Cercle
d'Etude de R�formes F�ministes
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Face aux obscurantismes (l'islamiste et les autres) : le Devoir de Libert�
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TRIBUNAL
CORRECTIONNEL
Jugement
du 22/10/2002�� (extraits)
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Poursuite de M. Houellebecq pour�:
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1) provocation � la discrimination, � la haine ou � ta violence � l'�gard d'un groupe de personnes en raison de son appartenance � une religion d�termin�e, en l'esp�ce l' Islam,
faits pr�vus et sanctions par l'article 24 al-6 de la toi du 29 Juillet 1881 ;
2) injures envers un groupe de personnes � raison de leur appartenance � une religion d�termin�e, en l'esp�ce l'Islam faits pr�vus et sanctionn�s par l'article 33 a1 7 et 3 de la loi du 29 juillet 1881 ;
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Le d�lit pr�vu et r�prim� par l'article 24, alin�a 5 de la loi du 29 juillet 1881 suppose, pour �tre constitu�, que soit �tablie par la partie poursuivante l'existence d'une provocation � la discrimination, � la haute ou � la violence, c'est-�-dire d'un acte positif d'incitation manifeste, d'exhortation ou d'excitation � ces actions, attitudes ou sentiments, et que le propos ait pour cible une personne ou un groupe de personnes d�termin�, � raison de leur appartenance ou de leur non appartenance � une ethnie, une nation, une race ou une religion d�termin�e.
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Sur l'extrait n�1
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Le pr�venu n'exprime dans ce passage aucun sentiment de haine ni m�me de m�pris envers les "musulmans" ou les "touristes arabes" qu'il mentionne. Au contraire, en faisant part de sa� surprise � rencontrer des touristes arabes 'ou de confession musulmane ("arabes" et "musulmans" �tant d'ailleurs � cette occasion, et quoique le pr�venu s'en d�fende, l'objet d'une assimilation �videmment erron�e), M. HOUELLEBECQ exprime qu'il leur faisait jusque l� le cr�dit d'un mode de vie conforme aux r�gles de l'islam, notamment au mati�re sexuelle, et rapporte sa d�couverte qu'eux aussi (assimilation dont il faut comprendre qu'elle se rapporte aux "occidentaux", �galement cit�s), peuvent afficher une identit� confessionnelle sans pour autant conformer leur mode de vie aux principes moraux que cette appartenance implique.
Si cette d�couverte que l'hypocrisie ou la difficult� � concilier foi et actes ne seraient pas l'apanage des seuls occidentaux ou des seuls chr�tiens peut sembler na�ve, elle n'est �videmment pas constitutive d'une provocation � des sentiments de haine, ni, � plus forte raison, � des actes de violence ou de discrimination, envers un groupe de personnes qui n'est de surcro�t pas pr�cis�ment d�termin�, compte tenu de l'assimilation h�tive qui a �t� relev�e ci-dessus� (....)
Le d�lit vis� � la pr�vention n'est donc pas constitu� du chef de ce premier extrait.
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Sur l'extrait n�2��������������������������������������������������������
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Question
"Pour l'islam. ce n'est plus du m�pris que vous exprimer mais de la haine ?"
R�ponse�:
"Oui, oui, on peur parler de haine."
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Michel HOUELLEBECQ exprime donc par cette phrase qu�il ressent de la haine pour l'islam. II a indiqu� � l'audience qu'il avait fait cette r�ponse au journaliste pour pouvoir passer � un autre sujet, alors qu'en fait, il aurait du dire, pour exprimer exactement sa pens�e que c'�tait du m�pris qu'il ressentait, et non de la haine. Il ne conteste pas pour autant avoir tenu ce propos.
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Il ne peut �tre consid�r� qu'exprimer uniquement, et d'ailleurs dans des termes distanci�s ("on peut parler"), sa haine pour une religion constituerait un appel � la haine envers le groupe des personnes qui pratiquent cette religion ou se r�clament d'elle.
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L��nonciation d�une opinion personnelle relativement � une religion; envisag�e au sens conceptuel du terme, et qui n�est accompagn�e d'aucune exhortation ni appel � la partager, ne constitue pas une provocation � la haine, la violence ou la discrimination envers un groupe de personnes � raison de leur appartenance � cette religion, m�me si elle peut heurter ces personnes elles m�mes dans leur attachement communautaire ou leur foi.
