
<p>Comme le dit très bien Framasoft : Le chemin est long, mais la voie est libre !</p>
<ul>
<li><a href="https://indymotion.fr/w/ckueE9iTAVJc95yvJ61y9A">Pour les curieux, la vidéo d’où est extraite l’image. Mais ne perdez pas votre temps, ça reste de la télé.</a></li>
</ul>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
</div>
Ploumhttps://ploum.netPérenniser ma numérique éphéméritéhttps://ploum.net/2024-12-06-perenite-ephemerite.html2024-12-06T00:00:00Z2024-12-06T00:00:00Z
<h1>Pérenniser ma numérique éphémérité</h1>
<p>J’écris mon journal personnel à la machine à écrire. De simples feuilles de papier que je fais relier chaque année et dont le contenu n’est nulle part en ligne.</p>
<p>Pourtant, j’ai le sentiment que ce contenu a beaucoup plus de chances d’être un jour accessible voire, soyons fou, lu par mes enfants, mes petits enfants et, qui sait, plus loin encore.</p>
<p>Parce qu’hormis un incendie dramatique, ces écrits sont quasiment indestructibles. Qu’ils sont facilement trouvables sur l’étagère de mon bureau. Qu’ils sont facilement lisibles et le resteront sans aucune connaissance autre que la langue française.</p>
<p>Tout ce qui est publié numériquement est à quelques erreurs de manipulation de se faire effacer définitivement. Un accident anodin peut rendre un support illisible. Un mot de passe oublié rendre des documents définitivement inaccessibles. Mais pas besoin d’aller si loin : si demain je disparais, qui serait capable de retrouver quoi que ce soit dans le fouillis de mon disque dur ? Même en imaginant qu’il ne soit pas chiffré !</p>
<p>Si tout est transitoire, le pire n’est-il pas de confier cette impermanence à des entreprises externes ?</p>
<h2 id="soustitre-1">L’anti-pérennité des réseaux propriétaires</h2>
<p>Votre histoire sur les réseaux sociaux propriétaires peut disparaître à tout moment. Cela fait longtemps que je le crie et le répète partout, mais rien ne vaut un bon exemple.</p>
<p>Depuis 2024, Strava n’autorise plus de partager un lien. Qu’il soit dans un post ou une activité, ce lien est supprimé.</p>
<p>Pire: tous les liens des posts précédents ont été supprimés. Toutes vos histoires Strava ont été altérées de manière permanente.</p>
<ul>
<li><a href="https://communityhub.strava.com/t5/strava-features-chat/upholding-platform-safety/m-p/45352/thread-id/8013">Upholding platform safety (communityhub.strava.com)</a></li>
</ul>
<p>Bon, il faut avouer que Strava est en train de suivre à la lettre le processus de merdification en limitant son API et ses conditions d’utilisation.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.dcrainmaker.com/2024/11/stravas-changes-to-kill-off-apps.html">Strava's Big Changes Aim To Kill Off Apps (www.dcrainmaker.com)</a></li>
<li><a href="/2023-06-15-merdification.html">De la merdification des choses (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Ne faites confiance à aucun réseau social propriétaire ! N’oubliez pas que tout service propriétaire va un jour fermer ou devenir soudainement inutilisable selon vos critères. Ou supprimer arbitrairement votre compte.</p>
<ul>
<li><a href="/et-si-vos-comptes-disparaissaient-demain/index.html">Et si vos comptes disparaissaient demain ? (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Si votre unique raison de garder un compte sur un service propriétaire est "parce que vous y avez un historique", sachez que cet historique ne vous appartient pas. La question n’est pas de savoir s’il va disparaître ou non, mais « quand ? » Car il va disparaître. C’est une certitude.</p>
<h2 id="soustitre-2">L’humanité et la non-marchandisation des réseaux libres</h2>
<p>Vous allez me dire que le libre n’est pas nécessairement mieux. Mastodon, par exemple, ne permet à ma connaissance pas d’exporter l’intégralité de son historique personnel.</p>
<p>Mais, comme c’est du logiciel libre, rien ne s’oppose à implémenter des outils qui font ce genre de choses. Rien n’empêche de trouver ou de créer des alternatives. </p>
<p>C’est complètement imparfait, mais, au moins, on est face à des êtres humains.</p>