Le d�lit vis� � la pr�vention n'est donc pas constitu� du chef de ce deuxi�me extrait.
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Sur
l'extrait n � 5
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Les parties civiles visent l'extrait qui suit de l'entretien publi� dans le FIGARO MAGAZINE
"La
lecture du Coran est une chose d�go�tante. D�s
que l'islam na�t�; il se signale par sa volont� de soumettre le monde.
Dans sa p�riode h�g�monique, il a pu appara�tre comme raffin� et tol�rant.
Mais sa nature c'est de soumettre. C'est une religion
belliqueuse, intol�rante qui rend les gens malheureux."
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M HOUELLEBECQ exprime dans cet extrait non plus un sentiment intime mais des opinions personnelles pr�sent�es commue relevant successivement des domaines de l�analyse litt�raire,� historique et th�ologique. Ces jugements peuvent bien �videmment �tre d�sapprouv�s, discut�s ou r�fut�s.
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1l est ais�ment compr�hensible que ces propos aient pu heurter les musulmans, compte tenu, notamment, du choix de l'adjectif "d�go�tant" pour qualifier la lecture du Coran.
Ces propos ne sont cependant accompagn�s d'aucun appel � en tirer des cons�quences discriminatoires � l'�gard de quiconque. Les personnes se r�clamant de l�islam sont au contraire pr�sent�es comme les victimes de la religion � laquelle elles appartiennent et font l'objet d'une commis�ration qui n'appara�t teint�e ni d'ironie ni de m�pris. L'expression de ces jugements de valeur port�s sur une religion, vis�e au travers de son texte saint, de son d�veloppement historique et de ses caract�ristiques doctrinales, ne renferme ainsi aucune incitation � la haine, la violence ou la discrimination envers la groupe des fid�les musulmans eux-m�mes.
Le d�lit de provocation � la discrimination, � la haine ou � la violence � l'�gard d'un groupe de personnes � raison de leur appartenance religieuse � l'islam n'est donc constitu� contre les pr�venus du chef d'aucun des passages vis�s sous cette qualification � la citation.
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Sur les propos qualifi�s d'injures �
raison de l'appartenance
� une religion d�termin�e
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Les
parties civiles ne visent de ce chef que l'extrait n� 3 qui suit
(revue LIRE)
"La
religion la plus con, c'est quand m�me l�islam. �Quand
on lit le Coran. on est effondr�,
effondr� ! La Bible au moins c'est tr�s
beau, parce que les juifs ont un
sacr� talent litt�raire... Ce [lui
peut excuser beaucoup de choses. Du coup, il y a une sympathie r�siduelle pour
le catholicisme, � cause de son aspect polyth�iste. Et puis il y a toutes ces
�glises, ces vitraux, ces peintures, ces sculptures..."
M.
HOUELLEBECQ exprime � nouveau des jugements de valeur de nature th�ologique, litt�raire ou artistique,
qui ne sont sans doute caract�ris�s ni par une particuli�re hauteur de vue, ni
par la subtilit� de leur formulation.
L'usage
inattendu du terme "con" pour qualifier l'islam, premi�rement vis�
par les parties civiles, rel�ve � l'�vidence du choix d'un certain niveau de
langage (le mot �tant utilis� comme synonyme des adjectifs "idiot"
ou "stupide") mais renferme n�anmoins une connotation outrageante ou
� tout le mains m�prisante.
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L'utilisation
du superlatif ("la religion la, plus ton") d�montre cependant qu'aux
yeux du pr�venu, toutes les religions (en tout cas toutes les religions monoth�istes,
selon une distinction sur laquelle il lui pla�t d'insister) m�ritent d'�tre
affubl�es de ce qualificatifs niais � des degr�s diff�rents. L'appr�ciation
ainsi port�e concerne donc uniquement une religion consid�r�e comme syst�me
de pens�e, et compar�e � d'autres.