<p>Un très beau témoignage d’Aemarielle, aquarelliste arrivée sur Mastodon en 2022. En résumé, Mastodon c’est vachement mieux pour les humains. </p>
<ul>
<li><a href="https://www.aemarielle.com/mastodon-ressenti/">Mastodon, mon ressenti | Aemarielle (www.aemarielle.com)</a></li>
</ul>
<p>Mais les influenceurs aux grosses métriques sont complètement perdus : il n’y a pas d’algorithme et donc pas moyen de les exploiter pour faire monter son audience. Il n’y a pas des milliers de robots et de comptes abandonnés qui font grimper le nombre de followers. La population du Fediverse a également tendance à ignorer voire à critiquer les contenus publicitaires ou avec des titres inutilement accrocheurs. </p>
<p>Les compétences développées par certain·e·s durant quinze ans sur Twitter sont donc inutiles, voire contreproductives, sur Mastodon !</p>
<p>Certains ne sont pas prêts à ce genre de plateforme. Ils ont eu la chance d’un moment être favorisés par les algorithmes Twitter/X/Instagram et, du coup, ils se raccrochent à tout prix à ces plateformes, à ce modèle.</p>
<p>Sur ces plateformes, vous êtes la marchandise comme le rappelle judicieusement X. En effet, le magazine satirique The Onion souhaite racheter le média d’extrême droite InfoWars (ce qui est très drôle). Mais X rappelle qu’ils sont propriétaires du compte X d’InfoWars et ne le transmettront pas à The Onion.</p>
<ul>
<li><a href="https://www.404media.co/xs-objection-to-the-onion-buying-infowars-is-a-reminder-you-do-not-own-your-social-media-accounts/">X's Objection to the Onion Buying InfoWars Is a Reminder You Do Not Own Your Social Media Accounts (www.404media.co)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-3">Libre et science</h2>
<p>L’accès libre et pérenne aux données et aux algorithmes n’est pas seulement historique et pratique, c’est également essentiel pour le principe scientifique. Si, en lisant votre papier, il n’est pas possible de reproduire vos résultats, car il manque l’un et/ou l’autre, ce n’est plus de la science, mais du simple « personal branding ».</p>
<p>Le marketing et la "protection de la propriété intellectuelle" sont deux vers qui rongent les cerveaux, y compris des scientifiques les plus pointus.</p>
<ul>
<li><a href="https://bernardrentier.wordpress.com/2024/11/18/pour-un-ecosysteme-scientifique-plus-solide-plus-transparent-et-plus-fiable/">Pour un écosystème scientifique plus solide, plus transparent et plus fiable (bernardrentier.wordpress.com)</a></li>
</ul>
<p>À propos, j’ai appris que les mots « sciences » et « shit » ont la même racine. Et que « nice » vient de la négation de science et signifiait à la base « ignorant » avant de subtilement évoluer vers « gentil ». Bref, un peu concon…</p>
<ul>
<li><a href="https://www.arrantpedantry.com/2019/01/24/science-and-shit/">Science and Shit (www.arrantpedantry.com)</a></li>
</ul>
<p>J’adore l’étymologie.</p>
<h2 id="soustitre-4">La solution du libre</h2>
<p>Le logiciel de gestion de librairie Biblys se libère. Un très beau témoignage de son auteur.</p>
<ul>
<li><a href="https://blog.biblys.fr/posts/biblys-est-desormais-un-logiciel-libre">Biblys est désormais un logiciel libre (blog.biblys.fr)</a></li>
</ul>
<p>Le libre n’est pas utopiste, il n’est pas meilleur, il n’est pas idéaliste : il est aujourd’hui indispensable !</p>
<h2 id="soustitre-5">Penser sa propre disparition avec git</h2>
<p>Si la pérennité de vos données en ligne est importante, il faut y penser, vous y préparer. C’est une des raisons majeures qui m’ont poussé à simplifier ce blog et en faire un simple répertoire remplit de fichiers au format texte que n’importe qui peut copier entièrement avec une simple commande git.</p>
<ul>
<li><a href="/2022-12-04-fin-du-blog-et-derniere-version.html">La fin d’un blog et la dernière version de ploum.net (ploum.net)</a></li>
</ul>
<p>Pour avoir sur votre ordinateur une copie de tout mon blog, y compris le logiciel qui le génère, il suffit de taper, dans un terminal :</p>
<blockquote> git clone https://git.sr.ht/~lioploum/ploum.net<br></blockquote>