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Dans
ces conditions, �crire que
"l'islam est la religion la
plus con" ne revient nullement �
affirmer ni � sous-entendre que tous les musulmans devraient �tre ainsi
qualifi�s. Ce propos ne renferme aucune volont� d'invective, de m�pris ou
d'outrage envers le groupe de personnes compos� des adeptes de la religion
consid�r�e.
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Le
reste du passage ne comporte pour sa part aucune expression outrageante, aucun
tertre de m�pris, ni aucune invective. Les musulmans peuvent �videmment
estimer que la comparaison propos�e entre les textes fondateurs des religions
monoth�istes n'est pas men�e de mani�re objective, en ce que, notamment, ne
seraient relev�s que dans le Coran (comme cela r�sulte des conclusions �crites
prises pour le pr�venu) des passages belliqueux ou intol�rants qu�on
retrouve aussi dans la Bible. Mais l�opposition entre le ��sacr� talent
litt�raire�� des juifs et l�effondrement qui saisit M. HOUELLEBECQ �
la lecture du Coran ressort d�une appr�ciation critique de textes dont le
plus r�cent remonte
au VII �me si�cle de notre �re, qui n'est pas en elle-m�me constitutive
d'une injure, et ne peut en tout �tat de cause viser les musulmans
d'aujourd'hui�.
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De m�me, les r�f�rences � l�apport culturel de la religion catholique, qui ne viennent d'ailleurs que conforter "la sympathie r�siduelle" �prouv�e pour cette religion par .M. H0UELLEBECQ "� cause de son aspect polyth�iste", appr�ciation d'avantage susceptible de choquer les catholiques, fid�les d'une religion qui professe la foi en un seul dieu, que les musulmans affirm� n'est en revanche pas remis en cause, ne sont aucunement empreintes de m�pris � l'�gard des musulmans d'aujourd'hui. On peut regretter l�ignorance ou le silence de M. HOUELLEBECQ sur les r�alisations artistiques qu'a inspir�es l'islam et le taxer d'�gocentrisme culturel. Mais relever l'apport artistique du catholicisme ne saurait en soi �tre consid�r� comme outrageant ou m�prisant � l'�gard des musulmans.
Le d�lit d'injure envers un groupe de personnes � raison de leur appartenance � l�islam n'est donc pas constitu�.
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COMMENTAIRE
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Le jugement dit la distinction � faire entre�:
- critique d�une religion, critique libre �tant donn� l�absence de r�pression du blasph�me en France.
- appel � la haine ou injure entre les adeptes d�une religion, seuls punissables en droit fran�ais.
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Ce jugement repose donc sur l�absence de r�pression du blasph�me en droit fran�ais ( sauf en Alsace-Lorraine� cf� �tude sur le droit international et europ�en). Compte tenu de la progression de la lutte contre la ��diffamation religieuse�� dans les instances internationales, et de la reconnaissance par la cour europ�enne d�un droit � la protection des sentiments religieux, il n�est pas du tout s�r que cette position de la France puisse se maintenir.
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Toute la difficult� dans ce type de cas, consiste � savoir ce qui, dans la critique d�une religion, peut ou non, inciter � la haine des adeptes d�une religion ou injurier les adeptes d�une religion ou les gens suppos�s l��tre. Si le principe est clair, la distinction dans chaque cas d�esp�ce peut l��tre beaucoup moins.
Dans le doute, sur un plan moral, surtout quand on sait qu�un groupe est r�guli�rement victime de racisme, de discriminations, de pers�cution, on a l�obligation (morale, ��politique��) de prendre toutes les pr�cautions que l�on peut pour que les propos que l�on tient ne puissent pas �tre r�cup�r�s ou mal compris.
Michel Houellebecq n�appara�t pas avoir pris ces pr�cautions l�.
Ibn Warraq,� dans son livre ��Pourquoi je ne suis pas musulman��, porte contre l�islam des accusations bien plus graves et nombreuses que lui, mais son livre ouvre la discussion et parait beaucoup difficilement r�cup�rable par des racistes.
Le juge ne condamnera que celui qui appelle � la haine ou injurie.
Le moraliste condamnera qui n�a pas pris les pr�cautions qu�il savait pouvoir prendre, pour �viter l�ambigu�t�.
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