<p>J’envisage même de mettre les sources de mes livres dans ce dépôt. Faut que j’investigue les sous-dépôts dans git.</p>
<ul>
<li><a href="https://git.sr.ht/~lioploum/ploum.net">~lioploum/ploum.net - Static generator for my blog with content - sourcehut git (lioploum)</a></li>
</ul>
<h2 id="soustitre-6">Gwit</h2>
<p>Je suis le développement de Gwit, une manière de publier des sites Internet à travers Git. L’auteur de Gwit a justement pris mon site en exemple pour l’adapter au format Gwit.</p>
<ul>
<li><a href="gemini://oldest.gwit.site/log/_en/20241018--adapting-ploum-sites/">Adapting Ploum's sites to gwit (oldest.gwit.site)</a></li>
</ul>
<p>C’est très technique, mais ce que je pense que tout le monde devrait retenir c’est que ça a été rendu possible, car les sources et le contenu de mon blog sont disponibles sous une licence libre et avec une simple commande git comme cité plus haut. L’auteur n’a pas du me demander la permission, n’a pas hésité. Il a le droit de le faire.</p>
<p>Et j’en suis incroyablement flatté…</p>
<h2 id="soustitre-7">L’arme ultime : RSS</h2>
<p>Je le dis, je le répète : la solution à l’immense majorité de nos problèmes, le réseau social ultime, c’est le flux RSS. On suit ce qu’on veut suivre, sans publicités, sans tracking, dans la police qui est le plus lisible pour nous. Nos abonnements restent confinés à notre lecteur de RSS.</p>
<p>Il faut juste apprendre à s’en servir (et c’est beaucoup plus facile que l’email).</p>
<p>Il y a une raison pour laquelle les grandes plateformes tentent de tuer le RSS. Il y a une raison pour laquelle vous devriez suivre ce blog par RSS.</p>
<ul>
<li><a href="https://pluralistic.net/2024/10/16/keep-it-really-simple-stupid/#read-receipts-are-you-kidding-me-seriously-fuck-that-noise/">Pluralistic: You should be using an RSS reader (16 Oct 2024) (pluralistic.net)</a></li>
</ul>
<figure>
<a href="/files/aaron_swartz.jpg"><img alt="Portrait d’Aaron Swartz par Bruno Leyval" src="/files/aaron_swartz.jpg" width="450" class="center"></a>
<figcaption>Portrait d’Aaron Swartz par Bruno Leyval</figcaption>
</figure>
<p>Aaron Swartz a contribué à la norme RSS. En l’utilisant (ou en utilisant son successeur ATOM), vous célébrez sa mémoire et son combat.</p>
<p>Vous souhaitez utiliser un lecteur RSS en ligne classique ? Je vous conseille le FreshRSS de Zaclys ou de Flus:</p>
<ul>
<li><a href="https://www.zaclys.com/flux/">Flux, chez Zaclys</a></li>
<li><a href="https://rss.flus.fr/">FreshRSS de Flus (que j’ai utilisé pendant des années)</a></li>
</ul>
<p>Vous préférez un truc plus automatisé, plus moderne ? Flus est pour vous.</p>
<ul>
<li><a href="https://flus.fr/">Flus.fr</a></li>
</ul>
<p>Mais il y a des centaines de possibilités. Et, comme le souligne Cory Doctorrow, vous pouvez passer de l’un à l’autre sans problème. Il suffit d’exporter la liste de vos flux dans un format (appelé OPML) puis de l’importer dans la nouvelle plateforme.</p>
<h2 id="soustitre-8">Penser la disparition</h2>
<p>Après, on peut faire comme Bruno, l’auteur du portrait d’Aaron Swartz ci-dessus, et souhaiter disparaître. On peut célébrer l’impermanence.</p>
<p>Préserver et transmettre notre patrimoine culturel personnel se pense, s’organise. Mais ne se confie surtout pas à une multinationale publicitaire.</p>
<div class="signature"><p>Je suis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ploum">Ploum</a> et je viens de publier <a href="https://bikepunk.fr">Bikepunk</a>, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, <a href="https://pvh-editions.com/ploum">achetez mes livres</a> (si possible chez votre libraire) !</p>
<p>Recevez directement par mail <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/fr.listes.ploum.net/">mes écrits en français</a> et <a href="https://listes.ploum.net/mailman3/lists/en.listes.ploum.net/">en anglais</a>. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser <a href="/atom_fr.xml">mon flux RSS francophone</a> ou <a href="/atom.xml">le flux RSS complet</a>.</p>
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